Les innocents

Dernier des romans durs de Simenon, les innocents est paru en 1972. Et c’est un très bon Simenon ! Alors, certes, la fin s’annonce aussi évidement que le camion du début. Pas vraiment de suspense ici. Mais comme souvent dans ses livres, c’est par sa connaissance de l’âme humaine et son talent à la décrire que Simenon impressionne.

D'évoquer ainsi ses souvenirs du passé ne l'empêchait pas de rester attentif, malgré lui, à ce ce qui se passait autour de lui. Il aurait voulu que la vie soit finie, que la terre cesse de tourner parce que Annette était morte, mais il avait, en arrivant dans l'atelier de la rue de Sévigné, un coup d'œil vers la baie vitrée qui découvrait un ciel qui, depuis quelques jours, restait d'un même bleu pastel, avec le rose des poteries de cheminées qui tranchait sur le gris des toits.
Il saluait chacun d'un mot gentil et ils devaient être persuadés qu'il allait mieux.
Il réalisait maintenant, à son établi, le bijou qu'il dessinait quand le brigadier était venu lui annoncer son malheur. Et il le faisait avec amour, comme s'il le dédiait à Annette.
Pour lui, elle restait vivante et parfois, quand il était boulevard Beaumarchais, il était sur le point de lui adresser la parole.
Les innocents de Georges Simenon
Un homme perd sa femme brutalement, shootée par un camion. Son monde s’écroule.

Et ce n’est pas fini

Le 117e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Même la giboulée de mars qui tombait depuis une heure était savoureuse, car elle donnait à l'atelier une couleur plus intime. On retrouvait les toits de Paris que la pluie laquait d'un noir bleuâtre et le ciel était d'un gris qui gardait une certaine luminosité.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis seize ans, Georges Célerin est associé à son ami Brassier dans une entreprise de bijouterie : le premier dessine les bijoux et dirige l'atelier, le second s'occupe des commandes et de la vente. Célerin vit en parfaite harmonie avec sa femme Annette, leurs deux enfants et ses collaborateurs. Un accident stupide va changer la destinée de cet homme heureux : Annette, qui travaille comme assistante sociale dans le quartier de la Bastille, se fait écraser par un camion en traversant la rue Washington, dans un quartier où, apparemment, elle n'avait rien à faire.

Après ce coup terrible, Célerin n'est plus le même homme. Sur les traces de la morte, il cherche à savoir ce qui s'est passé.

Le Cheval blanc

On s’arrange, on fait comme on peut, avec ses casseroles, ses désirs, ses frustrations. Parfois, ça casse, d’autres fois ça tient encore… jusqu’à quand.

L'oncle s'éveillait, voyait au soleil qu'il n'était pas l'heure et restait sur son grabat, les yeux ouverts, à renifler son odeur de vieil homme.
Le Cheval blanc de Georges Simenon
Simenon excelle à peindre ces vies qui passent à côté de leurs rêves. Couples ratés, misères pourries, petits arrangements… Tant qu’on n’y regarde pas de trop près.Elle aurait pu parler de ça à la patronne du Cheval Blanc. Elles se seraient comprises. Mais, même si elles en avaient eu l'occasion, elles ne l'auraient probablement pas fait.
On n'en parle pas...
On s'arrange...
On fait tout ce qu'on peut...
Ainsi, soudain livré à lui-même, Arbelet redevenait rêveur.Un roman guère palpitant, limite fatiguant. Des tristes portraits lamentables

Le 25e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Tu devrais le poser par terre, Maurice...
Pourquoi cette phrase-là plutôt qu'une autre ? Et pourquoi cette minute-là plutôt que n'importe laquelle des minutes de ce dimanche de Pentecôte ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Au bord de la nationale, à l'auberge du Cheval Blanc, la cuisine est renommée et la vie paraît agréable, simple et ensoleillée. Mais le patron exerce ses prérogatives sur les petites bonnes de seize ans, et le veilleur de nuit est un criminel relâché depuis peu, gonflé de graisse molle, lui-même persuadé qu'un jour il tuera de nouveau. Sans doute l'un de ces représentants de commerce arrogants qui le réveillent à toute heure. Peut-être le patron, la cuisinière, un joueur de cartes, une cliente, au hasard, sur un coup de sang… Le drame couve. Le veilleur sait tout des affaires sordides des uns et des saloperies des autres. Un jour, se dit-il en frottant dans le garage aux heures blêmes les carrosseries noires des voitures, un jour… « I faudra bien que j'en tue un… »

Les sœurs Lacroix

Un sombre huis clos se déroule depuis de nombreuses années dans la maison des sœurs Lacroix. Une histoire de secret de famille bien glaucasse où tout le monde paye le prix. Fort !

