L’ami d’enfance de Maigret

Maigret n’est pas tendre avec ce copain d’enfance, pourtant, bien malgré lui, il est attendri par ce looser vieillissant, ce vieux comique qui ne fait rire plus que lui, mythomane désespéré qui tente d’y croire encore.

Comme cela arrive souvent, le trou, dans la gorge, paraissait disproportionné d'avec le calibre d'une balle. Elle avait beaucoup saigné et pourtant son visage ne trahissait que de l'étonnement.
Pour autant qu'il en pouvait juger, la femme était petite, boulotte et douce, une de ces femmes qui font penser à des plats mijotés, à des confitures amoureusement mises en pot.
Le regard de Maigret cherchait quelque chose alentour.
L’ami d’enfance de Maigret de Georges Simenon

Un Simenon bien amusant pour cette histoire de femme aux multiples amants, quasi tous persuadés d’être seul à lui apporter leur soutien en échange d’un moment de tendresse hebdomadaire. Un polar qui en raconte sûrement plus qu’il n’y parait sur la vision des femmes de l’auteur (et de l’époque).

Au fond, Maigret le soupçonnait d'être un inquiet. Son rôle de comique n'était qu'une façade pour se défendre contre une vérité pitoyable.
C'était un raté, le raté type, et, ce qui était plus grave, plus pénible, un raté vieillissant.
Était-ce par pitié que Maigret ne l'avait pas arrêté? Ou bien parce que Florentin avait accumulé trop de preuves contre lui, alors qu'il était intelligent ?

Et l’histoire ? Un vieux copain d’enfance (pas si copain que ça, d’ailleurs) venant demander de l’aide au commissaire. Il raconte à Maigret qu’il était caché dans la penderie alors que sa maîtresse était tuée dans la pièce d’à côté. Mais rien ne colle, rien ne va, et Maigret doute et rumine de fort mauvaise humeur

 - Vous me rejoignez à la Brasserie Dauphine, mes enfants?
Ce n'est qu'après coup qu'il jugea cruel ce rendez-vous donné à voix haute à ses collaborateurs devant deux hommes qu'on allait enfermer.
Cinq minutes plus tard, au comptoir du petit restaurant familier, dont une partie formait bistrot, il commandait :
 - Une bière... Dans le plus grand verre que vous ayez...
En trente-cinq ans, il n'avait pas rencontré un seul de ses condisciples du lycée Banville.
Il avait fallu qu'il tombe sur Florentin !

Maigret 97/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La mouche tourna trois fois autour de sa tête et vint se poser sur la page du rapport qu'il était en train d'annoter, tout en haut, dans le coin gauche.
Maigret immobilisa sa main qui tenait le crayon et la regarda avec une curiosité amusée. Ce jeu-là durait depuis près d'une demi-heure et c'était toujours la même mouche. Il aurait juré qu'il la reconnaissait. D'ailleurs, il n'y avait que celle-là dans le bureau.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est sans réel plaisir que Maigret voit resurgir Léon Florentin, son ancien condisciple au lycée Banville, à Moulins, qu'il n'a jamais particulièrement estimé. Quant à l'affaire qu'il lui apporte, elle n'est guère ragoûtante non plus : l'assassinat d'une certaine Joséphine Papet, maîtresse de Florentin et de plusieurs autres messieurs d'âge mûr, qui lui procuraient de quoi vivre

La patience de Maigret

Chose rare dans les Maigret, celui-ci est une suite, continuation de Maigret se défend. Certes, il peut tout à fait se lire indépendamment, pourtant de nombreux passages font référence au tome précédent.

 - Je suis à peu près certain que vous n'avez pas tué Manuel.
 - Alors, de quoi me soupçonnez-vous?
 - Vous le savez mieux que moi, mon petit. Je ne suis pas pressé. Cela viendra en son temps.
Il appelait Janvier, les deux inspecteurs qui se montraient mal à l'aise dans cette chambre à coucher blanche et jaune.
 - A vous, mes enfants.
Comme pour se préparer au combat, Aline allumait une cigarette et en exhalait la fumée avec une moue dédaigneuse.
La patience de Maigret de Georges Simenon

L’histoire d’un vieux commissaire enquêtant sur le meurtre d’un vieux brigand – Manuel Palmari – avec lequel des liens (à la Titi et Grosminet) s’étaient tissés au fil des années.

Il avait bien déjeuné. Il gardait dans la bouche la saveur du marc. La chaleur, si elle donnait envie de sommeiller, était agréable, le soleil plein de gaieté.
Manuel aussi aimait les bons repas, le marc, et cette demi-somnolence des beaux jours d'été.
Il devait être à présent, sous un drap rugueux, dans un des tiroirs métalliques de l'institut médico-légal.

