Les clients d’Avrenos

Triangles amoureux à Stabmoul. Enfin… plus que de triangles on peut plutôt parler d’une vraie boule à facettes. qui tourne autour de Nouchi, une ex-danseuse de cabaret qui fait tourner les têtes et de Bernard de Jonsac qui travaille à l’ambassade française.

Dès minuit, Jonsac avait les tempes douloureuses et surtout la sensation, une fois de plus, de graviter dans un univers inconsistant. À dix reprises déjà, il était passé de la terrasse du bord de l'eau à la terrasse du premier étage, en jetant un coup d'œil furtif dans toutes les chambres. Maintenant, il recommençait...
Stolberg l'avait dit : c'était bien une nuit du Bosphore, avec sa mollesse, ses magnificences et ses pauvretés, ses parfums et ses moisissures. Comme dans les paysages de Stamboul, il y avait une bonne part de poésie trop voulue, mais aussi quelques moments vraiment rares qui ne devaient rien à la volonté des hommes.
Les clients d’Avrenos de Georges Simenon
Nouchi qui a peur de la pauvreté et ne veut appartenir à personne et Jonsac prêt à tout pour ne pas la perdre. Couple, amis ou alliés dans cette ville lascive et envoûtante ?

Un très bon roman dur qui se déroule comme un pas de danse, fait d’allers et de retours et de quelques pieds écrasés pour tenter de ne pas se perdre

Le 12e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
On n'attendait pas encore de clients, bien qu'un étudiant qui venait pour Sadjidé fût déjà accoudé au bar. Mais ce n'était pas la peine de le servir, car il ne commandait que des bocks et ne les buvait pas.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Quels sont les secrets qui unissent Nouchi, l'entraîneuse de dix-huit ans originaire de Vienne, et Bernard de Jonsac, ce Français d'une quarantaine d'années que tout le monde croit diplomate ? Quels mystères se cachent derrière leur errance aux parfums d'insouciance ? Partis d'Ankara, ils arrivent à Istanbul. Les nuits moites du Bosphore cachent des personnages qui se guettent, se haïssent, sympathisent parfois... Rien ne change dans ce décor où la torpeur gouverne. Et pourtant... Une femme est retrouvée comme morte, Nouchi fascine, et Bernard de Jonsac ferme les yeux sur ce qu'il ne veut pas comprendre.

Le goût du baiser

Sans être forcément dans le public cible, voici une romance érotique et féministe bien sympathique !
Certes, les clichés s’y déroulent comme les blés devant la moissonneuse, mais le tout reste plutôt bien tourné.

Quand il s'arrête devant chez moi et que je descends de sa Vespa, je me sens légèrement tremblante pendant quelques secondes. C'est très étrange, c'est presque la même sensation que lorsque... je viens de me caresser ! Je fais attention à ne pas avoir le même sourire béat, déjà que, après avoir enlevé le casque, je dois avoir une coupe de cheveux de folle. Il descend et enlève son casque. Ses cheveux à lui n'ont pas bougé : merci la gomina.
Je le remercie de m'avoir ramenée. Nous restons l'un face à l'autre, sans dire un mot. Il est vraiment grand, je dois lever mon visage pour le regarder dans les yeux. Ce regard si noir, fascinant, troublant...
 - Bon, on se voit au prochain cours. Enfin si je n'ai plus mal au pied, et si je ne suis pas démoralisée.
 - Tu sais, même après des années de pratique, y a des fois où on n'y arrive pas.
Le goût du baiser de Camille Emmanuelle
Véritable guide pratique pour jeunes filles (et pour les mecs aussi, il y a encore bien du boulot !), ce goût du baiser démontre que les emmerdes, les conneries que l’on peut faire et tous les connards malveillants peuvent être surpassés. Enfin, tous… n’exagérons pas !
Un vrai bol d’air frais bouillant qui sent bon (enfin… façon de parler) la vie.

