Madame Hayat

Madame Hayat m’a touché, bouleversé. Une histoire toute en contrastes qui raconte l’initiation sentimentale de Fazil.

 — Assieds-toi, je t'en prie, je vais faire un café.
Je pris place sur le canapé. Elle revint avec deux cafés. Elle s'assit sur le fauteuil, les jambes croisées. Sa robe remonta sur sa cuisse. J'en avalai ma salive. Incapable de savoir quoi dire, quoi faire. Elle était clairement en train de me séduire, et moi je n'arrivais même pas à me rendre compte que j'étais en train d'être séduit.
 — C'est très beau chez vous, dis-je d'une voix timide.
 — Tu aimes ?
 — Oui, vraiment.
Madame Hayat de Ahmet Altan
C’est la liberté folle de Madame Hayat dans un régime totalitaire, c’est la misère après l’opulence, c’est la volupté sans âges et un amour de jeunesse, c’est la timidité face à l’expérience, c’est la volonté de fuir et le besoin de se toucher toujours, c’est une relation inconditionnelle toute en omissions, c’est ambivalence des désirs, c’est envisager un futur dans un pays soumis à un pouvoir arbitraire.

Et plus que tout, c’est la beauté vue pour la première fois, l’émerveillement, l’absolu.

Mais c’est aussi le premier instant des choix déchirants

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La vie des gens changeait en une nuit. La société se trouvait dans un tel état de décomposition qu'aucune existence ne pouvait plus se rattacher à son passé comme on tient à des racines. Chaque être vivait sous la menace de sombrer dans l'oubli, abattu d'un seul coup comme ces pantins qu'on prend pour cible dans les fêtes foraines.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Fazil, le jeune narrateur de ce livre, part faire des études de lettres loin de chez lui. Devenu boursier après le décès de son père, il loue une chambre dans une modeste pension, un lieu fané où se côtoient des êtres inoubliables à la gravité poétique, qui tentent de passer entre les mailles du filet d’une ville habitée de présences menaçantes.
Au quotidien, Fazil gagne sa vie en tant que figurant dans une émission de télévision, et c’est en ces lieux de fictions qu’il remarque une femme voluptueuse, vif-argent, qui pourrait être sa mère. Parenthèse exaltante, Fazil tombe éperdument amoureux de cette Madame Hayat qui l’entraîne comme au-delà de lui-même. Quelques jours plus tard, il fait la connaissance de la jeune Sıla. Double bonheur, double initiation, double regard sur la magie d’une vie.

L’analyse tout en finesse du sentiment amoureux trouve en ce livre de singuliers échos. Le personnage de Madame Hayat, solaire, et celui de Fazil, plus littéraire, plus engagé, convoquent les subtiles métaphores d’une aspiration à la liberté absolue dans un pays qui se referme autour d’eux sans jamais les atteindre.

Pour celui qui se souvient que ce livre a été écrit en prison, l’émotion est profonde.

Chroniques de jeunesse

Pour payer ses études, Guy va travailler à l’usine. Une papeterie (celle qui fabrique le papier sur des rouleaux de plusieurs tonnes, pas celle qui vend des stylos et des enveloppes) gigantesque, éprouvante, chaude, humide et exigeante. L’apprentissage du métier d’ouvrier et de la fatigue.

Chroniques de jeunesse de Guy Delisle

Un dessin remarquable en noir et blanc avec quelques aplats de jaune qui colle remarquablement bien avec l’usine, son architecture et sa mécanique. Des points de vues qui expriment parfaitement le gigantisme des installations qui s’impose au petit nouveau.

Pourtant, même si elle semble fidèle, l’histoire reste superficielle. La relation avec le père est bien vite balayée et celles avec les ami.e.s à peine esquissée. Certes, le sujet n’était pas là.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Dans sa jeunesse, l'auteur, alors étudiant, a travaillé trois étés dans une usine à papier. Il raconte cette expérience, brossant avec humour et tendresse un portrait du monde du travail et questionnant les relations qu'il entretient avec son père, lui-même salarié dans l'usine en tant qu'ingénieur industriel