Les innocents

Dernier des romans durs de Simenon, les innocents est paru en 1972. Et c’est un très bon Simenon ! Alors, certes, la fin s’annonce aussi évidement que le camion du début. Pas vraiment de suspense ici. Mais comme souvent dans ses livres, c’est par sa connaissance de l’âme humaine et son talent à la décrire que Simenon impressionne.

D'évoquer ainsi ses souvenirs du passé ne l'empêchait pas de rester attentif, malgré lui, à ce ce qui se passait autour de lui. Il aurait voulu que la vie soit finie, que la terre cesse de tourner parce que Annette était morte, mais il avait, en arrivant dans l'atelier de la rue de Sévigné, un coup d'œil vers la baie vitrée qui découvrait un ciel qui, depuis quelques jours, restait d'un même bleu pastel, avec le rose des poteries de cheminées qui tranchait sur le gris des toits.
Il saluait chacun d'un mot gentil et ils devaient être persuadés qu'il allait mieux.
Il réalisait maintenant, à son établi, le bijou qu'il dessinait quand le brigadier était venu lui annoncer son malheur. Et il le faisait avec amour, comme s'il le dédiait à Annette.
Pour lui, elle restait vivante et parfois, quand il était boulevard Beaumarchais, il était sur le point de lui adresser la parole.
Les innocents de Georges Simenon
Un homme perd sa femme brutalement, shootée par un camion. Son monde s’écroule.

Et ce n’est pas fini

Le 117e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Même la giboulée de mars qui tombait depuis une heure était savoureuse, car elle donnait à l'atelier une couleur plus intime. On retrouvait les toits de Paris que la pluie laquait d'un noir bleuâtre et le ciel était d'un gris qui gardait une certaine luminosité.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis seize ans, Georges Célerin est associé à son ami Brassier dans une entreprise de bijouterie : le premier dessine les bijoux et dirige l'atelier, le second s'occupe des commandes et de la vente. Célerin vit en parfaite harmonie avec sa femme Annette, leurs deux enfants et ses collaborateurs. Un accident stupide va changer la destinée de cet homme heureux : Annette, qui travaille comme assistante sociale dans le quartier de la Bastille, se fait écraser par un camion en traversant la rue Washington, dans un quartier où, apparemment, elle n'avait rien à faire.

Après ce coup terrible, Célerin n'est plus le même homme. Sur les traces de la morte, il cherche à savoir ce qui s'est passé.

La mort d’Auguste

Personne ne s’entend vraiment bien, ni mal non plus d’ailleurs. Ils ont été enfants ensemble, ils sont restés frères et… Maintenant que le père est mort ? Les petits sous, les biens, et sous le matelas, et le petit coffre, la banque, le restaurant… ? Ça fait combien tout ça ?

 - Celui qui me déçoit, c'est Ferdinand... Je ne m'attendais pas à ce qu'il se mette de son côté...
Antoine ne répondit pas. Son frère ne s'était pas mis carrément du côté de Nicole. Il était plutôt resté neutre. C'était à cause de sa femme. Si Véronique n'avait rien dit, c'est qu'elle savait l'attitude que prendrait son mari.
 - Bonne nuit, soupira-t-il.
 - Bonne nuit, Antoine...
Il restait un vide, dans le lit, entre eux deux. Aujourd'hui, il y avait des vides partout.
 - Tu crois qu'Antoine sait où ton père a placé son argent?
Ferdinand ne répondit pas tout de suite. Tassé sur le siège, à côté de sa femme qui les conduisait à la porte d'Orléans, il était maussade, mal à l'aise. Ce qui venait de se passer l'affectait et il prévoyait d'autres difficultés dans l'avenir.
 - Mon père n'a jamais parlé de ces choses-là... murmura-t-il enfin.
La mort d’Auguste de Georges Simenon
Surpris par le décès du père, mort sans laisser de testament, trois frères se retrouvent (accompagnés de leurs femmes à qui Simenon fait tenir des rôles caricaturaux et guère flatteurs)… à se partager le magot autour d’un corps encore tiède.