Et pis c’est trop chou, et ça fait du bien

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
L'odeur du pain grillé. Je ne sens pas l'odeur du pain grillé. J'ai pourtant bien entendu le bruit du pain qui saute du grille-pain, dans la cuisine. C'est samedi matin. Je suis dans ma chambre, dans mon lit, encore allongée. Je suis réveillée depuis plusieurs minutes. Le matin, le week-end, ma mère fait griller du pain. Tous les samedis et tous les dimanches, depuis que je suis petite, je me réveille avec cette odeur familièrement délicieuse.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Cette année de première s'annonce particulière pour Aurore : à la suite d'un accident de vélo, elle vient de perdre le goût et l'odorat.

Au lycée, elle fait tout pour cacher ce handicap, invisible aux yeux des autres. Mais en réalité, ce trouble s'avère plus envahissant que prévu, surtout quand Antoine, un garçon sur lequel elle fantasme depuis des mois, semble enfin s'intéresser à elle.

Privée de deux sens sur cinq, Aurore a soudain le sentiment que son propre corps lui est étranger. Comment poursuivre une vie sexuelle à peine amorcée quand on ne sent rien, pas même sa propre odeur ?

Une histoire d'amitié, de plaisir, de désir, de colère transformée en force et de réappropriation du corps. Celle d'une jeune femme portée par une joie de vivre farouche et communicative.

Les suicidés

Juliette est aussi indolente qu’Émile est nerveux. Elle fugue avec lui à Paris. Pourquoi ? L’aime-t-elle ? … peut-être ne le sait-elle même pas vraiment.

Le patron le reconnut, questionna :
 - Un rhum ? 
 - Deux. Et de quoi écrire. 
Il n'y avait qu'une table, dans un coin. Il y installa sa compagne, devant une feuille de papier, et dicta : 
« Mes chers parents, Ne me faites pas rechercher. Je suis heureuse. Si on essayait de me ramener à la maison, je me tuerais... »
Elle écrivit, sans le regarder. Il frémissait. Chaque mot tracé sur le papier était une nouvelle victoire. Il eut une inquiétude, la dictée finie, quand il vit la plume s'abaisser à nouveau sur la feuille. « Pardon, papa », ajouta-t-elle.
Les suicidés de Georges Simenon
Un roman dur plutôt psychologique sur l’échappée à Paris de deux jeunes maladroits.« C'est sa faute ! » se disait Bachelin en se faufilant entre les ménagères qui entouraient les petites charrettes où s'entassaient, dans un soleil fluide, des légumes acides et des fruits fragiles comme le précoce printemps. 
Le regard rempli des images bariolées de la rue, il corrigeait aussitôt : 
« En tout cas, ce n'est pas la mienne ! »Le 11e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Juliette traversa la rue à pas précipités, comme elle le faisait chaque soir en quittant Bachelin, et déjà, avec des gestes que la peur rendait maladroits, elle fouillait son sac à main, atteignait le seuil, faisait cliqueter la clef contre la serrure.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Juliette parle peu. Elle a le regard fixe et se laisse emmener. Elle n'a jamais dit "Non !". Ni à sa mère trop effacée ni à son père qui la couve d'un amour sans génie. Dès lors, pourquoi ne pas suivre le jeune Émile Bachelin ? Pourquoi ne pas prendre le train ?

Les gens d’en face

Un bon gros pamphlet contre l’appareil soviétique bien caricatural ! Les gens d’en face se passe en Géorgie, à l’époque une république d’URSS et on y suit Adil bey, consul turc candide fraîchement arrivé.

Est-ce parce qu'il était Turc, eux Russes ou Italiens? Jusqu'au Persan qui s'était toujours méfié ! Est-ce simplement parce qu'il était Adil bey? En tout cas, chaque fois qu'il avait essayé de vivre, ce qu'il avait toujours appelé vivre, il s'était heurté à des murs. Si bien que, sans même le vouloir, il était devenu inerte, autant, peut-être plus que ceux qui l'entouraient. C'était facile ! On y arrivait de soi-même ! On emportait sa solitude partout, même quand on allait chez les gens, chez Pendelli comme dans les bureaux du département étranger. C'était un nuage protecteur dans lequel on marchait, le visage fermé. Comment n'avait-il pas compris dès le premier jour qu'ici chacun était cadenassé de la sorte ? John se renfermait à coups d'alcool. Les Pendelli étaient retranchés à double tour dans leur confort bourgeois qu'ils étaient capables de transporter jusque dans le désert. Et Sonia ! Et Koline ! Est-ce que Koline, quand il rentrait chez lui, avait une intimité quelconque avec sa femme ?