L’occasion pour Maigret de se repencher sur une affaire jamais résolue et qui traîne depuis vingt ans.

 - Voyez-vous, il y a crapules et crapules. A certaines, je peux serrer la main, comme par exemple Palmari. Vous êtes, vous, de la pire espèce, celle qu'on ne peut regarder en face sans avoir envie de frapper ou de cracher. Et le commissaire se contenait réellement.
 - Allez-y! Je suis sûr que mon avocat en sera enchanté.
Dans quelques minutes, on vous conduira au Dépôt et, cet après-midi sans doute, ou la nuit prochaine, ou demain, nous reprendrons cette conversation.

Et comme à son habitude, Maigret ne pense pas, il s’imprègne et laisse apparaître la vérité d’elle même, au risque de se retrouver avec un cadavre supplémentaire

Maigret 92/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La journée avait commencé comme un souvenir d'enfance, éblouissante et savoureuse. Sans raison, parce que la vie était bonne, les yeux de Maigret riaient tandis qu'il prenait son petit déjeuner, et il n'y avait pas moins de gaieté dans les yeux de Mme Maigret assise en face de lui.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Depuis longtemps Maigret surveillait le vieux Palmari, qu'il soupçonnait de diriger un gang de voleurs de bijoux, et sa maîtresse Aline, son seul contact avec l'extérieur depuis qu'il avait perdu l'usage de ses jambes. Et voilà que Palmari est assassiné.

Maigret va s'intéresser au représentant Fernand Barillard, ami de la victime et amant d'Aline, à sa femme Mina et au vieux père sourd-muet de celle-ci, Jef Claes. Quels liens et quels conflits ont pu se nouer entre ces personnages? Deux jours d'enquête suffiront au commissaire pour couronner des années de patience. Sans qu'il parvienne toutefois à empêcher un second meurtre...

Êtes-vous sûr d’avoir raison ?

Comment échapper à l’ennui du dimanche après-midi m’avait un peu amusé, légèrement, sans risque. Ici, c’est quand même autre chose !

« Ta pute de mère. » Ça ne te dérange pas que je parle de ta génitrice comme ça ? Si ? Alors, tu comprends que « tête de nègre », ça peut poser des problèmes à certains.
Tout cela n'est pas anodin: il faut voir comme nos pensées dépendent de notre langage et de notre langue, de nos mots, et comme les préjugés sont entretenus par l'usage de tel ou tel mot. D'où le combat de certains pour - justement – changer notre manière de dénommer les choses, manière de changer nos manières de penser. Et tant que chacun utilise son propre vocabulaire lourdement connoté dans la discussion, il paraît impossible de changer d'avis.
Êtes-vous sûr d’avoir raison ? de Gilles Vervisch

Sous ce drôle de titre se trouve un bien drôle de livre. Drôle parce qu’il est plein d’humour, mais aussi parce qu’il m’a semblé plus curieux qu’attendu, plus profond, souvent subtil, déconcertant et qui – s’il était trop vite lu – pourrait bien démontrer l’exact contraire de son propos. Oui, Gilles Vervisch semble s’amuser à obliger le lecteur à un minimum de réflexion et de pensée.

C'est ce qui me fait dire que les deux critères essentiels de l'intelligence, c'est le doute et le sens de l'humour. Enfin, il y a toujours des débats, mais disons que ça rend un peu moins con, et que si vous en avez au moins un des deux, ça vous sauve un peu; ça permet déjà de discuter. Le doute, ça consiste à pouvoir se remettre en question; ne jamais être sûr d'avoir raison. L'humour, rire de soi, surtout, ne pas se prendre trop au sérieux, c'est un peu pareil; le doute et l'humour, c'est la capacité à pouvoir prendre un peu de recul, de distance par rapport à ce qu'on pense. Ça tombe bien, c'est à la mode : « On n'a pas assez de recul! » Et à quoi ressemble quelqu'un qui n'a ni doute ni sens de l'humour ? Quelqu'un qui est sûr d'avoir raison et en plus, qui ne veut surtout pas qu'on (en) rigole? À un fanatique religieux. À un intégriste.

