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Une joggeuse disparue dans la forêt voilà trois ans. La mère qui y campe depuis et une flic qui ne réussi pas à lâcher l’affaire.
Par la forêt de Anthony Pastor, dessin de Jean-Christophe Chauzy
Autour de ce scénario assez prometteur et quelques personnages secondaires, l’histoire ne réussit toutefois pas à s’envoler.
Et si les magnifiques dessins de forêt m’ont emballé, les personnages m’ont laissé froid pour un résultat final peu convaincant
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Dans la forêt
Je cours
Je cours
Sur les sentiers
Je me perds
Les feuilles mortes
Sous mes pieds
Craquent
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Là où l'asphalte s'arrête, là où les sentiers s'effacent, là où les joggeuses se perdent…
C’est au cœur de la forêt que vont s'entrecroiser les trajectoires d’une mère dont la fille unique a disparu et celles d’une jeune policière qui ne veut pas se résoudre à clore l’enquête.
Dans ce roman graphique hypnotique, Jean-Christophe Chauzy et Antony Pastor explorent les lisières de notre société : les marginaux qui choisissent la rupture et les citoyens des banlieues pavillonnaires qui finissent par se dissoudre à force d'anonymat. Un magnifique portrait d’un monde qui déshumanise à force de consumérisme et de conformisme
Les meilleurs Maigret – à mon goût – sont ceux où Simenon s’attache à une personne, une famille ou un groupe (par exemple les habitants d’un immeuble, les client d’un bistrot…). À sa manière, il tente de les comprendre et de saisir leurs personnalités, les failles et les tensions. Et avec ce corps sans tête, il le fait très bien.
Maigret et le corps sans tête de Georges Simenon
Un Maigret ou apprend qu’il existerait des étages de prostituées et que ce sont celles du bas qu’on retrouve démembrées dans les canaux. Si la formulation est fort maladroite et datée, reste un fait bien sordide qui démontre (s’il était besoin) la considération (nulle) qui leur était est apportée.
Un Maigret ou l’on apprend aussi qu’un verre de blanc toutes les heures ou toutes les demi-heures, ce n’est pas de l’alcoolisme. Rions !
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) La trouvaille des frères Naud
Le ciel commençait seulement à pâlir quand Jules, l'aîné des deux frères Naud, apparut sur le pont de la péniche, sa tête d'abord, puis ses épaules, puis son grand corps dégingandé. Frottant ses cheveux couleur de lin qui n'étaient pas encore peignés, il regarda l'écluse, le quai de Jemmapes à gauche, le quai de Valmy à droite, et il s'écoula quelques minutes, le temps de rouler une cigarette et de la fumer dans la fraîcheur du petit matin, avant qu'une lampe s'allumât dans le petit bar du coin de la rue des Récollets.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) L'un après l'autre, les morceaux d'un cadavre, découverts par des mariniers, sortent des eaux du canal Saint-Martin, au-dessus de l'écluse des Récollets. Seule la tête demeure introuvable.
C'est dans un bistro voisin, sur le quai de Valmy, que Maigret va entreprendre de humer les mystères du quartier. Le patron du café, Omer Callas, est absent : au dire de sa femme Aline, il s'approvisionne en vins dans la région de Poitiers. Le policier a tôt fait de repérer les amants - l'un régulier, l'autre occasionnel - de cette femme évasive et sèche, adonnée à la boisson. Peu à peu l'étau se resserre autour d'elle. Mais quel intérêt pouvait-elle avoir à faire disparaître un mari aussi peu gênant ? La vérité surgira, étonnante, liée à ces paradoxes du cœur humain, à ces énigmes de la personnalité et du destin que Georges Simenon excelle à débusquer dans les existences les plus ordinaires
Si le Jules Maigret des romans (pour les séries télévisées, c’est tout autre chose!) a quelques traits communs avec son homologue de Los-Angeles, Frank Columbo (dont le prénom n’est jamais cité alors qu’on aperçoit parfois celui de Maigret), il y a quand même une très grosse différence : le français fait des erreurs !
Et c’est avec Ernestine que débute ce polar, venant demander de l’aide au commissaire alors que des années auparavant, elle avait fait de la prison par erreur à cause de Maigret… Pas rancunière !
