Paradis, clef en main

Comme un exorcisme, Nelly Arcan s’amuse avec l’idée du suicide et avec les relations mère-fille. Un jeu qui semble, à posteriori, bien macabre.

C'EST MA VIE 
On a tous déjà pensé à se tuer. Au moins une fois, au moins une seconde, le temps d'une nuit d'insomnie ou sans arrêt, le temps de toute une vie. On s'est tous imaginé, une fois au moins, s'enfourner une arme à feu dans la bouche, fermer les yeux, décompter les secondes et tirer. On y a tous pensé, à s'expédier dans l'au-delà, ou à s'envoyer six pieds sous terre, ce qui revient au même, d'un coup de feu, bang. Ou encore à en finir sec dans le crac de la pendaison. La vie est parfois insupportable.
C'est ainsi.
Ça vient, ça prend à la gorge, et ça passe.
Dans le meilleur des cas.
Paradis, clef en main de Nelly Arcan

Antoinette veut mourir, elle s’adresse alors à une société secrète qui propose des suicides clef en main.

Je me suis souvent demandé si on pouvait se tuer par peur trop grande de mourir.

Une fiction un peu convenue (qui pourrait faire penser à Amélie Nothomb) et bien en deçà d’À ciel ouvert et de ses brillants Putain, Folle ou Burka de chair.

Peut-être pas la meilleure porte d’entrée pour cette autrice remarquable qu’il faut absolument lire ! Il faut lire Nelly Arcan !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C’est ma vie
On a tous déjà pensé se tuer. Au moins une fois, au moins une seconde, le temps d’une nuit d’insomnie ou sans arrêt, le temps de toute une vie. On s’est tous imaginé, une fois au moins, s’enfourner une arme à feu dans la bouche, fermer les yeux, décompter les secondes et tirer.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une obscure compagnie organise le suicide de ses clients. Une seule condition leur est imposée : que leur désir de mourir soit incurable. Pur, absolu. Antoinette a été une candidate de Paradis, Clef en main. Elle n'en est pas morte. Désormais paraplégique, elle est branchée à une machine qui lui pompe ses substances organiques. Et Antoinette nous raconte sa vie. Elle raconte sa mère, dont elle pourrait être la copie conforme. Elle raconte Paradis, Clef en main et son processus de sélection, ses tests et ses épreuves, son chauffeur et son psychiatre halluciné, le caniche blanc qui ponctue les scènes rocambolesques, son comité de sélection. Un monde Kafkaïen. Elle nous raconte aussi son oncle Léon, dont le suicide, également organisé par Paradis, Clef en main, a fait les manchettes du monde entier. Et surtout, elle nous raconte son nouveau désir d'exister, son second souffle.
Paradis, Clef en main est le cinquième livre de Nelly Arcan, qui s'aventure ici, et avec brio, dans la fiction. Roman d'anticipation, roman sur le désir de vivre, sur celui de mourir. Roman sur la responsabilité, sur le rapport à l'autre, sur le rapport au corps, à la vie. Roman fabuleux écrit d'une plume acérée

C’est aujourd’hui que je vous aime

Le livre de François Morel était déjà assez léger, mais sa poésie lui insufflait une âme et permettait d’oublier facilement son manque de consistance.

C’est aujourd’hui que je vous aime de François Morel et Pascal Rabaté

Hélas, avec cette BD, le dessin très simple (qui colle bien à cette historiette) et le pauvre contenu peinent à en faire un ouvrage convainquant.

Reste des très bonnes idées de Rabaté, et les décompositions de couleurs du personnage m’ont bien fait sourire !

Et bravo pour cette 4e de couv. qui m’a immédiatement renvoyé 40 ans en arrière
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Isabelle Samain, Isabelle Samain, Isabelle Samain,.. Son nom c'est déjà une chanson d'amour avec une métrique parfaite...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Isabelle Samain, Isabelle Samain, Isabelle Samain, Isabelle Samain...
De tout temps et dans tous les pays, les hommes ont rougi devant Isabelle Samain, ont été impressionnés par son charme absolu, son maintien tout en distinction, tout en élégance.
De tout temps et dans tous les pays, devant Isabelle Samain, les hommes se sont sentis sommaires.
À travers le récit des premiers émois amoureux de François Morel, une peinture de l'adolescence tendre et pleine d'humour

À ciel ouvert

Après les autobiographiques Putain et Folle, Nelly Arcan a fait une incursion dans la fiction avec À ciel ouvert.