La mort d’Auguste, l’occasion d’une photographie de la cupidité familiale

Le 107e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
De la caisse où elle était assise, sereine et vaguement souriante, Fernande avait vu entrer le couple et elle avait compris tout de suite qu'ils venaient pour la première fois. Ils étaient très jeunes tous les deux, vêtus de neuf des pieds à la tête comme de nouveaux mariés qu'ils étaient sans doute, et, la porte franchie, ils s'étaient efforcés de cacher leur surprise et leur hésitation.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
A l'enseigne de « Chez l'Auvergnat », rue de la Grande-Truanderie, dans le quartier des Halles, on trouve un bistrot réputé. La modestie du décor contraste avec la clientèle aisée et mondaine qui s'y presse chaque soir. Le vieil Auguste, son propriétaire et fondateur, vient de mourir subitement. Réunis à l'occasion du deuil, ses trois fils cherchent en vain un testament, des papiers, l'argent que leur père avait accumulé, en comptant chaque sou, depuis l'âge de douze ans.

La fortune reste introuvable et les regards se font lourds, le climat pesant, les paroles dures. Auguste n'a laissé qu'une clé, celle d'un coffre bancaire du quartier. Il faut attendre, puisque la banque n'ouvre que lundi.

Tsunami

Tsunami raconte une touchante histoire, celle d’un jeune homme à la recherche de sa sœur disparue en Indonésie, quelque temps après le grand tsunami de 2004.

Tsunami de Stéphane Piatzszek et dessins de Jean-Denis Pendanx
Une quête dans un cadre idyllique qui flirte avec le fantastique et les fantômes des disparus.C’est tendre et beau, parfois drôle, d’autres fois triste. Une quête pleine d’émotions aux aquarelles magnifiques

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je ne sentais pas la puanteur des motos déglinguées qui envahissaient le centre-ville.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Comment retrouver sa grande soeur... quand elle a disparu il y a dix ans ?
quand elle a disparu en Indonésie, juste après le tsunami ?
quand elle a disparu alors qu'elle soignait des populations meurtries et affamées ?

Comment retrouver sa grande soeur...
quand on n'a jamais mis un pied hors de l'hexagone ?
quand on tombe par mégarde amoureux d'une adorable Papoue en cavale ?
quand ladite jeune femme connaît le vaudou et les morts qui marchent ?

Comment retrouver sa grande soeur
quand on découvre qu'elle vit loin, très loin, tout au bout d'une île... tout au bout du monde et peut-être plus loin encore ?

Le voyageur de la Toussaint

Voilà un des romans dur de Simenon des plus balzacien. Une petite ville, des petites gens, de l’argent, des jalousies, des amours tristes ou impossibles…

 - Tu ferais mieux de t'acheter de beaux vêtements, une belle auto, et d'aller t'amuser à Paris ou dans le Midi... Ici, ce n'est pas pour toi
Elle ne s'était jamais expliquée franchement.
 - Tu n'as rien à voir avec eux, tu comprends ?... disait-elle sans jamais préciser qui elle entendait par eux.
Ou encore :
 - Ce n'est pas un métier pour toi... Ils finiront par t'avoir...
Il n'y avait pas cru. Il se refusait encore à y croire. Et pourtant, il commençait à concevoir la possibilité d'une conjuration sournoise.
 - Vous avez tout ce qu'il vous faut ? venait parfois questionner le patron.
 - Mais oui...
 - Alors, tout va bien...
Et il retournait annoncer à la cuisine :
 - J'ai vu des repas d'enterrement plus gais que cette noce.
Le voyageur de la Toussaint de Georges Simenon
A la Rochelle un héritage vient rebattre les cartes des petits puissants de la ville. Le jeune héritier saura-t-il faire face ?

Un très bon Simenon à l’ambiance fausse et aux conseils appuyés

Un roman adapté au cinéma en 1943 par Louis Daquin

Le 44e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Gilles Mauvoisin regardait sans voir et il avait les yeux rouges, la peau gercée de quelqu'un qui a beaucoup pleuré. Pourtant, il n'avait pas pleuré.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Quand un héritage est en jeu, les bonnes âmes montrent soudain leur noirceur.