 - Je ne sais pas ce qui arrivera à ce moment, ni ce que vous direz de moi... D'autres en parleront...
Il souriait, désabusé. Et Sophie, dans sa chambre, frappait de grands coups contre la cloison.
 - Bon! Compris... cria-t-il. D'ailleurs, j'ai fini...
Le sang aux joues, il avait plusieurs fois passé la main dans ses cheveux en désordre.
 - Bonsoir, Mathilde... Dors !.... Ou plutôt essaie de dormir...
» Je ne suis pas dupe de ton silence, va! Je ne comprends même plus, maintenant, comment j'ai pu envisager de vous entraîner tous avec moi... »
Elle se retourna bruyamment et il se tut, resta encore un moment assis sur son lit, puis s'enfonça peu à peu dans les draps.
Il avait oublié d'éteindre la lumière. C'est Mathilde qui le fit, après avoir attendu un certain temps pour s'assurer que c'était bien fini.
Les sœurs Lacroix de Georges Simenon

Tout est clair dès le début, il suffit de regarder tranquillement la haine, l’incompréhension et la jalousie faire leurs chemins.

Un tout grand roman noir gluant

Le 29e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- ... pleine de grâce, le Seigneur est avec vous...
pleine de grâce, le Seigneur est avec vous...
Les mots n'avaient plus de sens, n'étaient plus des mots. Est-ce que Geneviève remuait les lèvres ? Est-ce que sa voix allait rejoindre le sourd murmure qui s'élevait des coins les plus obscurs de l'église ?
Des syllabes semblaient revenir plus souvent que les autres, lourdes de signification cachée.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les haines familiales s'exacerbent dans la maison des sœurs Lacroix où vivent Poldine et Mathilde avec leurs enfants : Sophie, la fille adultérine de Poldine et du mari de Mathilde, Geneviève et Jacques, les enfants de Mathilde...
L'atmosphère est lourde, malsaine et le drame couve.

En cas de malheur

Quel fascinant Simenon ! Quelle claque !

Moi qui avait mangé tous les Maigret, commissaire asexué, placide observateur des années 30 à 70 en France… Bonhomme au regard détaché devant la petitesse humaine. Témoin d’une époque patriarcale et bien pensante.

Ce qui me surprend, moi, je le confesse, ce qui me trouble, c'est que Mazetti soit amoureux d'Yvette, et j'ai tendance à croire que, sans moi, il ne s'en serait guère préoccupé.
Si un jour on lit les pages de ce dossier, on re- marquera que je n'ai jamais encore écrit le mot amour, et ce n'est pas par hasard. Je n'y crois pas. Plus exactement, je ne crois pas à ce qu'on appelle généralement ainsi. Je n'ai pas aimé Viviane, par exemple, si bouleversé que j'aie été par elle à l'époque du boulevard Malesherbes. Elle était la femme de mon patron, d'un homme que j'admirais et qui était célèbre. Elle vivait dans un monde bien fait pour éblouir l'étudiant pauvre et fruste que j'étais encore la veille. Elle était belle et j'étais laid. De la voir me céder, c'était un miracle qui me gonflait tout à coup de confiance en moi-même et en mon destin.
Car je comprenais déjà ce qui l'attirait en moi : une certaine force, une volonté inflexible à laquelle elle faisait confiance.
Elle a été ma maîtresse. Elle est devenue ma femme. Son corps m'a donné du plaisir, mais n'a jamais hanté mes rêves, n'a jamais été autre chose qu'un corps de femme, et Viviane n'a pris aucune part à ce que je crois le plus important de ma vie sexuelle.
Je lui étais reconnaissant de m'avoir distingué, d'avoir accepté, pour moi, ce que je considérais encore comme un sacrifice, et ce n'est que beaucoup plus tard que j'ai soupçonné la vérité sur ce que, de son côté, elle appelait son amour.
En cas de malheur de Georges Simenon