De voir Rose avait mis le doigt sur quelque chose en elle, sur une cicatrice de cœur manquant. Physiquement elles se ressemblaient, c'est vrai, mais cette ressemblance en indiquait une autre, cachée derrière, celle de leur mode de vie consacré à se donner ce que la nature leur avait refusé ; Rose et Julie étaient belles de cette beauté construite dans les privations, elles s'en étaient arrogé les traits par la torsion du corps soumis à la musculation, à la sudation, à la violence de la chirurgie, coups de dé souvent irréversibles, abandons d'elles-mêmes mises en pièces par la technique médicale, par son talent de refonte. Elles étaient belles de cette volonté féroce de l'être.
À ciel ouvert de Nelly Arcan

Un livre où elle explore les corps et la beauté, la vénérée beauté, la froide et chirurgicale beauté. Cette burqua de chair dont on oblige les femmes à se vêtir et qui donnera le titre à son dernier ouvrage posthume.

Des femmes prisonnières de leur image et des hommes esclaves de leurs fantasmes

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le ciel à marée haute
C'est sous un soleil d'été que cette histoire avait commencé, l'an dernier, sur le toit de l'immeuble où vivait Julie O'Brien et où elle était allongée comme une écorchure, sans mentir, mot qu'elle s'était donné en respect pour sa peau formée de rousseur et de blondeur, une peau qui venait de l'Irlande si on la faisait remonter à la troisième génération paternelle et qui n'était pas armée, s'était-elle dit ce jour-là, contre l'acidité du soleil d'aujourd'hui, qui darde, qui pique vers la population mondiale ses rayons.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Sur le toit d'un immeuble de Montréal, une femme au teint de rousse est allongée, immobile, sous le soleil. Julie O'Brien souffre le martyre, mais considère les soins qu'elle s'inflige comme obligatoires.
La beauté, chez Nelly Arcan, est toujours sujet et objet de maltraitance. La beauté est une guerre. Et la guerre surgit lorsque Rose Dubois rejoint Julie sur ce toit brûlant...

1000

Incroyable !

J’ai créé ce blog alors que je commençais à travailler comme camiothécaire-biblioneur à Genève et j’en suis déjà à mon millième post (pas tout à fait mille livres car il y a une trentaine d’articles ça et là qui causent de choses et d’autres).

Je l’avais créé pour me souvenir de mes lectures… N’aurais-je désormais plus qu’à relire mon blog ?

Tiens, il me reste quelques lectures à coté de mon lit.

Photo : Niki Feijen

Mon fils en rose

Camilla a un fils qui s’habille en rose depuis tout petit… Et alors ?

Elle raconte ici les difficultés et les joies qu’elle rencontre en Italie, avec la famille, les amis, l’école, les psy et les médecins, les groupes de personnes concernées, des sites spécialisées, des réseaux…

Je m'appelle Camilla et mon fils s'habille en rose.
Vous l'aviez surement déjà compris puisque c'est le titre de ce livre, mais voilà bien la question : pourquoi mon fils s'habille-t-il en rose ? Et surtout : pourquoi ce besoin d'écrire un livre sur pourquoi mon fils s'habille en rose ? Si vous avez un fils qui s'habille en vert ou en bleu, vous n'allez certainement pas en faire un livre. Mais ce qui est bizarre, c'est que même si votre fille s'habille en vert ou en bleu, vous n'allez pas écrire un livre là-dessus.
Disons-le franchement, tout le monde s'en fiche des couleurs que portent vos enfants. Sauf si c'est un garçon qui s'habille en rose.
Mon fils en rose de Camilla Vivian

Une mère qui tente d’accompagner au mieux son enfant en l’écoutant sans figer ses points de vues, en protégeant, en se renseignant et en évitant de projeter ses à priori. Et c’est probablement dans ses questionnements et ses remises en questions qu’elle touche au plus juste.