Un jeune homme et sa tante, d'abord opposés, s'allient contre ceux qui les prennent pour de naïves victimes. L'histoire se passe à La Rochelle, et c'est un puissant tableau de la vie de province, des haines familiales, des jalousies, des infamies que l'on voit trop souvent se perpétrer pour des questions d'argent dans la bourgeoisie aisée. Mais là, les faibles triomphent des forts.

Les vivants

Voilà un livre qui porte absolument bien son titre !

Chaque année au mois d'octobre, une vieille amie de Céline, ex-copine de fac devenue épouse oisive d'un banquier opulent, organise avec son mari une fête somptueuse pour montrer au monde que même si monsieur trompe madame à un rythme industriel et que madame représente à elle seule 10% du marché français de Prozac, ils peuvent une fois par an s'entendre sur un traiteur et faire bonne figure, le temps d'une soirée.
Les vivants de Ambre Chalumeau
Alors, certes, les grincheux pourraient trouver ça un peu convenu, feel-good, adulescent… Mais c’est frais, vivant (oui, vraiment le titre est très bon !), coloré et bien souvent très drôle (quel sens des métaphores !).Diane a toujours été une enfant sage.
Diane, quand elle joue à GTA, elle fait des créneaux. Elle va voir les gangsters et elle les aide à reprendre leurs études.En s’emparant de sujets difficiles comme la maladie et le coma d’un jeune ou le viol , Ambre réussi à écrire un livre plein de lumières, de couleurs et de contrastes… comme la vie

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Tout arrive d'un coup, la sueur glacée, le brouhaha autour, les jambes qui faiblissent. Ce pote qu'on devine du coin de l'œil en train d'alerter son voisin et qui, premier de la fête à avoir remarqué qu'on flanche, devient sans le savoir le premier au courant de notre drame.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Elle demande de répéter.
On demande toujours de répéter, alors qu’en fait on a très bien entendu.
Quelque part dans notre crâne, un globule blanc se lève et pète du coude la vitre à ne casser qu’en cas d’urgence, celle qu’on pensait ne jamais avoir à briser : on sait qu’on devrait déclencher un protocole spécial pour accueillir la nouvelle, sauf que personne n’a été briefé, les stagiaires sont incapables, en plus on est samedi soir les bureaux sont déserts, y’a bien les anciens qui sauraient quoi faire, les vieux neurones du fond là, paniqués en permanence, ils nous ont dit qu’un jour ça pouvait arriver mais on les écoute plus ils radotent tellement, et maintenant qu’on a besoin d’eux putain ils sont où ?
Et aussi simplement que ça, une nuit comme les autres devient un Début. »

Histoire du passage à l’âge adulte, histoire d’émotions contraires, Les Vivants est un premier roman à la sincérité désarmante où le drame et la comédie nous illuminent à chaque page.

Mère à l’horizon

Quel passeur d’émotions ! Elle sont toutes là et Jacques Gamblin nous les fait toucher, sentir et en goûter les saveurs.

Après ça je ne dis plus rien et personne ne dit plus rien. Je m'accroche à ma ceinture pour survivre jusqu'à Burcy.
On roule parfois trop vite parfois trop lentement. Je fais les comptes, les minimes courent à 14 heures, il faut que j'y sois à 13 pour m'échauffer. Il y a soixante kilomètres, pas très doué en calcul mental, je conclus qu'avec une moyenne de soixante, on devrait mettre une heure. Je toussote pour regarder discrètement ma montre. 11 h 20. Mimile me dit tu es malade, je réponds non ça va. 
À la place du mort on a une meilleure conscience du danger mais on est moins malade. On ne peut pas tout avoir
Mère à l’horizon de Jacques Gamblin
Plus qu’une autobiographie qui part dans tous les sens, il s’agit plutôt d’un carton de photos qui serait tombé et dont l’auteur nous en rappellerait les souvenirs. L’enfance, la quincaillerie, les débuts à la technique, puis sur les planches et…Tu stockes une demi-douzaine de paquets de thé. À l'épicerie tu ne te souviens plus que tu en as déjà. 
Tu gardes tes croissants pour demain, puis demain tu les gardes pour demain... Ils sont rassis, ils n'ont plus de goût. Tu ne le sais pas puisque tu les gardes pour demain. 
Les fraises et les framboises subissent le même sort. 
Pour demain. 
Tu descends à la boîte aux lettres, prends ton journal, remontes chez toi, t'assois à la table de la cuisine, tournes les pages, attrapes quelques images, quelques titres, feuille à feuille, oubliés. 
Les jours ont-ils encore un sens ? 
C'est dimanche prochain carnaval. Comment tu vas te déguiser ? 
En courant d'air. Et surtout, la famille, la mère et sa mémoire qui s’en va.

