Construire un feu

Une fois n’est pas coutume, Chabouté a mis de la couleur pour cette histoire qui se passe dans le blanc glacial de l’hiver en Alaska.

Construire un feu de Chabouté, d’après la nouvelle de Jack London

En reprenant la nouvelle de Jack London (dont je ne me souvenais pas de la fin), Chabouté nous raconte un homme et un chien durant la ruée vers l’or dans le Klondike, par moins trente degrés Celsius… ou plutôt moins quarante… ou pire encore.

Une nouvelle qui célèbre la beauté des extrêmes. Un homme face à une nature impitoyable

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
... Pas de soleil...
... Des jours que tu n'as pas vu le soleil, mon ami...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un homme en quête de fortune ou d’aventure, perdu en plein milieu du grand nord, tente de rejoindre ses compagnons. Dans ce désert de neige et de glace, rien d’autre que lui et un chien... Confronté aux forces de la nature, au froid mordant, sa vie ne dépend que de quelques allumettes avec lesquelles il pourrait se faire un feu... Une histoire à l’intrigue très dépouillée et terrible, transcendée par un dessin qui nous fait ressentir le froid comme on ne l'avait encore jamais éprouvé en bande dessinée.
Christophe Chabouté nous livre ici, avec talent une adaptation libre d'une des plus terribles nouvelles de l’auteur de « Croc Blanc » et de « L’appel de la forêt ». Une histoire à l’intrigue très dépouillée, mais dont le moindre geste, simple et banal prend une dimension inquiétante et fantastique.
Un récit où chaque situation devient démesurément oppressante.
« Construire un feu », nous présente un homme livré à lui-même, face à un univers hostile et luttant jusqu'au bout de ses limites physiques et mentales !

Les princesses aussi vont au petit coin

Les bandes dessinées de Chabouté se remarquent souvent par leur traitement monochrome en aplats noir-blanc et par la prédominance de l’image sur le texte.
Des albums superbes aux rythmiques et plans variés.

Les princesses aussi vont au petit coin de Chabouté

Là encore, c’est très beau… mais très noir !

Une histoire un peu abracadabrante de chasse à l’homme dans une conspiration mondiale. Pas forcément convaincante, mais prenante et tendue avec une mise en abyme finale un peu surprenante mais… bah ! Pourquoi pas.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ce type étrange, sorti de nulle part, qu'ils prennent en auto-stop… cet individu, inquiet, agité et armé, qui leur indique maladroitement la route à l'aide du canon de son pistolet… Ce vieil alcoolique qui veut jouer aux Lego… Les autoroutes truffées de caméras, les cigarettes, toujours ces satanées cigarettes, un soi-disant pouvoir occulte, Merlin l'enchanteur, un chauve qui court à tort et à travers, cette manie de toujours vouloir éviter la foule, ce paquebot garé là, en plein milieu du chemin... Et les princesses dans tout ça ?
Chabouté nous livre ici une histoire où, non content de le tenir en haleine, il prend un malin plaisir à désorienter, égarer et embrouiller le lecteur. Un récit déconcertant où tout est sens dessus-dessous et rien n'est à sa place… 112 pages d'un bazar réglé comme du papier à musique, un grand n'importe quoi raconté avec une rigueur et une précision implacables...

Pastorius Grant

La première chose qui tape en ouvrant cet album, c’est les couleurs, une palette invraisemblable, surréaliste et virevoltante.

Pastorius Grant de Marion Mousse

Un western avec des indiens et des chasseurs de primes sans scrupules au milieu des forêts et des canyons… Et une petite fille aveugle accompagnée d’un cochon à l’odorat fort développé.

Et une histoire de mort à venger !

Un western brutal à la fin fantastique

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Les traces s'arrêtent là...
Le vieux a dû traverser.
Ben moi, j'te parie que cette vieille carne de Grant est en train d'crever dans un coin !
On peut encore faire demi-tour, frérot !