Les gens d’en face de Georges Simenon

Et tout y passe et Simenon ne recule devant aucun stéréotype : espionite aiguë, empoisonnement, dénonciations arbitraires, exécutions sommaires, pénurie alimentaire, bureaucratie inefficace, faim, alcoolisme des corps consulaires, prostitution… Tout y passe !

Un amusant cliché suivi d’une romance un peu bâclée

Le 6e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
« Comment ! vous avez du pain blanc ! »
Les deux Persans entraient dans le salon, le consul et sa femme, et c'était celle-ci qui s'extasiait devant la table couverte de sandwiches joliment arrangés.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les impressions défavorables ressenties par Adil bey à son arrivée dans la petite ville populeuse et maussade où l'appellent ses fonctions de consul se précisent de jour en jour : l'inconfort délibéré de son installation, les contacts décevants avec l'administration soviétique, la méfiance agressive des gens qui l'entourent. Elles atteignent le malaise lorsqu'il constate qu'un couple, les Koline, l'épie des fenêtres d'en face. Or Sonia, sa secrétaire, habite chez eux.

Le relais d’Alsace

Premier roman dur de Simenon, ce relais d’Alsace ne m’aura pas laissé un souvenir inouï. Une histoire un peu tarabiscotée avec un voleur talentueux qui n’est pas celui qu’on pense, mais quand même, mais peut-être, mais oui, mais non…

Elle était moite, plus pâle.
« Je pourrais peut-être vous aider... Je... je vous soignerais... Je ne veux pas devenir sa femme... je... »
Elle pleurait à nouveau. Des sanglots nerveux. 
N'allait-elle pas encore se jeter dans ses bras ? 
Ce fut lui qui la prit par les épaules, la coucha sur le lit et dit doucement : « Calme-toi, Gredel... Chut !... »
Il avait le front soucieux. Il fit les cent pas dans la chambre en lui caressant la tête chaque fois qu'il passait près d'elle. Et à la fin elle s'endormit tandis que, à bout de forces, il se laissait tomber dans l'unique fauteuil et regardait vaguement la forme étendue sur son lit, la joue qui devenait rose, puis rouge, duvetée comme une joue de jeune paysanne.
Le relais d’Alsace de Georges Simenon

Une intrigue distrayante aux pâles personnages et un peu datée qui inaugura l’impressionnante série des romans durs de Simenon avec un commissaire Labbé avec un certain potentiel mais qui sera vite remisé aux oubliettes au profit du célèbre Jules Maigret.

Amusant toutefois de constater l’impunité du gentil méchant dans ce premier polar…

Le 1er roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Gredel et Lena, les deux servantes si pareilles avec leurs cheveux ébouriffés et leur visage de poupée, dressaient les couverts sur six tables, les plus proches du comptoir, posaient sur la nappe à petits carreaux les verres de couleur, à long pied, destinés au vin d'Alsace.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
M. Serge demeure au Relais d'Alsace, au col de la Schlucht, depuis plusieurs mois et semble avoir quelques difficultés à régler ses notes de séjour. Une forte somme d'argent est dérobée dans la chambre qu'occupent au Grand-Hôtel (en face du Relais) deux riches Hollandais, M. et Mme Van de Laer. M. Serge est suspecté car il se retrouve, le lendemain du vol, en possession d'une forte somme d'argent. Arrivé de Paris pour enquêter, le commissaire Labbé subodore qu'un escroc surnommé " le Commodore " et qu'il a pisté autrefois, est mêlé à cette affaire.