Et là, voilà que l’auteur se lâche dans une sorte de confession à peine déguisée (ou me trompé-je tant ?). Lui, l’homme qui se vantait d’avoir connu plus de dix mille femmes (pour la plus part prostituées), le voilà qui nous propose paroles d’un homme épuisé par sa maîtresse (jeune prostituée qu’il a sauvée du trottoir), les convenances, son travail, son épouse et ses obligations sociales.Demain, il est possible que je pense et écrive le contraire, mais j'en doute.
Yvette, comme la plupart des filles qui m'ont ému, personnifie pour moi la femelle, avec ses faiblesses, ses lâchetés, avec aussi son instinct de se raccrocher au mâle et de s'en faire l'esclave.
Je me souviens de sa surprise et de son orgueil, le jour où je l'ai giflée et, depuis, il lui est arrivé de me pousser à bout dans le seul but de me voir recommencer.
Je ne prétends pas qu'elle m'aime. Je ne veux pas de ce mot-là.
Mais elle a renoncé à être elle-même. Elle a remis son sort entre mes mains. Peu m'importe si c'est par paresse, par veulerie. C'est son rôle et je vois, peut-être naïvement, un symbole dans la façon dont, après m'avoir demandé de la défendre, elle a ouvert ses cuisses sur le coin de mon bureau.
Que, demain, je l'abandonne, elle redeviendra, dans les rues, une chienne errante à la recherche d'un maître.

Plongée dans la France des années cinquante, gros plan sur les fantasmes et la vision des hommes sur les femmes ! Fascinante, répugnante, hypnotique. Témoignage presque attendrissant d’un homme pris au piège de… de qui ? Fallait-il vous plaindre, Georges ?

Et que dire de l’immonde fin ? Oui, témoignage d’une époque qu’on souhaiterait tant révolue !

Un odieux livre indispensable

Le 86e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il y a deux heures à peine, après le déjeuner, dans le salon où nous venions de passer pour prendre le café, je me tenais debout devant la fenêtre, assez près de la vitre pour en sentir l'humidité froide, quand j'ai entendu derrière moi ma femme prononcer :
- Tu comptes sortir cet après-midi?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les femmes, Lucien Gobillot les connaît : à quarante-cinq ans, et bien que marié, cet avocat à la carrière brillante, due à un mariage ambitieux et à quelques complaisances, multiplie les aventures sans lendemain. Tout change lorsque Yvette accusée d'agression contre un vieil horloger, fait irruption dans son cabinet, prête à le payer de ses charmes. L'avocat parvient à la faire acquitter. Commence alors une histoire amoureuse qui va l'entraîner plus loin qu'il n'eût voulu aller, dans une aventure où surgiront la menace...

Le mal joli

L’histoire d’une passion. Mais la grosse passion, celle qui emporte tout. Celle où la douleur côtoie l’extase. La passion adultère, celle qui ne peut vivre ni mourir.

Quand je dis ça, je ne suis pas en train de soutenir qu'il faille prendre pitié des femmes et des hommes adultères. Ça ne viendrait à l'idée de personne, pas même aux gens qui l'ont vécu. Mais je dis qu'il existe dans cette existence humaine des drames qui se promènent déguisés en miracles, et il est étrange que ce drame que nous sommes tant à partager ne soit compris par pratiquement personne, que nous nous trouvions toujours seuls face à l'abîme de nos pensées, seuls comme face à un deuil, à la maladie, et que personne n'ait jamais pensé à réunir les gens atteints de cette affliction sous un même toit, deux fois par semaine, pour vider leurs poches pleines de considérations terribles, où se dissolvent les enfants, les responsabilités, le sens commun.
Le mal joli de Emma Becker

Un livre que j’ai lu en me demandant comment il allait se terminer – on le sait bien, les histoires d’amour finissent mal. Faudra-t-il un second tome me demandais-je en voyant la fin approcher ?

Un jour, je ne saurai plus mentir. Tout le reste de mon existence s'adaptera à mon amour pour Antonin et je n'aurai qu'à hausser les épaules. Parce que c'est ça, la vie : c'est la matière devenue folle.