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Pastorius Grant est un vieux chasseur de primes sans pitié, désabusé et mourant. Alors qu'il tente de capturer un hors-la-loi qui s'est réfugié dans une réserve indienne, il croise la route d'une gamine aveugle et de son cochon. Avant de mourir, son père lui a dit de trouver Grant, et de l'engager pour le venger de son meurtrier... Pour son premier roman graphique chez Dargaud, Marion Mousse a choisi la couleur directe pour retranscrire la beauté formelle de la nature et faire ainsi écho aux tourments de son protagoniste. Un western psychologique intense, brutal, en cinémascope.

- Vous êtes un monstre, Pastorius Grant !
Vous êtes pire qu'un tueur, vous êtes moins qu'un porc !
- C'est vrai... Le genre de type que tu devrais fuir comme le diable.

La meilleure des poignées de mains : Musée du président Jacques Chirac

Voilà plutôt une bonne blague qu’un essai sur les poignées de mains présidentielles, un catalogue d’exposition ou une plaquette de présentation du musée du président Jacques Chirac en Corrèze.

Plus j'y réfléchissais, plus j'aurais bien voulu, en Corrèze ou ailleurs, avoir serré la main de Chirac, et que par la même il eut serré la mienne, après tant d'autres il est vrai, et qu'importe si ça ne lui aurait sans doute procuré aucune joie d'exception. Si Chirac avait tenu sa main dans la mienne il aurait peut-être guéri ma verrue, là, mon induration sur le flanc de la main, dans la continuité de l'auriculaire
La meilleure des poignées de mains : Musée du président Jacques Chirac de Jacques Jouet, avec des photos du musée de Eva Avril
Passé la blague…

M’houis, pourquoi pas, j’ai bien dû laisser échapper quelque sourire

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
En soixante-quatorze ans de citoyenneté française, et sans que ce fût un souhait d'orgueil négatif ou conviction internationaliste (quoique?), je n'ai jamais serré la main d'un seul président de ma république.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Jacques Jouet, il faut le rappeler, est l'auteur d'un roman-feuilleton, La République de Mek-Ouyes (P.O.L.). Il s'y connaît donc en hommes politiques. Et comme il a aussi donné un roman intitulé Le Directeur du Musée des Cadeaux des Chefs d'État de l'Étranger (Seuil), nul n'était mieux placé que lui pour escorter les lecteurs désireux de découvrir le Musée du président Jacques Chirac à Sarran, en Corrèze. Précisons cependant, probité oblige, que la poignée de mains évoquée par l'auteur oulipien ne saurait être exposée aux visiteurs : s'il l'abrite dans ses réserves, le musée, consacré aux cadeaux reçus par le Président, ne pourrait la montrer au public qu'au prix d'une incohérence coupable, chacun le comprendra.

Le joueur d’échecs

Voilà bien longtemps, j’avais lu ce joueur d’échecs (Schachnovelle), dernier roman de Stefan Zweig publié en 1942 après son suicide.

Le joueur d’échecs de David Sala, d’après le roman de Stefan Zweig

Et David Sala a réussi une absolument brillante adaptation en bande dessinée. Et si (en tout cas dans mon souvenir), tous les éléments de l’histoire ne semblent pas s’y retrouver, le Monsieur B. est remarquablement mis en valeur et sa dégringolade est fascinante.

Une adaptation au graphisme superbe qui ne manquera pas de me faire replonger dans l’original

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Regarde ce voyageur...
Lui, il cherche une jolie femme, une belle compagne de traversée.
Comme disait Stendahl : "La beauté est promesse de bonheur.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
1941. Dans les salons feutrés d'un paquebot en route pour l'Argentine, le champion du monde d'échecs affronte lors d'une ultime partie un aristocrate viennois, dont l'incroyable maîtrise du jeu est née dans l'antre de la tyrannie.

Cette dénonciation poignante et désespérée de la barbarie nazie est le dernier texte écrit par Stefan Zweig avant son suicide.

