Lorsqu’on parle de guerre, on voit des politiques qui montrent leurs gros bras, les traînées vertes des missiles chirurgicaux la nuit, des bâtiments éventrés, des militaires aux treillis de camouflage…
Mais qui montre les enfants qui jouent ? La vie des habitants d’un territoire qu’une guerre a pris en otages ? Toutes ces victimes innocentes aux vies déplacées, ruinées, amputées, annihilées.
Ils ne voulaient que vivre sur la terre où ils sont nés. Ils ont été dépouillés, parqués, humiliés, affamés, frappés, tués
Journée ordinaire. Hier, deux frappes ont tué quatre gamins dont le seul crime avait été de jouer au foot sur la plage. Tu te réveilles dans la chambre où tu t'es installé la veille. L'hôtel concentre une partie de la presse internationale. Tu aurais préféré loger chez l'habitant. Mais ton agence t'a convaincu de privilégier la sécurité. Peu de quartiers sont vraiment épargnés. Des familles entières disparaissent parce qu'elles habitent, sans le savoir ou en toute conscience, à proximité d'un bureau clandestin. Les frappes chirurgicales relèvent souvent de l'erreur médicale.
Entre les ruines fumantes de Gaza et les pages jaunies des livres, un vieil homme attend. Il attend quoi ? Peut-être que quelqu'un s'arrête enfin pour écouter. Car les livres qu'il tient entre ses mains ne sont pas que des objets - ils sont les fragments d'une vie, les éclats d'une mémoire, les cicatrices d'un peuple. Quand un jeune photographe français pointe son objectif vers ce vieillard entouré de livres, il ignore qu'il s'apprête à traverser le miroir. « N'y a-t-il pas derrière tout regard une histoire ? Celle d'une vie. Celle de tout un peuple, parfois », murmure le libraire. Commence alors l'odyssée palestinienne d'un homme qui a choisi les mots comme refuge, résistance et patrie.
De l'exode à la prison, des engagements à la désillusion politique, du théâtre aux amours, des enfants qu'on voit grandir et vivre, aux drames qui vous arrachent ceux que vous aimez, sa voix nous guide à travers les labyrinthes de l'Histoire et de l'intime. Dans un monde où les bombes tentent d'avoir le dernier mot, il nous rappelle que les livres sont notre plus grande chance de survie - non pour fuir le réel, mais pour l'habiter pleinement. Comme si, au milieu du chaos, un homme qui lit était la plus radicale des révolutions.