Une autofiction forcément impudique dans laquelle Emma Becker nous vend ses talents d’amante tout en peignant un tableau au réalisme cru. Celui d’un amour interdit, torture divine auto-infligée.

Et que celles et ceux qui n’ont jamais vécu telle passion gardent leur pierre pour s’en frapper au soir de leur mort

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il me semble a posteriori que tout allait bien lorsque j'ai rencontré Antonin pour la première fois. C'est déjà faire preuve de relativisme m'aurait-on posé la question ce soir-là, cafardeuse et assommée d'herbe comme je l'étais, j'aurais eu un sourire triste et répondu qu'on m'avait déjà enculée plus aimablement.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Pendant combien de temps peut-on supporter deux amours inconditionnelles ? Pendant combien de temps une femme peut-elle vivre écartelée entre une passion amoureuse et un amour absolu pour ses enfants ?

Dans ce nouveau roman, Emma Becker regarde en face et dévoile sans complaisance les moments les plus dangereux, les plus intenses et les plus beaux d'une vie.

Elle ausculte ici le mal joli, cette traversée des plaisirs incandescents et des peines inavouables qui scandent un amour interdit. Et elle nous conte cette histoire d'amour, ou plutôt nous la fait vivre en temps réel, durant un printemps, un été et un automne.

Trois saisons privée des siens auprès de l'homme qu'elle aime, privée de lui auprès des siens.
Trois saisons dans la vie d'une femme.
Trois saisons d'extase et de déchirement.

Emma Becker va encore plus loin dans l'écriture de l'intime et jamais elle ne nous avait tendu un miroir aussi universel.

Agatha Christie, le chapitre disparu

En 1926, la mère de Agatha Christie meurt et son mari infidèle lui annonce son intention de divorcer. Elle disparaît alors durant une dizaine de jours. Disparition qu’elle n’expliquera jamais.

 « Bon sang, pourquoi ai-je fermé les yeux en lançant la voiture dans la pente », articulai-je. 
 « Puisque c'est comme ça, tant pis, c'est que je dois vivre ! » Je me souviens avoir prononcé cette phrase et je me rappelle également sur quel ton je l'ai émise.
Je me sentis soudain soulagée d'un immense poids, je ne mourrai pas aujourd'hui, ni demain, plus question de mettre fin à mes jours. À la seconde que je crus être la dernière de ma vie, je dois l'avouer, j'avais supplié à la voiture de stopper son allure, à ma mère de me sauver, « non, je ne veux pas mourir, Maman, Maman ». La peur avait été si grande.
Agatha Christie, le chapitre disparu de Brigitte Kernel

Brigitte Kernel s’empare de cette rocambolesque histoire et comble les vides de cette affaire dont toute l’Angleterre parla.

Leeds Mercury - Wednesday 15 December 1926
Leeds Mercury – Wednesday 15 December 1926

C’est drôle, pétillant et léger (un peu beaucoup, même), comme une enquête menée par la protagoniste de son propre rapt

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
The End.
Voilà, le livre est fini.
J'y ai posé le point final vers quinze heures.
Le titre : Une autobiographie. Il n'y a pas plus simple.
Juste au-dessus, en lettres capitales, mon nom, Agatha Christie.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Hiver 1926. Agatha Christie disparaît. L'Angleterre retient son souffle. Pourquoi et comment la reine du crime s'est-elle volatilisée dans la nature ? Qu'a-t-elle fait pendant onze jours ? Cette histoire vraie demeure comme une zone d'ombre dans la vie de la plus célèbre des romancières anglaises et personne encore n'est parvenue à élucider cette énigme.

Dans ce roman passionnant, Brigitte Kernel se glisse dans la peau d'Agatha Christie pour revenir sur cet épisode mystérieux, reconstituer l'étrange disparition, déterrer une sombre affaire de vengeance et même découvrir une histoire d'amour.

Ne crains pas l’ombre ni les chiens errants

Camille Zabka nous raconte une fin de couple, dans la violence et la fuite. Et c’est pas mal bien foutu.