Et c’est très touchant, un peu déconstruit, pas très bien fagoté… mais c’est tendre et chou

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Demain on change d'heure.
- Ah oui comment je vais m'y retrouver ?
- Je vais régler ta montre à l'heure de demain. Comme ça quand tu te réveilleras, tu seras à la bonne heure.
- Oui mais... demain il sera quelle heure ?
- Je ne sais pas. Quand tu vas te réveiller. Voilà j'ai réglé ta montre, la pendule, ton réveil... Ils seront à l'heure de demain.
- Oui mais l'heure elle va tourner cette nuit !
- Eh oui et comme ça demain elle sera à la bonne heure de demain.
- Oui mais si tu la mets maintenant à l'heure de demain et qu'elle continue de tourner cette nuit, elle ne sera pas à l'heure demain.
- Maman...


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un hommage bouleversant de Jacques Gamblin à sa mère, où le rire n'est pourtant jamais loin, prêt à déferler sur la grève.

Je n'ai plus que la mémoire de l'instant, dit-elle.
Elle reste assise de longues heures, les rideaux à peine ouverts.
Elle veut bien voir le dehors mais que le dehors ne la voie pas.
Elle se met du rouge à lèvres quand elle reçoit une visite.
Son premier baiser, elle l'a donné entre les casseroles et les pinces multiprises.
Elle rêvait de jouer le jazz.
Un jour, elle est montée à la grande échelle.
Comment tu vas te déguiser au prochain carnaval ? Elle répond :
En courant d'air.
Elle a commencé à perdre l'audition il y a quelques années. La mémoire a suivi et couru à sa perte. Sans bruit. Sans choc. Avec la vie qui change de volume.
Pour combler les phrases qu'elle ne prononce plus, j'écris. J'attrape son silence au vol, le fais rebondir, pour l'aimer encore, autrement, pour l'aimer mieux.

Un hommage bouleversant à la mère, où le rire n'est pourtant jamais loin, prêt à déferler sur la grève.

Le Cheval blanc

On s’arrange, on fait comme on peut, avec ses casseroles, ses désirs, ses frustrations. Parfois, ça casse, d’autres fois ça tient encore… jusqu’à quand.

L'oncle s'éveillait, voyait au soleil qu'il n'était pas l'heure et restait sur son grabat, les yeux ouverts, à renifler son odeur de vieil homme.
Le Cheval blanc de Georges Simenon
Simenon excelle à peindre ces vies qui passent à côté de leurs rêves. Couples ratés, misères pourries, petits arrangements… Tant qu’on n’y regarde pas de trop près.Elle aurait pu parler de ça à la patronne du Cheval Blanc. Elles se seraient comprises. Mais, même si elles en avaient eu l'occasion, elles ne l'auraient probablement pas fait.
On n'en parle pas...
On s'arrange...
On fait tout ce qu'on peut...
Ainsi, soudain livré à lui-même, Arbelet redevenait rêveur.Un roman guère palpitant, limite fatiguant. Des tristes portraits lamentables

