Camiothécaire-biblioneur aux lectures éclectiques. Romans, essais, biographies et autobiographies, récits de voyage, bandes dessinées, nouvelles, chroniques, témoignages… des critiques selon l'humeur
Dans un style très poétique, Ubastute raconte un adieu à la vie.
Ubasute de Isabel Gutierrez
Un livre qui se lit autant pour sa poésie, son rythme et sa douceur que pour son histoire. Une mère en fin de vie, malade, demande à son fils de la prendre sur son dos et de la porter à la montagne pour s’y éteindre.
Un moment pour évoquer sa vie en silence avec son fils.
Un livre plein d’émotions… un peu too much, peut-être
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) C'est un jour de très grand vent, un vent de fin d'automne sur la surface de ce monde.
Marie n'en finit pas de rincer son riz blanc.
Depuis ce matin, les branches du cerisier ont commencé à s'entrechoquer dans un bruit de cannes sèches.
C'est son temps.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Marie va mourir. Elle demande à son fils de la porter dans la montagne pour la déposer sous le Grand Rocher. Ce court périple est la dernière chance pour Marie de parler à son fils.
Ce roman autour de l'ubasute, cette tradition ancestrale du Japon qui voulait que l'on abandonne en montagne une personne âgée et malade, brosse le portrait d'une femme lumineuse. C'est un véritable hymne à la vie, à sa beauté et à sa cruauté.
En pleine crise du Covid, Dominique, 81 ans, apprend qu’elle est atteinte de la maladie d’Alzheimer. Elle qui avait toujours été dans le rang, conformiste, elle décide de se suicider dans les trois jours.
Flamboyant crépuscule d’une vieille conformiste de Emmanuelle Pirotte
Trois jours pour livrer ses regrets et ses bonheurs. Un regard acéré sur une vie pas si flamboyante.
Mais aussi, derrière beaucoup d’humour (et c’est vraiment très drôle), des réflexions sur la vieillesse et le droit de mourir dignement, sur « qu’ai-je fait de ma vie », et sur notre société de manière plus générale.
Un tout gros coup de cœur pour Dominique qui aurait peut-être pu mieux réussir sa vie, mais qui ne loupe pas ses adieux
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Mon nom est Dominique Biron, et je n'ai jamais réussi à m'y faire. Depuis près de quatre-vingt-deux ans, je hais de toute mon âme ce que ces cinq syllabes expriment d'invisibilité, de tiédeur insipide, de discrétion bigote.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Je m'appelle Dominique Biron
et j'ai décidé de mourir dans trois jours.
C'est le temps qu'il a fallu au Christ
pour revenir d'entre les morts,
ça me suffira bien pour faire mon petit ménage. »
Quand Alzheimer frappe à sa porte, Dominique, 81 ans, préfère ne pas s'attarder. Elle se prépare à dire adieu à sa petite vie, ses enfants, ses bibelots... Lorsqu'elle fait le tri dans ses souvenirs, c'est avec une réjouissante férocité. Car l'ennui bourgeois n'a pas réussi à priver Dominique d'une certaine hauteur de vue sur l'Existence.
Le plus difficile est de prendre congé de sa petite-fille adorée, Victoire, 20 ans. Que lui dire ? Que lui écrire ? Comment lui faire comprendre que le choix de sa grand- mère est celui de la liberté et, paradoxalement, de la vie ?
Dans un texte qui claque comme un uppercut, Emmanuelle Pirotte fait du lecteur le dépositaire d'une singulière confession, implacable, drôle et tendre. Travaillé par les problématiques qui hantent nos sociétés modernes, le roman interroge sans concession notre rapport à la mort et au libre arbitre.
Flamboyant crépuscule d'une vieille conformiste est le portrait d'une femme qui se lance, avec panache, dans un ultime face-à-face avec elle-même.
Après 25 ans de retraite et de voeux de silence, un chartreux (non, pas le chat, le moine) se retrouve à voyager dans le vrai monde pour un bref séjour à Paris.
Un bruit étrange et beau de Zep
L’occasion d’une rencontre.
Une bande dessinée tendre, douce et introspective au rythme lent et poétique. Une grosse réussite !
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Pas besoin de dire « Là ! Il y a un bouquetin ! »
Pas besoin de dire qu'il est magnifique...
Vivre dans le silence nous réduit à l'essentiel.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Depuis 25 ans, William fait partie de l'ordre religieux des Chartreux. Mais un héritage l'oblige à se rendre à Paris où il est confronté à son ancienne vie. Sa rencontre avec Méry, jeune femme atteinte d'une maladie incurable et décidée à profiter de ses derniers jours, bouleverse et interroge ses choix et ses certitudes.
