L’inavouable : la France au Rwanda

Après avoir lu la bande dessinée La fantaisie des dieux : Rwanda 1994, j’ai recherché ce bouquin dont elle était tirée. Comme j’ai bien fait !

Et nous rejoignons la folle gigue, Monsieur. Et nous avons beau puer, nous sentons le pain frais. Dans la marmite de Goma, c'est une soupe infecte aux relents de crachats qui mitonne. La mort nous imprègne, pas la haine. Et c'est la haine qui bouillonne ici. Une haine brute, éclatante, minérale. Une haine de soi, une haine du monde, une haine des siens. Une haine prête à déclencher tous les cataclysmes, une haine prête à se gorger de mal, une haine monstrueuse, indomptable. Une haine comme une danse, une danse, une danse, une danse, une danse.
C'est à vomir. Cela provoque des haut-le-cœur, des remontées de bile, des fracas d'estomac. C'est à se faire Kurtz dans Au cœur des ténèbres. C'est à griffonner sur le testament des bons sentiments cette phrase définitive:
« Exterminez toutes ces brutes! »
L’inavouable : la France au Rwanda de Patrick de Saint-Exupéry

Car ce livre va bien plus loin et continue l’enquête bien plus profondément que la BD. Enquête, articles dans le Figaro, commission d’enquête, procès… Patrick de Saint-Exupéry est partout et ne lâche rien ! Et si j’arrivais à la conclusion que la France se contentait de regarder ailleurs durant ce génocide, ceci ressemble de plus en plus à un euphémisme tant la France semble mêlée de bien plus près. Livraisons d’armes, formation et instruction militaire, soutien à la famille

Et cela va plus loin, beaucoup plus loin. 
En ce bel été 1994, François Mitterrand confie à ses proches: « Dans ces pays-là, un génocide c'est pas trop important. »
Et cela va plus loin.
Beaucoup plus loin.

Un livre dont le style un peu surfait m’a souvent fait lever les yeux au ciel avec tous ces effets dispensables et ces continuels « Monsieur »… Mais !!! (je dois avouer que la fin du livre en donne une excellente justification)

Quelle impressionnante somme d’enquête sur ce crime contre l’humanité !

Et aussi un très bon livre pour comprendre la notion de politique d’état, pour appréhender la politique étrangère française et ses ingérences africaines post-coloniales, pour mieux cerner Mitterrand et nombre d’acteurs de ces événements.

Une sale histoire aux responsabilités qui semblent rester bien obscures ! (et – raison d’état – elles le demeureront vraisemblablement encore longtemps)

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Ce livre est mon histoire. Mais ce n'est pas seulement mon histoire. C'est aussi l'histoire d'un génocide. Une histoire française, une histoire africaine, une histoire d'empire. Une histoire d'une cruauté sans fond, d'une violence extrême. Si extrême que vous ne l'imaginez pas. Pas encore.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Je vais vous rabaisser au rang d'homme. Ou vous élever, c'est selon. Je vais attraper votre main et nous allons partir. Quelque part, là-bas, il y a longtemps.

En Afrique, la France se bat depuis cinquante ans pour conserver son empire. La décolonisation n'a pas été une rupture, juste une étape. Avec le temps, nos dirigeants ont simplement privilégié l'ombre, perfectionnant certaines techniques forgées durant les guerres coloniales : les opérations secrètes, l'enseignement de la «guerre révolutionnaire», cette doctrine de manipulation des foules...

Au Rwanda, notre politique fut une réussite. Techniquement - je veux dire si l'on se débarrasse de ces concepts encombrants que sont le bien et le mal, l'humain et l'inhumain, l'acceptable et l'inadmissible -, nous fûmes au sommet. La mystification est une figure de la guerre. Nous la pratiquâmes avec une maîtrise qui glace le sang.

Des soldats de notre pays ont formé, sur ordre, les tueurs du troisième génocide du XXe siècle. Nous leur avons donné des armes, une doctrine, un blanc-seing. J'ai découvert cette histoire malgré moi, dans les collines rwandaises. Il faisait chaud, c'était l'été. Il faisait beau, c'était magnifique. C'était le temps du génocide

La passe dangereuse

Un roman un peu tradi avec un couple sans passion, une jolie femme esseulée, un belatre et… voilà…

La passe dangereuse de William Somerset Maugham

Mais seulement alors, le roman commence suite à la découverte de l’adultère par le cocu. Voici venu le temps de la repentance et de la morale pour une Kitty qui n’est pas sans rappeler Scarlett, une belle écervellée que les événements vont endurcir et en révéler les qualités… Au milieu de la Chine en pleine épidémie de choléra. Une histoire avec des boys, des coolies, des soeurs missionaires, la chaleur moite et un petit whisky le soir.

Un livre aussi sur la fragile condition des femmes, à la merci de leurs maris, de leurs amants et du qu’en dira-t-on

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Peu de mondes semblent aussi éloignés l'un de l'autre que ceux de Somerset Maugham et de George Orwell. On découvre pourtant avec surprise dans un essai de l'auteur de 1984, qu'il admirait «immensément.»
Maugham, pour son «talent à raconter une histoire sans la moindre fioriture.»
Au lecteur de se laisser séduire par une invraisemblable histoire d'amour dans le Hong Kong de la grande époque coloniale anglaise avec adultère, épidémie, général chinois, bonnes sœurs... Tous ingrédients que Maugham mélange avec un art consommé du récit et une maîtrise raffinée du « bel ouvrage.»