Un très bon livre où l’auteur n’hésite pas à rire du pire, à démontrer par l’absurde, à inviter les lectrices-eurs à se faire un avis sans qu’il ne taise le sien. Un livre qui invite au doute et qui décortique wokisme, féminisme, #metoo, moralité et point Goodwin, climatoseptiques et complotistes…

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
« Y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis ! »
Tout le monde pense avoir raison ! Vous, moi... Même si moi, c'est vrai : j'ai raison ! Alors que vous... c'est moins sûr. Mes goûts et mes couleurs sont les meilleurs ; mes valeurs morales, mes croyances, mes convictions politiques sont les bonnes.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Tout le monde pense avoir raison. Et s'il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, on peut faire confiance à la mauvaise foi de chacun pour défendre ses opinions lors des débats en famille ou sur les réseaux sociaux ; vaccin, pass sanitaire, #MeToo, complotisme, climat, wokisme, politique, religion, etc.

J'y mettrais ma main au feu, ma tête à couper. Mais comment puis-je être sûr de ne pas me tromper ? D'où nous viennent nos opinions et nos certitudes ? Pourquoi y sommes-nous tant attaché(e)s ? Et dans le fond, faut-il avoir raison ?

Maigret

Les Maigret, il y en a des bons et des autres. C’est plutôt un autre. Une nouvelle, en fait.

Maigret haussa les épaules, enfonça ses mains dans ses poches et s'éloigna sans répondre. Il venait de passer une des plus sales journées de sa vie. Des heures durant, dans son coin, il s'était senti vieux et mou, sans ressort, sans idée.
Le décalage s'était produit. Une petite flamme avait jailli. Mais il fallait en profiter tout de suite.
 - On verra bien, nom de Dieu! grogna-t-il pour achever de se donner confiance.
Les autres jours, à cette heure-là, il lisait son journal, sous la lampe, les jambes allongées vers les bûches.
Maigret de Georges Simenon

Pourtant, il y a plusieurs éléments amusants, à commencer par le titre de ce Maigret intitulé Maigret. Oui, simplement !

Il s'essuya la bouche du revers de la main, tapota la table avec une pièce de monnaie pour appeler le garçon.
 - Laissez ça ! C'est ma tournée.
 - Si tu veux. On boira la mienne quand ce sera fini. Au revoir, Lucas.
 - Au revoir, patron.
La main de Lucas s'attarda une seconde dans la main rugueuse de Maigret
 - Prenez garde quand même, dites!
Et Maigret, debout, de prononcer à voix haute : 
 - J'ai horreur des couillons!
Il s'éloigna tout seul, à pied. Il avait le temps, puisqu'il ne savait même pas où il allait.

Mais aussi parce que cette nouvelle écrite en 1934 (au tout début, donc) se passe après la retraite du commissaire.

Et le voilà forcé de quitter ses campagnes pour aider son neveu (policier, lui aussi) coincé dans une sombre affaire de meurtre.

Maigret 19/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Avant d'ouvrir les yeux, Maigret fronça les sourcils, comme s'il se fût méfié de cette voix qui venait lui crier tout au fond de son sommeil :
- Mon oncle !...
Les paupières toujours closes, il soupira, tâtonna le drap de lit et comprit qu'il ne rêvait pas, qu'il se passait quelque chose puisque sa main n'avait pas rencontré, là où il eût dû être, le corps chaud de Mme Maigret.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Avant d'ouvrir les yeux, Maigret fronça les sourcils, comme s'il se fût méfié de cette voix qui venait lui crier tout au fond de son sommeil :
- Mon oncle ! ...
Les paupières toujours closes, il soupira, tâtonna le drap de lit et comprit qu'il ne rêvait pas, qu'il se passait quelque chose puisque sa main n'avait pas rencontré, là où il eût dû être, le corps chaud de Mme Maigret. Il ouvrit enfin les yeux. La nuit était claire. Mme Maigret, debout près de la fenêtre à petits carreaux, écartait le rideau cependant qu'en bas quelqu'un secouait la porte et que le bruit se répercutait dans toute la maison.
- Mon oncle ! C'est moi...

Ils sont tous morts

Tout ça pue, c’est crade, aucun but ni aucun sens, de l’alcool, de la drogue, du sexe, du fric… Juste ici et maintenant. Une descente à la Trainspotting version Suisse-romande et départ pour la Thaïlande façon enfers.