Bref, qu'est-ce qui nous fait croire qu'aujourd'hui, tout à coup, nos enfants font seulement des caprices et qu'est-ce qui nous autorise à les cataloguer comme de potentiels malades psychiatriques ? N'est-il pas plus simple de considérer qu'une variation de genre a toujours existé, et que des années de normalisation par la culture occidentale ont conduit à une simplification utilitariste, pourtant pas représentative de la réalité des choses ? Et s'il faut vraiment parler de maladie psychiatrique, les comportements dysphoriques ne seraient-ils pas tout bonnement la conséquence des pressions de la société extérieure, qui n'est pas disposée à renoncer à la normalisation et tend donc, pour simplifier, à réprimer plutôt qu'à accepter ce qui est différent ?

Un livre magnifique sur l’amour et le respect et qui, humblement, pose peut-être plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Et c’est probablement une de ses plus grandes qualités.

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je m'appelle Camilla et mon fils s'habille en rose.
Vous l'aviez surement déjà compris puisque c'est le titre de ce livre, mais voilà bien la question : pourquoi mon fils s'habille-t-il en rose ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Camilla Vivian vit seule avec ses trois enfants. Federico, son deuxième fils, manifeste depuis l'âge d'un an et demi le désir d'être - aussi - une fille.
Elle choisit de ne pas l'en empêcher et d'être plutôt à l'écoute.
Elle se documente, lit, trouve sur internet des histoires similaires à la sienne et découvre l'existence de la dysphorie de genre, des enfants gender fluid, transgender, non-binaires et d'autres encore.
Avec détermination, délicatesse et ironie, Camilla Vivian raconte son propre cheminement à travers l'histoire de Federico, un petit garçon serein et conscient de sa différence, avec ses cheveux longs, ses habits et son vernis à ongles roses.
Elle évoque le quotidien de sa famille, à l'école et à la piscine, pendant les courses et les fêtes d'anniversaire, la pression sociale et familiale, tout en partageant ses propres doutes et interrogations

Burqa de chair

Quelle autrice ! Quelle écriture ! Un livre écrit en plusieurs étapes, rassemblé et publié après son suicide. Quelle tristesse !

La vie est un scandale immune. Mais la vie, cette éblouissante déchéance, cet éclair phosphorescent qui part du ciel pour s'écraser au sol, qui crève le silence comme une condamnation à être, une sommation à voir le jour, à hurler sous la tape médicale dans le dos, à se lever et à marcher, à chier dans un pot et à grandir, à devenir plantation ou semence, homme ou femme, finira un jour par rebondir d'où elle a chuté, le Rien, le Grand Vide, le Ciel de mon père, l'horizon caché de toutes ses prières.
Burqa de chair de Nelly Arcan

Nelly Arcan nous parle, presque sereine (en tout cas avec plus de distance et termine en parlant d’elle à la troisième personne), de sa relation au corps, à sa mère, à la beauté, à son image et au regard de l’autre.

Puis à l'aube de ses trente ans sa fille était devenue folle. Sous couvert de dépression elle avait voulu s'achever bien des fois. Par maladresse elle avait toujours survécu. Depuis quelques années la mère avait dû conclure que les chirurgies n'avaient pas rassasié sa fille et qu'elle était donc fondamentalement insatiable de ce qu'elle n'était pas. Elle avait dû conclure que son rôle de mère ne cesserait jamais alors que ce rôle aurait dû devenir celui d'une grand-mère. La conclusion était qu'il n'y aurait pas de flambeau à passer et que c'était mieux ainsi. Le nez de son père n'irait plus jamais se plaquer sur le visage d'un nouveau-né.

