L’inspecteur Cadavre

Et voilà, c’était le dernier roman de Maigret que je n’avais pas encore lu. Et, bonheur, c’en était un très bon ! Restent encore quelques nouvelles mais celles-ci m’ont généralement semblé moins bonnes. J’avais commencé ces lectures suite à la découverte d’un Maigret dans la cave de mes parents. Puis, j’avais été motivé par la lecture d’un article dans le Temps où Nicolas Dufour racontait son été durant lequel « J’ai lu les 75 romans de Maigret (et j’ai déjà envie de les relire) »

Le nom de l'homme était Cavre, Justin Cavre, et non Cadavre, bien entendu, mais il y avait vingt ans qu'on lui avait donné le surnom d'inspecteur Cadavre et c'était toujours ce sobriquet qu'on employait à la Police Judiciaire quand on parlait de lui.
Il était ridicule, dans son coin, l'air constipé, à prendre des poses inconfortables pour ne pas regarder dans la direction de Maigret. Il savait que celui-ci l'avait bien vu. Décharné, blafard, les paupières rouges, il faisait penser à ces gamins qui, à la récréation, se morfondent à l'écart en cachant sous leur hargne leur envie de jouer avec les autres.
L’inspecteur Cadavre de Georges Simenon

Et je termine ces Maigret avec bonheur par cette dernière enquête qui est celle de l’injustice ! Et, par chance, c’est peut-être une des plus emblématique. Ici, les salauds, les malins et malfaisants restent impunis.

Et, tout en attendant le train au bout du quai, près de sa valise qu'il surveillait, Maigret parlait tout seul :
 - Vois-tu, mon petit, moi aussi je suis de ceux qui, comme toi, voudraient que tout soit beau et propre sur la terre... Moi aussi, je souffre et je m'indigne quand...

Fataliste, Maigret s’en accommode tant bien que mal.

Car c’est sûrement là que réside une des originalités de Maigret. Si le commissaire cherche toujours à comprendre (avec succès, d’ailleurs (et souvent un peu miraculeusement)), les coupables ne sont pas toujours condamnés et parfois, nulle morale, aucun Karma ni justice. Le commissaire hausse les épaules et s’en va. Oui, les assassins, comme dans la vraie vie, restent libres… Parfois.

Maigret 45/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le petit train du soir
Maigret regardait le monde avec de gros yeux maussades, donnant sans le vouloir à sa personne cette fausse dignité, cette importance qu'on affecte après les heures vides passées dans un compartiment de chemin de fer. Alors, bien avant que le train ralentisse pour entrer en gare, on voit des hommes gonflés dans d'énormes pardessus sortir de chaque alvéole, une serviette de cuir ou une valise à la main, et, avec l'air de ne pas se préoccuper les uns des autres, rester debout dans le couloir, une main négligemment accrochée à la tringle de cuivre qui barre la vitre.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Suicide? Meurtre? Un froid matin de janvier, un jeune homme est retrouvé mort sur la voie ferrée près de Saint-Aubin-les-Marais, en Vendée. Pour rendre service à un ami, le commissaire Maigret accepte de quitter Paris pour essayer d'y voir plus clair.
Mais il n'est pas le seul à mener l'enquête : un ancien policier devenu détective privé, l'inspecteur Cadavre, s'intéresse lui aussi de très près à cette affaire...

La maison du juge

Une histoire un peu alambiquée (et alcoolisée, comme d’hab) avec un mort qui sort de chez le juge. Un juge avec une fille un peu… spéciale.

Du vin blanc ! Jamais de la vie Maigret n'eut autant envie de vin blanc, tant celui-ci semblait savoureux. Quant aux pommes de terre... Car il y avait des pommes de terre, en effet...
Cela rappelait des souvenirs d'enfance, des gravures que l'on trouve dans les livres de Fenimore Cooper ou de Jules Verne. On était en France, au cœur même d'un village français. Et cependant, on était très loin. Les deux hommes pouvaient être des trappeurs, ou des naufragés sur une île déserte. Leurs vêtements de travail n'étaient d'aucune époque. La barbe drue et informe de Marcel ajoutait à l'illusion.
Or, de son bout de fer, ce qu'il retirait des cendres, c'étaient de grosses pommes de terre brûlantes et noircies dont il faisait craquer dans ses gros doigts la peau calcinée. La chair jaune et fumante apparaissait. Il y donnait un coup de dents.
La maison du juge de Georges Simenon

Un polar en Vendée et qui sent l’Atlantique, la pêche et les moules sur les bouchots à marée basse. Avec un Maigret qui picole pas mal et qui finit par se fâcher lors d’une longue chansonnette !

Maigret 41/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La femme du douanier
- Cinquante-six, cinquante-sept, cinquante- huit... comptait Maigret.
Et il ne voulait pas compter. C'était machinal. Il avait la tête vide, les paupières lourdes.
- Soixante et un, soixante-deux...
Il jetait un petit coup d'œil dehors. Les vitres du Café Français étaient dépolies jusqu'à mi-hauteur. Au-dessus du dépoli, on n'apercevait que les arbres dénudés de la place et la pluie, toujours la pluie.
- Quatre-vingt-trois, quatre-vingt-quatre...
Il était là, debout, sa queue de billard à la main, et il se voyait dans toutes les glaces qui entouraient le café.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tombé en disgrâce sans trop savoir pourquoi, Maigret a été nommé en Vendée où il s'ennuie. Un jour pourtant, un douanier qu'il connaît lui envoie sa femme pour signaler la présence d'un cadavre dans la maison de leur voisin, un ancien juge en retraite. Maigret arrive dans un village de pêcheurs méfiants, obéissant à ses propres règles et faisant front devant l'étranger. Ce que Maigret va découvrir à force de patience dépasse le simple fait divers. Le juge ne nie pas. Il y avait bien un mort chez lui dont il a voulu se débarrasser à la faveur de la marée. S'il n'avait jamais vu la victime et ne sait pas comment ni pourquoi l'inconnu est venu se faire tuer chez lui, le petit homme, remarquable de calme et de distinction, a bien d'autres choses à raconter...