Maigret et la grande perche de Georges Simenon
Une histoire de perceur de coffres nocturne qui tombe sur un cadavre qu’il n’aurait pas du voir
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Où Maigret retrouve une ancienne connaissance qui a fait une fin à sa façon et où il est question de Fred-le-Triste et d'une probable dépouille mortelle.
La fiche que le garçon de bureau avait fait remplir et qu'il tendait à Maigret portait textuellement :
« Ernestine, dite la Grande Perche (ex-Micou, actuellement Jussiaume), que vous avez arrêtée, il y a dix-sept ans, rue de la Lune, et qui s'est mise à p... pour vous faire enrager, sollicite l'honneur de vous parler de toute urgence d'une affaire de la plus haute importance. »
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) «La Grande Perche», c'est Ernestine, une prostituée qui a eu jadis maille à partir avec le commissaire Maigret. C'est à lui, dont elle a pu apprécier l'humanité et l'indulgence, qu'elle vient confier le secret qui terrorise son mari. Au cours d'un cambriolage chez un dentiste de Neuilly, celui-ci a découvert le cadavre d'une femme dans la maison.
Ainsi Maigret va-t-il faire la connaissance du Dr Guillaume Serre, veuf d'une première femme et, dit-il, quitté par la seconde, une Hollandaise du nom de Maria. Maria a-t-elle vraiment regagné Amsterdam ?
Quels secrets ténébreux partagent le dentiste et sa mère, personnalité dominatrice dont il n'a manifestement jamais su s'affranchir ?
Voilà donc un excellent Maigret ! Une intrigue pas trop compliquée, quelques chausses-trappes, un commissaire qui doute, un Maigret humain, véritable !
La colère de Maigret de Georges Simenon
Et aussi un petit polar de rien du tout qui raconte Paris, un vieux Paris avec ses cabarets, sa faune interlope, ses petits brigands, et le milieu presque gentillet de Paris la nuit.
Avec une bonne grosse colère qui lui donne son titre… et sa saveur
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Il était midi et quart quand Maigret franchit la voûte toujours fraîche, le portail flanqué de deux agents en uniforme qui se tenaient tout contre le mur pour jouir d'un peu d'ombre. Il les salua de la main, resta un moment immobile, indécis, à regarder vers la cour, puis vers la place Dauphine, puis vers la cour à nouveau.
Dans le couloir, là-haut, ensuite dans l'escalier poussiéreux, il s'était arrêté deux ou trois fois, faisant mine de rallumer sa pipe, avec l'espoir de voir surgir un de ses collègues ou de ses inspecteurs. Il était rare que l'escalier soit désert à cette heure mais cette année, le 12 juin, la P.J. avait déjà son atmosphère de vacances.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) La colère de Emile Boulay, patron de plusieurs cabarets montmartrois, est découvert étranglé près du Père-Lachaise. Avec qui avait-il rendez-vous ? Pourquoi, quelque temps plus tôt, cet homme habituellement si économe a-t-il retiré 500 000 francs de son compte bancaire ? Peu à peu, Maigret reconstitue les faits et découvre que Boulay est soupçonné de n'être pas étranger à la mort d'un racketteur du nom de Mazotti. Et, lorsqu'il s'apercevra que son nom a été cité, dans une sordide escroquerie, comme celui d'un policier corruptible, sa colère éclatera...
Un Maigret un peu compliqué, mais qui débute de façon plutôt amusante avec Madame Maigret, une grosse mémère [sic] au parc, coincée à garder un petit enfant alors que la poule du repas de Monsieur Maigret est sur le feu.