Avec une préface émouvante et bienvenue de Nancy Huston sur l’importance de l’oeuvre de Nelly Arcan

Quand paraît en 2001 son premier livre Putain, Nelly Arcan est une belle jeune femme.
Elle sera lue, photographiée, filmée, interviewée, jamais tout à fait prise au sérieux, admirée pour son culot et pour son cul, et Dieu sait qu'elle jouera sur l'ambiguïté, difficile pour une jolie jeune femme de ne pas jouer là-dessus, difficile, oui, même en étant, comme elle, d'une lucidité javellisante, d'avoir les idées parfaitement claires alors que des journalistes vous filment et vous flattent, vous tirent dans tous les sens, vous caressent l'ego dans le sens du poil et le poil dans le sens de l'ego, difficile de savoir comment se tenir, comment regarder la caméra, alors qu'on veut plaire, et vendre, c'est-à-dire se vendre, toujours, le désir vient jeter du trouble, toujours... mais bon.
Avec une préface de Nancy Huston

Et finalement, oui…

Se tuer peut nuire à la santé
Nelly Arcan

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La robe de chambre
La vie est un scandale, c'est ce que je me dis tout le temps. Être foutue là sans préavis, sans permission, sans même avoir consenti au corps chargé de me traîner jusqu'à la mort, voilà qui est scandaleux.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Septembre 2001-septembre 2009 : en l'espace de huit ans, une jeune femme déploie son chant et disparaît. Huit ans seulement pour entrer avec fracas dans la littérature et pour s'échapper du monde tout aussi violemment. Nelly Arcan était une guerrière, sous les fragiles apparences d'un ange blond. Son courage intellectuel n'avait d'égal que son effroi de vivre, c'est-à-dire d'habiter un corps. Un corps de femme, exposé et convoité, prison et camisole, étendard et linceul. Burqa de chair, disait-elle dans une formule saisissante. Il semblerait que très tôt elle ait appris à poser les bonnes questions, celles qui dérangent, que s'emploie à détailler Nancy Huston dans sa préface. Les textes qu'on lira ici sont du meilleur Nelly Arcan. Dernières pierres blanches au bord d'une route interrompue, ils nous donnent l'occasion d'entendre encore une fois la beauté de cette langue inimitable, étourdissante, et qui laisse le lecteur hors d'haleine

Belle de jour

Une femme heureuse, à qui tout sourit aux bras d’un mari aimant. Mais, après avoir rencontré un troublant bellâtre et entendu qu’une dame de ses connaissances avait été aperçue sortant d’une maison de plaisir, elle se dit :
– Moi aussi, je veux !

- Ma chérie, ma chère chérie.
Severine alluma doucement la lampe posée sur une table basse près du lit. Elle avait besoin de voir la félicité pure, dépouillée de pensée qui se livrait dans ces paroles. La lumière, voilée d'une soie opaque, s'étala mollement à travers la chambre. Pierre n'en fut pas heurté, ne remua point, mais ce que Séverine avait tenté de surprendre, le mystère végétal d'un visage qui n'appartient encore qu'aux ombres et à la vie, avait disparu de ses traits. Il était revenu au sentiment de lui-même. 
- Comme je suis heureux de te retrouver, dit-il... Cela me manquait tant.
Il ouvrit soudain les yeux.
Belle de jour de Joseph Kessel

Incapable de résister à son fantasme, à son dévorant désir transgressif, elle s’en va vendre ses charmes chez Madame Anaïs. Une lecture dans l’attente d’un « classique, juste et moral » retour de manivelle.

Le tout dans une écriture un peu passée et ampoulée. Bof, bof… un homme qui parle des femmes

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Pour aller de sa chambre à celle de sa mère, Séverine, qui avait huit ans, devait traverser un long couloir. Ce trajet qui l'ennuyait, elle le faisait toujours en courant. Mais, un matin, Séverine dut s'arrêter au milieu du couloir. Une porte qui, à cet endroit, donnait sur la salle de bains, venait de s'ouvrir. Un plombier parut. Il était petit, épais. Son regard, filtrant sous de rares cils roux, se posa sur la petite fille. Séverine, qui, pourtant, était hardie, eut peur, recula.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une femme de la haute bourgeoisie finit par s'adonner à la prostitution en raison de sa misère affective et du caractère insipide de sa vie

Folle

Après le choc de Putain, j’ai directement entamé Folle, livre dans lequel Nelly Arcan annonce son suicide pour ses 30 ans (ce qu’elle réalisera tristement un peu plus tard). Elle y parle d’une déception amoureuse, de ses obsessions pour la « jeunesse-beauté » (duo indissociable selon elle et qu’elle voit s’échapper) et des rôles assignés aux femmes.