Résine

Voilà une bande dessinée qui semble, au premier abord, bien naïve, girly et candide, destinée à un public de tout petits…

Mais pourtant !

Résine de Élodie Shanta

C’est plein d’humour, les dénonciations sont claires sans êtres pédantes, et, plus que tout, c’est très sympa à lire !

Une histoire de sorcière attachante qui ne mérite pas un autodafé ! Ou alors, pour devenir plus puissante encore…

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Clac !
Résine !!! Les gens du village ! Ils sont devenus fous !


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Résine est accusée d'être une sorcière. Avec son compagnon Claudin, ils s'enfuient et commencent une nouvelle vie à Floriboule. Mais leur arrivée va être à l'origine de nombreux problèmes : accusations infondées, procès en sorcellerie, confrontation avec des villageois sexistes et obscurantistes. On retrouve dans Résine l'univers fantastico-médiéval, l'humour et la douceur d'Elodie Shanta, ici au service d'un récit incisif et de problématiques plus graves, telles que le sexisme, le harcèlement et les violences faites aux femmes.

Le secret de Chimneys

Tout commence à Bulawayo avec un manuscrit à porter à Londres et quelques lettres d’amour…

Et tout se complique, à souhait, avec moult rebondissements, révélations, surprises et coups d’éclats, tous plus improbables.

La voiture passa par le portail et traversa le parc de Chimneys. Inutile de décrire cette demeure seigneuriale, dont on trouvera la description exacte dans le guide Châteaux historiques d'Angleterre. Ils furent reçus par un vieux domestique à cheveux blancs dont la physionomie, l'attitude et tous les gestes semblaient dire « Nous ne sommes pas habitués à des assassinats dans ces murs ! Mais faisons face au désastre en rassemblant tout notre sang-froid. Mourons s'il le faut, mais faisons comme si de rien n'était ! »
 — Mylord vous attend, déclara-t-il. Par ici, s'il vous plait.
Il les conduisit dans un petit boudoir où lord Caterham fuyait le luxe trop seigneurial des grands salons, et les annonça :
 — Monsieur le docteur Cartwright. Monsieur l'inspecteur de police.
Le secret de Chimneys de Agatha Christie

Dans un style très théâtral, Agatha Christie propose là un roman de suspense vaudevillesque qui se lit bien vite en laissant un souvenir bien vide

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
— Anthony Cade ! Vieux gentleman !
— Jimmy McGrath ! Toi ? Pas possible !
Les voyageurs de l'autocar Castle - sept dames exténuées et trois messieurs en sueur — observaient la scène avec le plus vif intérêt. Leur guide, Mr Cade, avait, selon toute évidence, rencontré un vieil ami. Tous les voyageurs — et particulièrement les voyageuses - professaient la plus profonde admiration pour Mr Cade, pour sa silhouette svelte et vigoureuse, son visage bronzé, sa façon d'exercer son métier de guide, de les amuser, de les distraire, d'apaiser leurs petites querelles.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tout avait commencé de la façon la plus classique qui soit : un prince déchu cherchant à récupérer son trône sollicite l'appui - discret - des Britanniques.
En échange de quoi, les compagnies anglaises se verraient concéder l'exploitation des pétroles du petit État. Bref, une banale manœuvre politico-financière, élaborée dans le cadre somptueux d'une des plus anciennes demeures seigneuriales d'Angleterre : Chimneys. Pourtant, l'affaire se corse lorsqu'on se rend compte que des individus équivoques se sont glissés parmi le beau linge qui prépare sa révolution de palais.
Et les cadavres font affreusement désordre dans les salons de Chimneys...
Un prince déchu sollicite l'appui des Britanniques pour reconquérir son petit royaume des Balkans. À Paris, un de ses anciens ministres meurt laissant un manuscrit qui contient des révélations explosives sûr la famille royale. Anthony Cade est chargé de le remettre à un éditeur tandis que les services secrets anglais aussi bien que les opposants lu prince souhaiteraient l'intercepter... C'est dans le cadre somptueux du manoir de Chimneys que vont se retrouver les protagonistes de cette ténébreuse affaire. dans ce livre publié en 1925, Agatha Christie utilise avec humour les ressorts du roman l'espionnage pour ménager un de ces huis clos criminels dont elle a le secret.

