Dans un ping-pong plein d’émotions, deux femmes rejouent le drame. Entre douleur absolue et colère irréfrénable elles tentent de comprendre, de justifier, de trouver la ou les coupables.
Un livre qui, en passant, rend justice aux femmes de ménage dans un magnifique portrait plein de sensibilité
Immortalisée par Harcourt, dans un savant fondu de noir et blanc, une femme me double au carrefour. J'ai presque l'impression qu'elle me toise. Au centre de la publicité, que je photographie au moment où le bus 70 me dépasse, trône une phrase entre guillemets : « Je suis mise en lumière pour sortir mon métier de l'ombre. » Blondeur hollywoodienne, regard en coin, lèvres closes, Mélanie a l'air fier, voire un peu hautain, pour une fois, tant qu'à faire. Son prénom figure dans le coin gauche de l'affiche, juste au-dessus de sa fonction : employée de maison chez Shiva depuis dix ans. Employée de maison... Est-ce que le boulot passe mieux, est-ce qu'on a moins mal au dos et aux articulations grâce à cette expression ?
Deux femmes, Camille et Anaïs, prennent tour à tour la parole. Camille est la fille de Sylvie, la femme de ménage qu'Anaïs emploie depuis quinze ans dans sa maison du Touquet. Maintenant qu'Anaïs la loue sur Airbnb, Sylvie s'épuise à tout nettoyer de fond en comble avant l'arrivée de chaque nouvel occupant.
La petite entreprise fonctionne jusqu'à ce jour des vacances de la Toussaint qui fait basculer leur vie et les sépare à jamais. Dévastée, Anaïs démonte un à un les mécanismes qui ont irrémédiablement conduit au drame dont elle tient Sylvie pour responsable. Révoltée, Camille refuse de voir sa mère injustement accusée.
Dans ce roman tendu et percutant, Amélie Cordonnier met en scène la dérive de nos vies où tout est à louer, la force de travail des uns, la maison des autres. Qui en paiera le prix ?