Aussi je mourrai parce que, pour être aimée des autres, il m'aurait fallu sourire. Je mourrai pour démontrer que le sourire est une façon de s'économiser comme le sommeil. Tu m'aimais mais tu détestais la tristesse sur mes lèvres fermées qui perdurait dans les moments heureux comme l'odeur du corps sous celle de la lavande. Bien sûr il m'arrivait de sourire mais le sourire des gens tristes a toujours quelque chose de laborieux, il met du temps à venir, ça ressemble aux poulains à peine sortis du ventre de leurs mères qui tentent de tenir debout ; pour y arriver, ils doivent s'y prendre à plusieurs reprises, et devant leurs mères désemparées, ils titubent, ils se cassent la gueule. Un jour d'anniversaire où j'avais dans les bras une nouvelle poupée, ma mère m'a frappée parce qu'elle en avait assez d'attendre la joie. Très tôt j'ai, compris que, dans la vie, il fallait être heureux ; depuis, je vis sous pression.
Folle de Nelly Arcan

Une fin de relation toxique et chaotique pleine d’aigreur et de regrets.

Cette lettre est mon cadavre, déjà, elle pourrit, elle exhale ses gaz. J'ai commencé à l'écrire le lendemain de mon avortement, il y a un mois.
Aujourd'hui, ça fait exactement un an qu'on s'est rencontrés.
Demain, j'aurai trente ans.

Des phrases plus courtes, posées, un style plus maîtrisé mais moins déconcertant

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
À Nova rue Saint-Dominique où on s'est vus pour la première fois, on ne pouvait rien au désastre de notre rencontre. Si j'avais su, comme on dit la plupart du temps sans dire ce qui aurait dû être su au juste, et sans comprendre que savoir à l'avance provoque le pire, si on avait pu lire dans les tarots de ma tante par exemple la couleur des cheveux des rivales qui m'attendaient au tournant et si de l'année de ma naissance on avait pu calculer que plus jamais tu ne me sortirais de la tête depuis Nova...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«Ensuite j'ai eu peur de tout, j'ai eu peur qu'il soit comme toi, qu'en naissant le bébé ait déjà un passé rempli d'autres femmes. [...] Il me semblait qu'en venant de toi, cet enfant me quitterait.»
Devenant son propre personnage, Nelly Arcan, jeune romancière sulfureuse, écrit une lettre à l'homme qui l'a quittée. Histoire de conquête et d'abandon, de désir et d'humiliation entre une jeune femme québécoise et son amant français, consommateur de cyber-sexe et de coke. Elle s'y révèle amoureuse folle, folle de jalousie, folle de son corps haï, folle de la dictature planétaire de l'image.
Après le succès éblouissant de Putain, Nelly Arcan plonge une nouvelle fois dans la beauté d'un désespoir absolu

Putain

Nelly Arcan raconte sa vie avec des phrases longues comme les pages pour tenter de décrire tout ce qu’elle n’arrive pas à dire. Une lecture hypnotique qui parle d’une société malade, de la valorisation et marchandisation du corps, de la beauté et des choses.

Alors pour les antidépresseurs je ne dis pas non, en attendant que ma mère meure je veux bien prendre tout ce qu'on peut m'offrir, des comprimés bleus le jour et des blancs la nuit, je veux bien rire d'un faux rire et sans raison sous la pression de la dopamine, rire en attendant de trouver la force de me tuer,
Putain de Nelly Arcan

Un texte glaçant qui se déroule sans fin pour tenter de trouver… Mais trouver quoi dans toute cette putasserie ou les hommes paient pour baiser des jeunes femmes de l’âge de leurs filles ? Qu’un bain de mousse et un sac Hermès peuvent apporter du bonheur ?

