Le fond de la bouteille

Ce fond de la bouteille est très cinématographique et à sa lecture on imagine fort bien les canyons, la rivière en furie, l’ambiance moite rendue floue par l’alcool et la violence contenue de chaque instant.

 - Viens !
Il pousse une porte, une autre porte. Il traverse la chambre de Nora, toute bleue, la salle de bains de Nora, bleue aussi, et d'un luxe qu'on ne s'attendrait pas à trouver dans une vallée perdue de l'Arizona. Puis c'est chez lui, une chambre jaune et brune, avec une salle de bains jaune.
Il allume les lampes au fur et à mesure, ouvre un placard où pendent des complets.
 — Tu étais de la même taille que moi.
 — Je suis devenu un peu plus maigre.
Sans gêne, sans pudeur, comme quand ils étaient gamins, son frère retira sa chemise, découvrant une poitrine blanche, un torse puissant, bien musclé, que P. M. lui a toujours envié. Il laisse tomber son pantalon, son caleçon. Il est nu comme un ver.
Le fond de la bouteille de Georges Simenon
Pour autant, à sa lecture, le rythme m’a semblé lent, limite un peu poussif.

L’histoire de deux frères que tout sépare, contraints par des forces plus grandes qu’eux. Le fleuve et la famille

Le 66e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il tenait son verre à la main et regardait vaguement le fond de whisky pâle qu'il contenait encore. On aurait dit - et c'était sans doute vrai - qu'il reculait le plaisir de boire la dernière gorgée. Quand il l'eut enfin avalée, il continua un bon moment a fixer le
verre. Il hésitait à le poser sur le comptoir, à le pousser un tout petit peu, de deux ou trois centimètres.
Bill, le barman, qui paraissait pourtant plongé dans une partie de dés avec des cow-boys, comprendrait le signal, car il était aux aguets: il était toujours aux aguets. surtout avec un client comme P.M.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Lorsque les pluies diluviennes de juillet viennent gonfler la rivière Santa Cruz, qui traverse la petite ville frontalière de Tumacacori, il devient impossible de passer de l'Arizona au Mexique.

Donald, évadé de prison, a mal choisi le moment pour se réfugier temporairement dans le ranch de son frère Patrick Ashbridge, dit "P.M.". Rien n'a jamais rapproché les deux hommes, si ce n'est un goût immodéré de l'alcool et un étrange dégoût de la vie. Mais Patrick est devenu un riche propriétaire et "deputy sheriff". Donald, le frère prodigue et séduisant, un criminel en fuite. Celui-ci doit passer le fleuve à tout prix.

Simenon a construit ce drame de la solitude et de l'amour fraternel comme un western tragique et sanglant. A l'image du désert illimité qui en est le décor, c'est un de ses romans les plus désespérés.