Tous entraient en Indonésie comme dans un supermarché. Il leur fallait tout voir, tout visiter. Une plage déserte, un ancien palais devenu hôtel, un bivouac avec cuisinier et guide à Kalimantan, une goélette affrétée juste pour eux dans les champs d'algues de Nusa Lembongan, une croisière le long du fleuve Mahakam. Avec de l'argent, il y a de multiples manières de s'emparer du monde. Ils étaient des consommateurs de paysages, de fausses aventures, de souvenirs.
Moi, je n'aimais pas l'avion, et Lucas estimait qu'il voyageait déjà assez pour son travail.
Ne crains pas l’ombre ni les chiens errants de Camille Zabka

Mais mieux encore, elle nous raconte l’Indonésie, les expats condescendants, vivant en groupes dans des prisons dorées, servis par « ceux qui font », les pembantus, domestiques, chauffeurs, jardiniers…

Je noue le kain autour de mon épaule, y cale bien mon enfant et demande autour de moi :
 - Ojek ? Taxi ?
Je marche vers les remparts de Jogjakarta, le centre de l'ancienne capitale de Java, cette ville qu'avec Lucas nous avions tant aimée. Les rues en arc de cercle suivent l'ancien tracé des rizières. 
Partir, partir, partir.

Elle raconte aussi les ravages des cultures de palme, la déforestation, la destruction de l’habitat des orang-outans…

Une bien moche réalité

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C'est la bonne nuit pour fuir. La lune éclaire la route.
Je chante pour me donner le courage de rejoindre le village, au loin là-bas, de l'autre côté de la forêt.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est l'histoire d'une femme qui a cru au paradis en s'installant sur l'île de Java.

Mais quand elle se retrouve derrière les hauts murs de son Complex pour Occidentaux, elle découvre une autre réalité, un autre homme et le décor de rêve se fissure.

Elle refuse d'être écartelée entre deux mondes.

Elle vient d'avoir trente ans, un âge pour vivre ou pour mourir. Elle va choisir de vivre.

Un simple dîner

À la manière d’un huis-clos de Jaoui-Bacri, Cécile Tlili invite deux couples pour un souper… Chronique d’un drame inévitable.

Johar lève les yeux de son téléphone. Étienne et Claudia arrivent, une assiette dans chaque main, en une ridicule procession. Elle se demande quel besoin a cette femme de se cacher derrière son compagnon, et quel besoin il a, lui, de s'attribuer le mérite des plats qu'elle a visiblement mis des heures à mitonner. À sa gauche, Rémi déguste le bourgogne à petites gorgées. Elle entend un écœurant bruit de succion, on dirait qu'il dépose des baisers humides sur la bordure du verre.
Un simple dîner de Cécile Tlili

Pourtant ici, nulle envie de rire, juste des couples qui s’étiolent, fanés, usés et que nul ne semble avoir la force – ni même l’envie – de faire refleurir.

Un beau livre, moche comme les choses dont a pas pris soin depuis trop longtemps

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Claudia s'adosse au mur de la cuisine. La chaleur emmagasinée par le plâtre tout au long de la journée se propage dans ses hanches, ses omoplates, ses épaules. Sa tête tombe en avant, infiniment lourde. À la vue des striures rouges qui lui barrent la gorge, Claudia s'enfonce un peu plus profondément dans le mur, indifférente aux traces que ses mains, encore grasses d'avoir huilé le pou- let, impriment sur la peinture blanche.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Dans le miroir de la salle de bains, elle se dévisage, et se voit telle que les amis d'Etienne vont la voir : une fille fade et gauche, une fille qu'il a choisie parce qu'elle ne risque pas de lui faire de l'ombre ».
Un soir de canicule, en août à Paris, deux couples se rejoignent pour dîner. La soirée aura lieu chez Etienne. Claudia, sa compagne, d'une timidité maladive, a cuisiné toute la journée pour masquer son appréhension.
Johar et Rémi, leurs invités, n'ont pas l'esprit tranquille non plus. Autour de la table, les uns nourrissent des intentions cachées tandis que les autres font tout pour garder leurs secrets. L'odeur épicée d'un curry, une veste qui glisse d'un fauteuil, il suffit d'un rien pour que tout bascule. Avec ce huis-clos renversant, Cécile Tlili interroge la place des femmes dans la société et tisse, avec délicatesse, une ode à l'émancipation et à la liberté.