Le 25e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Tu devrais le poser par terre, Maurice...
Pourquoi cette phrase-là plutôt qu'une autre ? Et pourquoi cette minute-là plutôt que n'importe laquelle des minutes de ce dimanche de Pentecôte ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Au bord de la nationale, à l'auberge du Cheval Blanc, la cuisine est renommée et la vie paraît agréable, simple et ensoleillée. Mais le patron exerce ses prérogatives sur les petites bonnes de seize ans, et le veilleur de nuit est un criminel relâché depuis peu, gonflé de graisse molle, lui-même persuadé qu'un jour il tuera de nouveau. Sans doute l'un de ces représentants de commerce arrogants qui le réveillent à toute heure. Peut-être le patron, la cuisinière, un joueur de cartes, une cliente, au hasard, sur un coup de sang… Le drame couve. Le veilleur sait tout des affaires sordides des uns et des saloperies des autres. Un jour, se dit-il en frottant dans le garage aux heures blêmes les carrosseries noires des voitures, un jour… « I faudra bien que j'en tue un… »

Les sources

Quelle violence dans ce petit livre ! Alors que ces sources ne semblent que survoler la campagnes, tout le talent de Marie-Hélène Lafon nous embarque pudiquement dans un cauchemar rural, bien loin des yeux.

C'est un dimanche ordinaire dans la vie ordinaire et pas foutue des gens normaux qui n'ont pas peur tout le temps. Ces mots lui montent à la gorge, exactement dans cet ordre. Elle pense aussi aux deux fils de la Marissou. Elle s'appuie contre le buffet, elle se sent soulevée, elle a le vertige mais quand sa mère entre dans la salle à manger, elle commence à parler; elle parle ; ça ne dure pas longtemps parce qu'elle raconte le pire tout de suite, sans pleurer, elle montre aussi les bleus, les traces, sous la jupe; elle dit que là-haut elle ne peut rien empêcher, les enfants ont peur et elle a peur pour eux, main-tenant ils grandissent et comprennent tout, ils voient tout. Sa mère a refermé la porte et reste debout ; elles sont seules dans la salle à manger. Elle dit que c'est fini, qu'elle ne remontera pas, plus jamais.
Les sources de Marie-Hélène Lafon
Une histoire désespérante comme tant d’autre, d’une tristesse désolante. Une femme qui subit la violence dans une ferme isolée. Et trois enfants !

Un livre dans l’attente de la goutte qui fera déborder la source

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il dort sur le banc. Elle ne bouge pas, son corps est vissé sur la chaise, les filles et Gilles sont dans la cour. Ils sont sortis aussitôt après avoir mangé, ils savent qu'il ne faut pas faire de bruit quand il dort sur le banc. Claire a refermé derrière elle les deux portes, celle de la cuisine et celle du couloir. La table n'est pas débarrassée, elle s'en occupera plus tard, quand il aura fini la sieste.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
La cour est vide. La maison est fermée. Claire sait où est la clef, sous une ardoise, derrière l'érable, mais elle n'entre pas dans la maison. Elle n'y entrera plus. Elle serait venue même sous la pluie, même si l'après-midi avait été battue de vent froid et mouillé comme c'est parfois le cas aux approches de la Toussaint, mais elle a de la chance ; elle pense exactement ça, qu'elle a de la chance avec la lumière d'octobre, la cour de la maison, l'érable, la balançoire, et le feulement de la Santoire qui monte jusqu'à elle dans l'air chaud et bleu. Années 1960. Isabelle, Claire et Gilles vivent dans la vallée de la Santoire, avec la mère et le père. La ferme est isolée de tous.

Willibald

Il y a des livres où, même à la dernière page tournée, on se demande encore si l’histoire est vraie. Un peu, beaucoup… ? Qu’importe.

Les doigts de Willibald travaillent patiemment. Un petit tas de clous se forme à côté de son genou droit. Il se lève, fait le tour de la toile, assouplit les plis du tissu criblé de trous. Désolidariser le Sacrifice du cadre en bois.
Plier une peinture est un sacrilège. Plier une toile signifie en abîmer les multiples couches qui la recouvrent: enduits, peinture, vernis. C'est une blessure profonde qui demande chirurgie, une cicatrice indélébile. Willibald ne l'ignore pas et pourtant il n'hésite pas. Combien de plis pour placer Le Sacrifice dans sa valise ? Quelle nécessité le pousse à un tel geste, alors que sa vie est en danger ?
Willibald de Gabriella Zalapì
L’histoire d’un aïeul juif, collectionneur d’art à Vienne fuyant l’Anschluss avec le tableau d’un élève de Rembrandt, « Le sacrifice d’Abraham ».
Une histoire de famille comme elles le sont toutes, avec des joies et des souffrances, des richesses, des douleurs et des non-dits qui laissent un voile de mystère auréoler les fables pour les enfants.