L’amie de madame Maigret de Georges Simenon
L’histoire d’une comtesse, de deux dents dans un calorifère (les siennes ?) et d’une voiture en chocolat (enfin, couleur chocolat) que tout le monde cherche au Grand Turenne. Un Maigret dans lequel plusieurs remises à niveau sont nécessaire pour une compréhension fluide…
Au Grand Turenne
Une enquête un peu alambiquée qui ne manque pourtant pas d’alcool (ni de sandwichs)
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) La petite dame du square d'Anvers
La poule était au feu, avec une belle carotte rouge, un gros oignon et un bouquet de persil dont les queues dépassaient. Mme Maigret se pencha pour s'assurer que le gaz, au plus bas, ne risquait pas de s'éteindre. Puis elle ferma les fenêtres, sauf celle de la chambre à coucher, se demanda si elle n'avait rien oublié, jeta un coup d'œil vers la glace et, satisfaite, sortit de l'appartement, ferma la porte à clef et mit la clef dans son sac.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Un billet anonyme, une perquisition, des dents humaines retrouvées dans un calorifère... Maigret n'hésite pas à incarcérer Steuvels, un relieur belge établi rue de Turenne. Mais qui a été tué ? Et pourquoi ? La presse s'empare de l'affaire. Liotard, le jeune avocat de Steuvels, soigne sa publicité. Et l'enquête piétine. Cependant, Madame Maigret, en se rendant chez son dentiste, square d'Anvers, a lié connaissance avec une jeune femme italienne, accompagnée d'un enfant de deux ans. Le jour où celle-ci lui confie l'enfant durant deux heures, sans explication, elle s'ouvre à son mari. Or cette Gloria était au service d'une riche comtesse récemment assassinée à l'hôtel Claridge...
Et c'est finalement Madame Maigret qui va mettre son mari sur la piste. Une piste tortueuse qui, du Claridge au square d'Anvers, et du square d'Anvers à la rue de Turenne, le mènera à la vérité
Une histoire à mettre dans les grands classiques de Maigret. Un polar « sociologique » qui s’intéresse à un couple bien aisé (Monsieur est notaire et il possède une des études les plus en vue de Paris) mais qui ne se côtoie plus, ne s’aime plus et ne se croise plus que rarement dans un grand appartement. D’ailleurs, monsieur s’absente régulièrement dans les bras de jeunes filles et madame boit à la maison. Madame boit beaucoup !
Et madame débarque dans le bureau du commissaire pour signaler la disparition de monsieur Sabin-Levesque…
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Maigret jouait, dans un rayon de soleil de mars encore un peu frileux. Il ne jouait pas avec des cubes, comme quand il était enfant, mais avec des pipes.
Il y en avait toujours cinq ou six sur son bureau et, chaque fois qu'il en bourrait une, il la choisissait avec soin selon son humeur.
Son regard était flou, ses épaules tassées. Il venait de décider du reste de sa carrière. Il ne regrettait rien, mais il en gardait une certaine mélancolie.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Voilà longtemps que Nathalie Sabin-Levesque sait à quoi s'en tenir sur les fugues de son mari. Tandis qu'elle sombre peu à peu dans l'alcool, rejetée par l'entourage de ce confortable notaire du faubourg Saint-Germain, Gérard, qui ne l'aime plus, se distrait dans les boîtes de nuit des Champs-Elysées, où les professionnelles le connaissent sous le nom de monsieur Charles. Mais cela fait un mois maintenant que Gérard n'a pas reparu... C'est à l'histoire d'un couple depuis longtemps désuni que Maigret va s'intéresser ici, telle que lui permettent de la reconstituer les témoignages des amis et des domestiques. Et à une femme dont l'ascension sociale aura été payée du prix de la solitude et de la déchéance
En français, Andrea Camilleri n’a pas toujours bénéficié des meilleures traductions possibles – faute probablement à la difficulté de traduire de l’italiano-sicilien. Mais ses productions hors inspecteur Montalbano ont bénéficié d’un traitement moins caricatural. Et c’est, à mon avis, là que toute la qualité de ses ouvrages peut le mieux s’apprécier en français. La pension Eva, Le neveu du Négus ou Le grand cirque Taddei en sont des forts bons exemples.
Le ciel volé : dossier Renoir de Andrea Camilleri
Et ce ciel volé fait partie de ceux-ci. Une intrigue bien amenée, une première partie épistolaire fort amusante, une seconde qui ne l’est pas moins et un sujet auquel on aimerait veut croire !