L’homme au complet marron

Un bandit international, le mystérieux « Colonel », est poursuivi par une jeune fille orpheline romantique et un peu fofolle. Une histoire avec des diamants, un voyage en bateau vers l’Afrique du Sud dans une ambiance coloniale et pleine de rebondissements.

Palpitant d'angoisse, je déroulai la couche de papier. Une poignée de cailloux ternes et vitreux roula sur le lit.
 — Des cailloux ! dis-je, désappointée.
 — Des cailloux ? cria Suzanne.
La vibration de sa voix me fit frémir.
 — Des cailloux ? Non, Anne ! Des diamants !
L’homme au complet marron de Agatha Christie

Une histoire un petit peu mièvre mais sympathique

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Nadine, la danseuse russe qui avait conquis Paris en coup de vent, revint saluer pour la dixième fois, rappelée par les applaudissements frénétiques. Ses longs yeux noirs brillèrent dans un sourire, sa bouche écarlate eut une moue hautaine.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tout avait commencé de la façon la plus classique qui soit : un prince déchu cherchant à récupérer son trône sollicite l'appui - discret - des Britanniques.
En échange de quoi, les compagnies anglaises se verraient concéder l'exploitation des pétroles du petit État. Bref, une banale manœuvre politico-financière, élaborée dans le cadre somptueux d'une des plus anciennes demeures seigneuriales d'Angleterre : Chimneys. Pourtant, l'affaire se corse lorsqu'on se rend compte que des individus équivoques se sont glissés parmi le beau linge qui prépare sa révolution de palais.
Et les cadavres font affreusement désordre dans les salons de Chimneys...
Un prince déchu sollicite l'appui des Britanniques pour reconquérir son petit royaume des Balkans. À Paris, un de ses anciens ministres meurt laissant un manuscrit qui contient des révélations explosives sûr la famille royale. Anthony Cade est chargé de le remettre à un éditeur tandis que les services secrets anglais aussi bien que les opposants lu prince souhaiteraient l'intercepter... C'est dans le cadre somptueux du manoir de Chimneys que vont se retrouver les protagonistes de cette ténébreuse affaire. dans ce livre publié en 1925, Agatha Christie utilise avec humour les ressorts du roman l'espionnage pour ménager un de ces huis clos criminels dont elle a le secret.

Chien du heaume

Lire Justine Niogret, c’est se confronter à la violence crue. L’écriture est ciselée, froide et directe, injurieuse. Travaillée, superbe et glaçante !

» Et un jour, j'ai croisé un homme et sa hache. J'ai croisé ton père, Chien, et quand je l'ai vu je n'ai pas osé lui adresser la parole. J'avais beau regarder son fer et ses motifs de serpents, j'ai eu trop peur pour aller le voir. Nous étions dans une auberge, je m'en souviens encore, et je regardais luire sa hache aux lueurs des lanternes. Il neigeait, dehors, et pourtant le printemps était là, et les flocons noyaient les arbres et tuaient les herbes. Je n'ai pas adressé la parole à ton père, Chien du heaume, et tu devines peut-être pourquoi. Parce que quelque chose couvait dans son sang, je le savais rien qu'à voir la chaleur qui ravageait son front et ses joues. Sa folie se voyait, sais-tu ? Ça brûlait, ça brûlait sans fin, ça tournait, mais ça tournait mal, comme une roue sur un essieu brisé, quelque chose qui ne pouvait plus aller droit. Non, tout l'équipage était disloqué, sa charrette allait verser d'un moment à l'autre, si ce n'était déjà fait, et je ne voulais pas être sur sa route à l'heure où la cargaison de son esprit se renverserait.
Chien du heaume de Justine Niogret

Pour autant, son premier gros succès m’a semblé souffrir quand même de quelques petits défauts de jeunesse. Une quête interminable, parfois un peu lassante, faite d’allers et de retours, à la manière d’un jeu de rôle médiéval à la recherche d’indices, parsemé de fausses pistes et de rencontres.