Le blanc à lunettes

Voilà un roman dur bien atypique que ce blanc à lunettes. Déjà il n’y fait pas froid… il se déroule au Congo belge et la température (élément essentiel chez Simenon) y est étouffante. En Afrique coloniale, donc. Et c’est vraiment là que ce récit est le plus dérangeant : plongée dans les colonies ! Et ça pue bien comme il faut, ne serait-ce qu’au niveau du langage.

Pour autant, difficile de voir ici une apologie du colonialisme (pas plus que qu’une dénonciation d’ailleurs), Simenon se contentant d’y décrire les relations humaines coloniales. Témoignage dérangeant… Mais y était-il allé alors ?

Voilà ! En sortant de la chambre de lady Makinson (la montre de Graux marquait deux heures dix du matin !) il avait tourné machinalement le commutateur électrique.Et Ferdinand, en se dressant comme il l'avait fait, avait dévoilé la négresse roulée en boule au creux des draps. - am sorry... Il éteignit, rentra chez lui tandis que Camille, non réveillé, poussait un grognement, se soulevait pour un nouveau retournement.- am sorry... Baligi était éveillée, évidemment. Elle ne bougeait pas, n'osait plus respirer. Elle savait que cela n'aurait pas dû arriver, que cela ne devait jamais arriver. Quant à Graux, il pensait et c'étaient des pensées hargneuses qu'il n'aimait pas. Un quart d'heure durant il toléra la négresse près de lui, puis il murmura comme elle s'y attendait.- Va chez toi...Car elle avait sa natte par terre, dans la cuisine, près du fourneau à gaz de pétrole.
Le blanc à lunettes de Georges Simenon
Curieux roman dur également car c’est plutôt d’une bien malheureuse romance dont il s’agit ici. Une passion qui emporte un homme.

Mais là encore, il est intéressant de voir la position des femmes. Et franchement, zéro pointé ! Là aussi.

Un excellent roman donc, pour qui souhaite plonger dans la fin des années 30 et d’y comprendre le privilège des classes et de l’homme blanc.

Beuark !

Le 20e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Tu entends, Georges ?
Le mari sursautait, son verre de bière à la main.
- Quoi ?
- Ferdinand dit que le seul moyen de se désaltérer, c'est de boire du thé brûlant...
- Je sais !
- Alors, pourquoi bois-tu de la bière ?
- Parce que je n'aime pas le thé !
- C'est ta quatrième bouteille aujourd'hui...
- Est-ce que je te demande combien de cigarettes tu as fumées?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ferdinand Graux, un jeune colon du Congo belge, est surnommé Mundele na Talatala, le Blanc à lunettes. Sur le point de se marier, il trouve un jour sa chambre occupée par lady Makinson. Et voilà sa vie transformée, bouleversée...

Les fiançailles de M. Hire

M. Hire, homme discret, un peu atypique, renfermé… Suspect idéal ! Pourtant, il semble savoir. Et la bonne, juste en face ?

Le kummel lui brûlait l'estomac. Ses genoux tremblaient comme chaque premier lundi du mois quand il avait joué aux quilles.
C'était comme un refroidissement lent. Petit à petit, M. Hire se mettait à la tempé- rature de l'auto. Sa nervosité, sa fièvre, son entrain s'évaporaient et il s'enfonça jusqu'au nez dans le col de son manteau. Sans bou- ger de son siège, sans ralentir, le chauffeur ouvrit la portière d'une main et cria en se penchant à peine :
Je prends par la porte d'Italie ?
Par où vous voudrez.
La portière claqua. La vitre descendit de deux centimètres et il y eut désormais un courant d'air glacial.
Monsieur le procureur de la République...
On longea le terrain vague où la femme avait été tuée. Le chauffeur devait le savoir, car il ralentit pour regarder la palissade. Au coin de la rue, il y avait une fille, comme tou- jours, qui suivit le taxi avec des yeux indiffé- rents.
Les fiançailles de M. Hire de Georges Simenon
Mais il faut un coupable !

Il n’en faut pas beaucoup plus à foule.