Jean est médecin et il voit passer bien des patients. A chaque fois, c’est une fenêtre sur leur intimité qu’ils ouvrent. Une tranche de vie qui se dévoile au travers d’une maladie transactionnelle.
Où vont les larmes quand elles sèchent de Baptiste Beaulieu
Au fil de ce livre d’une grande tendresse, c’est aussi le médecin qui se dévoile avec ses peurs, ses douleurs et ses culpabilités… Mais aussi ses convictions, son féminisme, son homosexualité et toutes ses rages et colères.
Alors oui, c’est parfois un peu mielleux-mélo-sirupeux, mais c’est aussi souvent bien drôle. La vie d’un médecin qui ne peut pas sauver tous ses patients et qui peine aussi à se sauver lui-même
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) C'est un petit cabinet médical. On y accède après avoir traversé un couloir en crépi beige, très beige, puis longé un patio fleuri, très fleuri. Parfois, ça sent les fleurs séchées, parfois rien du tout.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Jean a trente-six ans. Il fume trop, mâche des chewing-gums à la menthe et fait ses visites de médecin de famille à vélo. Il a supprimé son numéro de portable sur ses ordonnances. Son cabinet médical n'a plus de site Internet. Il a trop de patients : jusqu'au soir, ils débordent de la salle d'attente, dans le couloir, sur le patio.
Tous les jours, Jean entend des histoires. Parfois il les lit directement sur le corps des malades. Il lui arrive de se mettre en colère. Mais il ne pleure jamais. Ses larmes sont coincées dans sa gorge. Il ne sait plus comment pleurer depuis cette nuit où il lui a manqué six minutes.
Voilà une vie heureuse pleine de délicatesse. Oui, même si l’histoire est bien différente, les émotions m’ont semblé bien similaires à ce roman précédent. David réécrirait-il toujours selon le même pattern1 ou aurait-il un message qu’il ne cesserait de vouloir transmettre ?
La vie heureuse de David Foenkinos
Une histoire en trois période. Et si la première ma semblé longuette et la dernière un peu mélo, la deuxième m’a franchement bien amusé.
Allons David, il est temps de renaître et de laisser enfin exploser cette vie heureuse qui n’ose l’être !
1 Merci encore pour les deux trois bonnes blagues des notes de bas de page
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Éric Kherson appréhendait toujours de prendre l'avion. II dormait en général assez mal la veille du voyage, se laissant dériver vers les pires scénarios possibles, imaginant tout ce qu'il laisserait derrière lui après sa mort violente dans un crash.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Jamais aucune époque n’a autant été marquée par le désir de changer de vie. Nous voulons tous, à un moment de notre existence, être un autre. »
Sordide coïncidence, Jean Teulé est mort en écrivant cette histoire. C’est bien ballot !
L’histoire du roi qui ne voulait pas mourir de Jean Teulé
La fin de vie de Louis XI vue sous un angle à la Teulé : un peu crade, violent, méchant et purulent… Sans pitié !
L’histoire du roi qui ne voulait pas mourir dessins de Dominique Gelli
Manuscrit inachevé, des amis se sont proposés pour le terminer. Hommages, souvenirs, fins théâtrales, dessins, photos… Ils accompagnent cette drôle d’histoire en beauté.
C’est touchant sans sensibleries ni mélo.
Merci
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Au sortir d'une nuit de pleine lune, sur une plage insulaire de mer très lointaine, des fruits et des fleurs naissent ensemble dans la lumière qui apparaît. En cette petite terre volcanique émergée, faisant partie d'un archipel d'une dizaine d'îles inhabitées, croît une variété d'arbres qu'on ne trouve nulle part ailleurs au monde et pouvant survivre au contact de l'eau de mer.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Jean aimait rire de la mort. Il se moquait de l'embarras des survivants.
« Je vous préviens : je n'irai pas à votre enterrement », et il éclatait de ce rire énorme dont il avait le secret.
Le 18 octobre 2022, une bactérie sournoise l'a foudroyé.
Il laisse un vide, un silence, un manque insondable.
Il laisse aussi la première partie du manuscrit qu'il était en train d'écrire. L'histoire de Louis XI, ce monarque singulier qui, tout en étant de ceux qui ont posé les fondations de la nation française, a commis les plus effroyables crimes qu'on puisse imaginer.
Ses amis nous ont convaincus de publier ce texte inachevé. Philippe Jaenada, Enki Bilal, Dominique Gelli, Florence Cestac, François Delebecque, Philippe Druillet et Benjamin Planchon ont improvisé des textes et des images sur la dernière création de Jean Teulé.