Faire les sucres

Il ne faut pas s’y tromper, derrière les codes feel-good de la couv’ ou du titre, se cache un autre type de livre. Pas forcément un livre d’horreur, trash ou que sais-je, mais les amateurs de jolies histoires qui finissent bien ne s’y retrouveront pas forcément.

- Tu vas m'embrasser encore?
Quand elle repenserait à cette soirée, elle ne saurait plus qui, d'elle ou de lui, avait posé la question. Mais ça n'a pas eu d'importance pour la suite, parce qu'ils s'étaient embrassés de nombreuses heures, et lorsqu'elle s'était rhabillée pour rentrer à la maison, la lumière du jour commençait à poindre par la fenêtre de la chambre de son chef de choeur.
Faire les sucres de Fanny Britt

L’histoire d’une middle-age crisis, à l’âge où un événement (pas forcément gravissime) peut tout faire dérailler. Un moment où les repères ne sont plus clairs, où l’usure des couples se fait ressentir et où le besoin de sens se fait prégnant. Un accident, la peur de mourir et voilà qu’Adam bascule emportant avec lui Marion, sa compagne.

Un livre qui – tout en restant choupinou – propose avec finesse – et quelques clins d’œils amusés – une jolie satire sociale en exposant quelques contrastes de préoccupations. Et comment ne pas sourire devant ce besoin de retour à la terre d’une personne à qui tout réussit ou face à l’abandon dans d’autres bras de son épouse délaissée. Et comment ne pas réagir devant leur incompréhension face aux douleurs qui leur font face ?

Cliché ? Oui, mais bien pris, avec le bon angle et sans trop de douceur malgré tout

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il l'asseyait sur un tabouret placé près du ventilateur et elle le regardait faire. Il versait d'abord le sucre dans la grande marmite de cuivre, dont Celia pensait qu'elle se transformait en timbale d'orchestre, le soir venu. Parfois, pour lui faire plaisir, il décrochait une des grandes cuillères de bois qui pendaient au mur et tapait de toutes ses forces sur la surface arrondie de la marmite. Un timbre profond, vibrant, s'en échappait, qui captivait Celia. Alors elle applaudissait et disait encore ! Encore ! Et son grand-père s'exécutait.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Faire les sucres, au Québec, c'est exploiter une érablière. Obsédé par le retour à la terre, Adam achète la propriété de la famille Sweet dans l'espoir qu'une nouvelle vocation le sauvera de ses torts et de la vacuité de sa vie de restaurateur vedette. Parallèlement, sa femme Marion délaisse peu à peu ses manières douces et son cabinet de dentiste. Aux États-Unis, à quelques centaines de kilomètres au sud, la jeune Celia voit son île natale, où sa mère tient une boutique de taffys, envahie par des touristes sans gêne.

Comment vont s'entrecroiser le destin de ce couple de Montréalais à qui tout réussit, installés - Jusqu'à tout récemment, du moins - dans leur certitude d'être bons et modernes, et celui de la jeune femme ?

Dans ce roman choral, l'odeur délicieusement réconfortante du sirop d'érable se mêle à l'âpreté des fonds marins. Il y a du Virginia Woolf chez Fanny Britt, qui, cinglante et tendre, creuse la question de nos privilèges et de nos illusions, balayées par les vagues du ressentiment et de la souffrance sociale.

In Bed

Des couples, des amis, des collègues, des désirs d’enfants ou de sexe, des gaffes, des grincements, des fantasmes… La vie infidèle.

In Bed de Lydia Frost et illustrations de Jean-Philippe Kalonji

Une BD franchement explicite aux splendides dessins monochromes de Kalonji. Des merveilles de sensualité.

Mais zut, le scénario un peu léger ne rend pas vraiment honneur aux talents graphiques et aurait mérité quelques développements

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Manhattan. Upper East Side.
Serre-moi fort...
Déjà ?


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je veux me perdre en toi, jusqu'à tout oublier, jusqu'à ce que tout disparaisse... Plus de temps, plus d'espace, plus que cette chambre, ce lit, nos corps... Je ne vis que pour cet instant, magique, éternel... Je ne vis que pour toi car je ne sais plus vivre pour moi... Je veux me perdre en toi, pour n'avoir plus rien à perdre... In Bed... »

L'adultère transcendé par le graphisme de Kalonji et la finesse du récit de Lydia Frost, un album remarquable et simplement beau