Un roman dur qui prend son temps et qui monte imperceptiblement vers l’inéluctable drame

Le 5e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La concierge toussota avant de frapper, articula en regardant le catalogue de La Belle Jardinière qu'elle tenait à la main :
- C'est une lettre pour vous, monsieur Hire.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
A Villejuif, on vient d'assassiner une femme dans un terrain vague. Un seul indice : le sac de la victime a disparu ; la police croit cependant au crime d'un sadique. La concierge de Mr. Hire, rendue méfiante par le comportement singulier de son locataire, signale qu'elle a entrevu chez lui une serviette tachée de sang. Mr. Hire est aussitôt pris en filature. Cet homme au physique disgracieux, au caractère insaisissable, vit d'expédients.

Le fils du yéti

Si ce fils du Yeti est bien moins pathétique que Jean-Claude Tergal, il en devient bien plus touchant, tout en conservant le même humour auto-dépité.

Tout en me mordant la lèvre inférieure, je fus visité par l'idée que les mères, en tout cas celles de cette époque, ne voulaient pas vraiment notre bonheur. Mais avant tout nous « caser ». Avec n'importe qui, la première venue, ouf, ça, c'est fait, et par pitié offrez-nous l'image d'un couple épanoui, peu importe la vérité, vite, glissez la poussière sous le tapis, si nécessaire. Le bonheur, c'est un plus, un hasard. Pour elle, comme le veut la formule, le bonheur n'est que « du malheur qui se repose ». Ce qu'elle cherchait pour moi était un bien plus précieux aux yeux de quelqu'un qui a connu la tourmente la sécurité.
Le fils du yéti de Didier Tronchet

Une histoire qui pêche peut-être par un trop grand nombre d’entrées (la voisine, le père, la grand mère, Laurence et Anthony…), pour autant, c’est un portrait avec beaucoup de tendresse maladroite que Didier Tronchet nous dresse ici.

Un livre doux comme le parfum des mandarines avant Noël

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Samedi 25
Vers quatre ou cinq heures du matin, un vacarme effroyable. J'enfile un pantalon à la hâte et file vers la porte. La verrière de la cage d'escalier tombe par pans entiers qui se brisent au contact du sol. Des flammes viennent lécher le plafond, juste au-dessus de moi, au dernier étage. Elles pro- viennent de chez mes voisins du dessus. Je me souviens à cet instant qu'ils sont absents.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« C'est ainsi qu'a commencé cette semaine extravagante. Extravagante à l'échelle d'une vie où il ne s'était finalement rien passé de fracassant. Un peu comme si quelqu'un là-haut s'était souvenu de mon existence, et décidait de me faire payer les arriérés... De me livrer mon lot d'événements, d'un bloc. Et sur huit jours. »
Un incendie nocturne, la mort d'un ami (mais lequel?), l'étrange photo de son père et cet album de Tintin dans lequel il croit se reconnaître... Voilà une semaine agitée pour notre héros, qui tient de sa mère une indécision maladive, et de son père une tendance déraisonnable à la nostalgie...
Avec l'humour et la distance qu'on lui connaît, Didier Tronchet nous livre une réflexion émouvante sur la filiation et la paternité.

Le locataire

Il ne se passe pas grand chose ici. Un meurtre. Un assassin désemparé. Incapable de réagir. Sous le choc, il se terre dans une petite pension en Belgique.

un filet de sang, se faufilant entre les cheveux, atteignait son front !
Il essaya de bouger, pour voir ce qui se passait. Elie frappa à nouveau, deux fois, trois fois, dix fois, avec colère, à cause de ces stupides yeux calmes qui le regardaient.
S'il s'arrêta, ce fut à bout de souffle, parce qu'il n'en pouvait plus. La clef anglaise échappait à ses mains moites. Il s'assit, tourné vers la glace, et reprit sa respiration. En même temps il tendait l'oreille, il tendait tous ses nerfs. Y avait-il encore une autre respiration que la sienne dans le compartiment ? II espérait que non. Il n'avait pas envie de recommencer. Son poignet lui faisait mal.
Sans regarder le corps, il baissa le rideau, puis la vitre. Il remarqua que, s'il n'y avait pas de neige à Saint-Quentin, les champs, ici, étaient blancs, à perte de vue, et le ciel aussi clair qu'un ciel de glace.
Son pardessus gênait ses mouvements. Il le retira.
Le locataire de Georges Simenon

Peu d’intérêt donc pour ce petit locataire, si ce n’est, une fois encore à la lecture des Simenon d’avant guerre, la sensation que la valeur de la vie à bien évolué depuis. Le meurtre semble moins terrible ou tabou, et la peine de mort en était la sanction. Simple.