En partant d’un conte que lui racontait Nishio-san quand elle était toute petite, Amélie Nothomb nous parle – à l’instar de Haruki Murakami et de tant d’autres (une mode ?) – de son métier d’écrivaine.
Psychopompe de Amélie Nothomb
Une Amélie psychopompe qui, l’instant d’un livre fait revivre son passé, ses morts, ses oiseaux et ses traumatismes en nous parlant de son enfance voyageuse de fille de diplomate. Et, ce faisant, nous dévoile son labeur.
Psychopompe, adjectif et nom masculin
(grec psukhopompos, de pompaios, qui conduit)
Conducteur des âmes des morts. (Dans l’Antiquité, ce rôle était joué surtout par Hermès, Charon et Orphée.)
Larousse.fr (en ligne)
Un livre touchant, de chants et d’envol
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Le marchand de tissus vit passer un vol de grues blanches. Émerveillé par leur beauté, il pensa qu'il rêverait de découvrir une étoffe d'une splendeur comparable à leur plumage.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Écrire, c'est voler. »
Prenant pour titre un adjectif issu du grec apparu en France au XIXe siècle, ce roman d'Amélie Nothomb évoque ces personnages mythiques accompagnant les défunts jusqu'aux Enfers ou les en ramenant, à l'instar de Charon, de l'Ankou, d'Orphée ou d'Hermès.
Il y a plusieurs histoires dans cette bande dessinée. Évidemment de la violence, souvent gratuite. Mais aussi de la résistance, de la résignation, des croyances et de la folie.
Et en 80 pages – d’une édition fort soignée, au dessin très maîtrisé et aux superbes aplats de couleurs – Stephen Desberg nous raconte l’horreur. La vie d’avant, le camp et la vie d’après. Les anges d’Auschwitz de Stephen Desberg, dessins de Emilio Van der Zuiden, couleurs de Fabien Alquier
Avec toujours, des anges. Mais qui sont-ils et où sont-ils au milieu de l’enfer.
Arbeit macht frei, me dit-il en guise d’adieu. Ce qui est faux. À Auschwitz seule la mort rend libre.
Une réussite !
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) J'ai rencontré les anges pour la première fois un soir de mon enfance.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) En 1939, la Pologne est envahie par les Allemands. Les Juifs sont conduits dans le ghetto de Varsovie, première étape avant les camps, dont Auschwitz. Le narrateur raconte sa rencontre avec Hannah qui tente de s'opposer à la barbarie et à l'indicible.
Auschwitz aujourd'hui, c'est un silence qui hurle.
Un silence pour nous laisser imaginer l'écho de l'horreur, la mémoire des cris et des prières.
Parmi les portraits du souvenir, celui de David. Le regard de la douleur, mais aussi de l'espoir.
La volonté de ne pas avoir été abandonné, de ne pas lâcher prise. Car même au cœur de l'inhumanité, les anges ne peuvent jamais être loin.
Et celui qui pleure n'est pas toujours celui qui souffre le plus.
Voilà une bande dessinée bien intéressante sur le jugement dernier. Oh, pas celui d’un dieu dans le ciel. Ici, il s’agit plutôt de la dernière occasion de régler nos derniers conflits intérieurs. Au moment de notre mort, nous serons nous pardonnés nos culpabilités ?
Le dernier quai de Nicolas Delestret
L’histoire d’un majordome dans le dernier hôtel, au dernier quai du dernier train. L’hôtel où on laisse ses derniers bagages.
Un album au dessin léger et sympathique, pour une thématique qui aurait peut-être été mieux mise en valeur par un trait moins enfantin
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Émile commence sa journée, rythmée au tic près, immuablement, il reproduit les gestes monotones, mais rassurants, de son métier : gérant d'hôtel
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « Prêt pour l'ultime voyage ?
Vérifiez d'abord que tous vos souvenirs sont en règle... »
Les clients de cet hôtel ont un point commun : ils viennent tous de mourir. Dans un rituel immuable, Émile, en hôte bienveillant, les accueille et les guide pour qu'ils puissent faire un point sur leur vie et trouver une forme de résilience. Quant à ceux qui ne parviennent pas à faire la paix avec eux-mêmes, ils connaissent un sort peu enviable. Tout est réglé comme une horloge à l'hôtel du dernier quai. Pourtant un grain de sable va enrayer les engrenages. Cette fois, les nouveaux pensionnaires n'ont aucun souvenir de leur ancienne vie. Dès lors, comment les aider ?