Un peu cliché, mais parfait pour les amateurs du genre

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
L'archer se nommait Manfred, et aujourd'hui il allait tuer une vieille femme. Une nourrice, plus exactement.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Chien du heaume, un surnom gagné au prix du sang et de la sueur par celle qui ne possède plus rien que sa hache, dont elle destine la lame à ceux qui lui ont pris son nom. Mais en attendant de pouvoir leur sortir les viscères, elle loue son bras et sa rage au plus offrant, guerrière parmi les guerriers, tueuse parmi les loups. De bien curieuses rencontres l'attendent au castel de Broe où l'hiver l'a cloîtrée : Regehir, le forgeron à la gueule cassée, lynge à la voix plus douce que les mœurs, le chevalier Sanglier et sa cruelle épouse de dix printemps. Au terme de sa quête, Chien trouvera-t-elle la vengeance, la rédemption ou... autre chose ?

Musée

Il y avait les tranches de vie, désormais Chabouté nous propose les tranches de musée.

Musée de Christophe Chabouté

Il se promène et observe dans un musée (l’un des plus beaux du monde, le musée d’Orsay). Le jour, les visiteurs s’y baladent et la nuit, les œuvres.

Entre fidèles portraits des visiteurs et nuits fantastiques, cet album est un hommage magnifique à ce musée qui ne l’est pas moins.

Claude Monet – Coquelicots, 1873

Une bande dessinée idéale pour se donner envie d’une petite balade à Paris

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Qui regarde qui ? …

Entre les statues de marbre et les tableaux de maîtres, les visiteurs du musée d’Orsay posent tantôt des yeux admiratifs, tantôt un regard perplexe sur les chefs-d’œuvre qui bordent les allées. Ils échangent dans un murmure discret et continuent leur déambulation. Mais lorsque les portes du musée d'Orsay ferment et que la nuit tombe, les sculptures et les peintures quittent la pose, descendent de leur socle, s'animent, se détendent, se mettent à se raconter, s’interrogent ou commentent ce qu'elles ont pu voir ou entendre au cours de la journée. L’Olympia de Manet, qui en a peut-être assez de passer sa vie allongée, déserte sa couche ; les Raboteurs de parquet de Caillebotte, fatigués, délaissent les lattes du parquet ; et Héraclès se dirige, comme à son habitude, tout droit vers sa pièce favorite : les toilettes. Certains se retrouvent pour dresser un portrait peu flatteur des visiteurs indélicats ; d’autres, désabusés, s’assoient pour observer l’absurdité du monde à travers les vitraux de la grande horloge. D’autres encore accueillent les nouveaux venus, car les collections s’agrandissent ! Au petit matin, toutes les œuvres regagnent leur socle ou leur cadre et reprennent la pose avant l'ouverture des portes. Un quotidien au musée où l’on découvre que tour à tour, les rôles s'inversent. Que peuvent bien penser de nous les peintures et les sculptures à force de nous observer et de nous écouter dans les couloirs et les salles d'un musée tout au long de la journée ?… Ce que de jour les « regardeurs » disent des regardés, et surtout ce que de nuit les regardés racontent des « regardeurs ». Le lecteur devient témoin et spectateur d'un quotidien aussi bien nocturne que diurne dans le musée.

Fin observateur, Christophe Chabouté signe un album plein de poésie qui nous invite à réfléchir sur notre rapport à l’art, nos certitudes et à la manière dont nous percevons le monde. Se jouant des visiteurs mais jamais du lecteur, il laisse place à la contemplation avec humour et sensibilité.