Et que dire de l’accroche du livre ? 100 000 femmes ! Et hop, l’éditeur ajoute un zero à la légende comme un argument de vente ? Curieux

Le 10e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
— Ferme la fenêtre! geignit Elie en remontant la couverture jusqu'à son menton. Deviens-tu folle ?
— Cela sent le malade, ici! répliqua Sylvie dont le corps nu se dressait entre le lit et la fenêtre grise. Ce que tu as pu transpirer, cette nuit !
Il renifla, rapetissa son corps maigre tandis que la femme pénétrait dans la lumière chaude de la salle de bains et faisait bouillonner l'eau de la baignoire. Pendant quelques minutes, il était inutile de parler, car le vacarme des robinets dominait tous les bruits.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Élie Nagéar doit se cacher après avoir assassiné, pour le voler, un très riche Hollandais dans un train. Il se réfugie dans la pension pour étudiants que tient Mme Baron, la mère de sa maîtresse, à Charleroi. C'est dans la cuisine qu'il passe le plus clair de son temps, à guetter les autres locataires, de plus en plus soupçonneux...

La maison du canal

Roman noir météorologique s’il en est, cette maison du canal est froide, humide et moisie, prise dans le gel gris, noir et pluvieux de l’hiver dans les Flandres. Juste à côté d’un canal où passent les péniches.

Il ne devait plus geler de l'hiver. Le lendemain déjà, tout le blanc était en débâcle, la campagne n'était que boue froide et de grosses gouttes d'eau tombaient une à une des arbres.
La famille partit au complet, depuis la tante jusqu'à la dernière des petites, et on ferma la porte de la maison. Dans la voiture, on dut se serrer. On traversa le canal, puis le village, en passant devant le terrain de patinage où stagnaient encore des glaçons gris.
Quand on arriva chez l'oncle Louis, à Maeseyck, la grande maison bien entretenue était pleine de monde et l'air sentait le cigare et le genièvre. On parlait flamand. On s'embrassait. Edmée, comme les autres, fit le tour de l'assistance, oncles, tantes et voisins.
La maison du canal de Georges Simenon

Et là, dans une famille en deuil, entre les deux frères, arrive Edmée, orpheline et capricieuse. Et ce qui devra mal se passer, se passera mal.

Un roman noir pour un hiver glacial au relents de genièvre et de mauvais cigare

Le 8e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Dans le flot de voyageurs qui coulait par saccades vers la sortie, elle était la seule à ne pas se presser. Son sac de voyage à la main, la tête dressée sous le voile de deuil, elle attendit son tour de tendre son billet à l'employé, puis elle fit quelques pas.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est au cœur de la campagne belge, dans la ferme de ses cousins Van Elst, que choisit d'aller vivre Edmée, restée seule à seize ans après la mort de son père. Géré tant bien que mal par Fred, l'aîné des Van Elst, et son cadet Jef, ce domaine grevé d'hypothèques semble destiné à péricliter irrémédiablement.
Orgueilleuse et dominatrice, la jeune fille ne va pas tarder à susciter la passion de Fred, pour lequel elle éprouve une attirance mêlée de dégoût. Plus sensible sous des dehors bourrus, Jef paraît lui aussi fasciné.
Comment sauraient-ils que sont déjà en place tous les mécanismes qui vont les amener vers l'échec et la tragédie ? Le lecteur le découvrira en même temps qu'eux, au fil de ces pages envoûtantes et inquiétantes, plongées dans l'interminable et pluvieux hiver belge.