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je n'ai pas l'habitude de m'adresser aux autres lorsque je parle, voilà pourquoi il n'y a rien qui puisse m'arrêter, d'ailleurs que puis-je vous dire sans vous affoler, que je suis née dans un village de campagne à la lisière du Maine, que j'ai reçu une éducation religieuse, que mes professeurs étaient toutes religieuses, des femmes sèches et exaltées devant le sacrifice qu'elles faisaient de leur vie, des femmes que je devais appeler mères et qui portaient un faux nom qu'elles devaient d'abord se choisir, sœur Jeanne pour Julie et sœur Anne pour Andrée, des sœurs-mères qui m'ont enseigné l'impuissance des parents à nommer leurs enfants, à les définir adéquatement auprès de Dieu, et que voudriez-vous savoir de plus, que j'étais somme toute normale, plutôt douée pour les études, que dans cette campagne de fervents catholiques où j'ai grandi on renvoie les schizophrènes aux prêtres pour qu'on les soigne par exorcismes, que la vie y est très belle lorsqu'on se contente de peu, lorsqu'on a la foi ? Et quoi encore, que j'ai joué du piano pendant douze ans et que j'ai voulu comme tout le monde quitter la campagne pour habiter la ville, que depuis je n'ai plus joué une note et que je me suis retrouvée serveuse de bar, que je me suis faite putain pour renier tout ce qui jusque-là m'avait définie, pour prouver aux autres qu'on pouvait simultanément poursuivre des études, se vouloir écrivain, espérer un avenir et se dilapider ici et là, se sacrifier comme l'ont si bien fait les sœurs de mon école primaire pour servir leur congrégation ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Cachée derrière les rideaux de sa chambre, une prostituée patiente entre deux clients. L'attente se nourrit du souvenir : une famille dévote, une mère absente et un père distrait. Et parfois la jouissance éprouvée avec ces hommes auxquels elle fait l'amour, ces hommes qu'elle déteste peut-être autant qu'elle-même. Un récit obsessionnel qui ressemble à un exorcisme désespéré pour se maintenir en vie

À l’heure où les dieux dorment encore

Un peu dubitatif face à ce que j’avais hâtivement classé en « valorisation économique de fonds de tiroirs », j’ai abordé ce carnet de croquis à reculons.

À l’heure où les dieux dorment encore de Cosey

Et pourtant ! Au bout de quelques pages de ce voyage avec Cosey, des Alpes suisses au Japon en passant par les montagnes tibétaines (et bien d’autres topographies, rencontres et pays), on se met à comprendre et à partager cette quête de soi.

Pas d’histoire ici, mais des aquarelles, des portraits et des paysages sublimes, des textes courts et des pensées… un voyage avec l’auteur qui se termine en couleurs

« À l’heure où les dieux dorment encore… »
sont les premiers mots de Savitri, long poème épique composé par Sri Aurobindo dans lequel la belle Savitri parvient à duper Yama, dieu de la mort afin de sauver son époux.
L’auteur de BD, lui, est contraint la plupart du temps à dessiner d’imagination ou, en partant de quelques documents à réaliser une reconstitution + ou – plausible… Avec le risque, toujours, de tomber dans les inévitables clichés, stéréotypes et tics graphiques. Le dessin d’observation est probablement la meilleure ruse pour échapper à l’emprise du dieu tyran, roi des idées toutes faites, qui squatte notre boîte crânienne, et apercevoir un moment ce qui se présente à nos yeux, tel, quel. Ce qui consiste à oublier tout ce qu’on sait.
Exercice ardu, avec de nombreux échecs, mais qui apporte parfois une vraie part de joie. En voici quelques échantillons.
Cosey

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
"À l'heure où les dieux dorment encore..."
sont les premiers mots de Savitri, long poème épique composé par Sri Aurobindo dans lequel la belle Savitri parvient à duper Yama, dieu de la mort afin de sauver son époux.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Entre carnet de route et journal intime, l'artiste présente ses dessins réalisés au cours de nombreux voyages et sur lesquels il s'appuie comme autant d'outils de travail, de repérages et d'aide-mémoire pour ses albums. Le dessinateur se dévoile et partage ses pensées, avec en toile de fond une réflexion sur le dessin, la couleur, la musique, la représentation du réel et des vies intérieures