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Pierre-Auguste Renoir a-t-il bien séjourné en 1882 dans la ville sicilienne de Girgenti (aujourd'hui Agrigente), comme l'affirme son fils Jean dans la biographie qu'il lui a consacrée ? Si oui, pourquoi n'existe-t-il aucune trace de ce voyage dans les toiles du maître de l'impressionnisme ? À travers l'échange épistolaire qu'entretient le vieux notaire Michele Riotta avec la belle et mystérieuse Alma Corradi, Andrea Camilleri propose un scénario adroit et mordant, où la passion brouille les cartes jusqu'à l'ultime rebondissement
Et si à la sortie de l’aéroport, en fin de soirée, épuisée, fatiguée et lasse d’attendre un conjoint qui ne viendrait pas, vous suiviez une personne tenant une pancarte au nom de Emma Auster ? L’héroïne de ce jeu des si tente l’expérience.
Le jeu des si de Isabelle Carré
Un livre un peu convenu qui tout à coup, bim ! sans prévenir, saute dans l’autofiction (pour en revenir plus tard) tout en tissant des parallèles entre celle qui aurait osé s’échapper et l’autrice coincée par le confinement. Amusant et déroutant !
Mais voilà, Isabelle Carré m’a semblé bien plus convaincante lorsqu’elle ne se cache pas
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Le visage collé au hublot, j'admirais les montagnes qui s'étalaient autour du long ruban goudronné de la piste d'atterrissage. Les lignes blanches et les pointillés défilaient à toute vitesse, tels d'impeccables formulaires à découper.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Et si vous pouviez changer de vie ? Jeu des si, mode d'emploi :
Règle n° 1 : Trouvez un nouveau nom.
Règle n° 2 : Remplacez vos proches par des inconnus.
Règle n° 3 : Modifiez votre personnalité, cessez de mentir par exemple.
N'oubliez aucune piste. Peut-être vous embarquerez-vous sur un coup de tête dans le taxi d'une autre, comme Élisabeth. Et peut-être serez-vous plus libre à l'arrivée.
Isabelle Carré nous invite à découvrir un jeu fascinant, tendre, cruel, parfois dangereux. Les strates de la fiction s'y déplient pour dessiner le portrait d'une femme bouleversante et singulière qui pourtant nous ressemble. Qui n'a jamais songé à disparaître, pour mieux recommencer ?
Bien souvent dans les romans de gare mal fichus, les rêves servent de cache-misère aux auteurs pour trouver une fin à leurs abracadabrantesques délires. Mais là, non. C’est pas Inception mais c’est un peu cul, un peu valaisan, pas assez gore et plutôt drôle.
Delirium de Louise Anne Bouchard
Un détective privé à la recherche d’infos sur une ancienne disparition mystérieuse, huit beautés marchandes de leurs charmes au Dolly Pop.
Une histoire qui n’est pas sans rappeler celle du célèbre portrait d’Oscar le Sauvage.
Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente) Couleur3 et Canal diffusaient les infos en boucle : on recherchait un homme disparu depuis soixante-douze heures.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) Jérôme boit trop, baise trop, et s’est fait virer de son job.
Il va se refaire une santé en Valais. Et là, encore, il baise trop, boit trop.
Dans son cauchemar, on l’enlève et on le malmène : séquestration et sévices pour l’empêcher de toucher à la légende du Dolly Pop, la mystérieuse disparition de huit beautés qui gagnaient leur vie en Valais en vendant leurs charmes et parfois leurs petites culottes
Alors qu’elle avait disparu depuis plus de trente ans, Magdalena reçoit un téléphone : sa mère est vivante.
Revenir à toi de Léonor de Récondo
Lâchant tout, elle part à sa rencontre. Petite vieille de plus de 80 ans, dans une maison d’écluse.
Le récit d’une quête, du désir de comprendre, de retrouver sa mère, de retrouver ce lien.
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc) « On a retrouvé ta mère. »
Lorsqu'elle reçoit ce message, Magdalena n'hésite pas, elle part vers l'adresse indiquée, une maison éclusière, dans le Sud-Ouest.
Comédienne de talent, Magdalena a vécu sans rien savoir de sa mère, Apollonia, disparue depuis trente ans. Mais aujourd'hui, son cœur est à nu. D'abord impossible, le dialogue se fait gestes et chuchotements. Puis, au fil du voyage qui ramène mère et fille à leurs enfances peuplées d'absences, se dévoile un secret tacitement transmis.
Hommage aux grands mythes littéraires qui nous façonnent, Revenir à toi tisse le silence et les mots en une magnifique réconciliation avec l'autre et avec soi-même