Un roman fascinant entre Vienne, le Brésil et Genève autour de deux personnages : Willibald et son tableau

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La salle est surchauffée. Une voix d'homme annonce « Lot numéro 467 ». C'est leur lot. Silence. Elle ne voit pas les mains discrètes qui font grimper les prix. Les visages restent impassibles. Quand le marteau du commissaire-priseur frappe, cela produit un bruit sec, clac. C'est dans l'autorité de ce « clac-adjugé » que Mara réalise l'aspect définitif de la situation.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis l’adolescence Mara est habitée par un tableau suspendu dans le salon de son H.L.M. Willibald, qui a acheté cette toile dans les années 1920, la hante toute autant. Lorsqu’il fuit Vienne en 1938, il n’emporte que ce Sacrifice d’Abraham, soigneusement plié dans sa valise. Entrepreneur et collectionneur juif, il refait sa vie au Brésil, loin des siens. Lors d’un séjour en Toscane chez sa mère Antonia, Mara déchiffre les lettres de Willibald qu’elle retrouve dans un hangar. Elle observe les photos, assaille de questions Antonia, « qui sait mais ne sait pas ».

Propre

Dès le début, c’est clair : tout cela va mal finir. Aucun suspense… Et pourtant, voilà un livre bien difficile à lâcher !

Que vous a dit Madame ? Elle vous a parlé de moi ? Je suis sûre qu'elle a déclaré sous serment que sa domestique était de bonne composition, obéissante, humble, reconnaissante, silencieuse, qu'elle avait toute l'apparence de quelqu'un de bien. Et quand vous l'avez interrogée sur elle, elle a dit : « Mara López, avocate », comme si ces trois mots constituaient une véritable définition. Je vais vous en donner une autre, moi, écrivez ceci :
Elle prenait un demi-pamplemousse et un œuf à la coque sans sel au petit déjeuner.
Elle buvait un café au réveil et à huit heures elle était déjà partie.
Elle revenait à dix-huit heures et avalait une galette de riz.
Au dîner elle mangeait de la roquette et des graines, des endives et des graines, des épinards et des graines, du chou et des graines.
Ensuite, en cachette, elle s'envoyait du pain avec du fromage et un verre de vin blanc avec des médicaments.
Propre de Alia Trabucco Zerán
Plongée dans l’intimité d’une famille chilienne aisée sous les yeux de leur domestique qui vit dans une petite pièce, au fond de la cuisine et qui devient gentiment folle. Enfin… folle n’est pas vraiment le bon terme. Déprimée mais lucide ?

Et elle raconte ce qui n’a pu être évité. Le drame. Sous ses yeux.

Une géniale radiographie d’une famille bien sous tous rapport

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je m'appelle Estela, vous m'entendez ? Es-te-la Gar-ci-a.

Je ne sais pas si vous enregistrez, prenez des notes, s'il y a quelqu'un de l'autre côté en réalité, mais si vous m'entendez, si vous êtes là, je vous propose un marché je vais vous raconter une histoire et à la fin, quand je n'aurai plus rien à dire, vous me laisserez sortir d'ici.

Allô ? Personne ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je m'appelle Estela, vous m'entendez ? Es-te-la Gar-ci-a. »

La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence son récit. Estela, qui a quitté sa famille dans le sud du Chili pour la capitale où elle travaille comme employée de maison. Estela, qui s'est occupée pendant sept ans de la jeune victime, l'a bercée, nourrie, rassurée, grondée aussi. Qui connaît chaque étape ayant mené au drame : la chienne, les rats, les aveux, le poison, le pistolet. Chaque étape jusqu'à l'inéluctable.

Un roman psychologique haletant, angoissant et addictif, à travers lequel notre époque se dessine - une société fracturée par les rapports de domination et d'argent, où les uns vivent dans l'ombre des autres...