Cynthia tend l'oreille quelques instants, puis, rassurée, elle devient très câline. Elle promène ses mains sur mes cuisses et me couvre de baisers. J'angoisse. Elle m'embrasse carrément, glisse ses doigts dans ma bouche, me pelote le paquet. Je saisis le whisky, en bois une bonne rasade pour me calmer un peu. Je suis terrorisé à l'idée que son mec surgisse, mais trop fier pour l'avouer, j'invoque l'amitié. La Vénus s'en fout, sa respiration s'accélère, son halètement est obscène. Tétanisé, je la laisse faire ce qu'elle veut de mon corps, impossible de la repousser, pas moyen de participer. Je bois, je bois vite et beaucoup. En moins d'une demi-heure, j'ai torché la bouteille.
Ils sont tous morts de Antoine Jaquier

Un livre pour des mains averties qui souhaitent se frotter au vide d’une bande de copains fumeurs de joints qui réussissent leur coup pour foirer leurs vies.

Je n'arrive pas à situer le moment où tout a basculé. En regardant la vue depuis notre terrasse, je constate, étonné, la présence des baigneurs. Ces derniers n'ont sans doute jamais quitté le paysage. Je sors d'un mois de rêve éveillé et le réveil est pénible, le cauchemar continue.

Un premier roman luisant comme une flaque de vomi et sordide comme une liasse de billets de banques.

Nous sommes sales et ce n'est pas par manque de moyens. Ici, des petites mains se proposent de laver nos vêtements pour un franc le kilo de linge sale. C'est juste notre crasse intérieure qui suinte à la surface. À cet instant d'ailleurs, nous suons comme des porcs.
Manu ayant déjà vomi dans le petit avion, il se contente maintenant de perdre connaissance devant des dizaines de passants.

Jack, des joints et ses potes… Ils sont tous morts

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
- Selon vous, qui de Dieu ou du diable est le plus puissant? demande Manu en passant le tuyau.
L'ambiance autour du narguilé est si intime, si oppressante, que l'on pourrait croire qu'en dépit du bon sens, la réponse de Stéphane va révolutionner deux mille ans d'inepties.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Campagne vaudoise, crépuscule des années 80. L'adolescence de Jack et ses potes se consume au rythme des bières et des mégots de joints. Des potes et des joints, il ne restera bientôt que des cendres. Ils sont tous morts, tués par les illusions de l'argent facile, par les mirages thaïlandais, par les différentes nuances de blanche et par la silhouette furtive d'une âme soeur. L'anesthésie se généralise, de la tête au coeur, et l'âme flotte, se dissipe, puis se rend

Sans preuve & sans aveu

Peut-on lire Jaenada seulement pour son écriture ? Oui ! (enfin, si on supporte les parenthèses !)

Il faut passer aux choses sérieuses. (Une dernière remarque (deux) à propos de l'ADN (je suis débordé de trucs à dire, c'est la pagaille) : les techniciens en investigations criminelles ont essayé d'en prélever le plus possible dans la maison de Marie. Ils n'ont pas trouvé grand-chose - seulement le plus évident et facile à identifier, dans les échantillons de sang, les cheveux et poils, la salive (sur les mégots); ailleurs : rien. Mais en 2004, les méthodes de prélèvement et d'analyse de ce qu'on appelle l'ADN de contact n'étaient pas encore au point, c'était la préhistoire.
Sans preuve & sans aveu de Philippe Jaenada

Mais en plus, ses romans (enquêtes, essais ?) sont passionnants. Et c’est avec un talent plein de cynisme, d’humour, de second degré, de sérieux, de minutie et de travail (oui, vraiment beaucoup de travail (impossible autrement)) qu’il s’attelle à ses sujets.

Après avoir poli, lissé, verni, blindé leur témoin principal (unique), il ne restait plus aux gendarmes et aux juges d'instruction qu'à faire tomber ce qui lui faisait face : l'alibi d'Alain Laprie - pour l'accuser en négatif, puisque le positif, la recherche de preuves, n'a pas fonctionné. J'ai oublié une autre tentative infructueuse (il y en a eu tellement, il y a tellement de choses à écrire (et je me précipite peut-être un peu) que j'en ai laissé en route et ça se bouscule à la fin (heureusement qu'on a inventé les parenthèses))

Un bémol ? Souvent il en fait trop ! (Est-ce un reproche ? Serait-ce possible de faire tout ce travail au rabais ? Non, clairement) Mais ici, non, Philippe est presque sobre. Certes, dans cette affaire les personnages sont nombreux, mais vite on se retrouve portés par son verbe et son art de conteur.

Et le fond ? L’affaire ?

L’invraisemblable sentiment d’assister à un procès de guignol, une gendarmesquerie, un déni de justice

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Il faut que j'écrive vite, on ne m'en voudra pas (non) : la littérature, parfois, tant pis. (Au placard, digressions et parenthèses !) Il faut que j'écrive vite en croisant les doigts - c'est très difficile - pour toucher quelques personnes, qui peut- être en alerteront d'autres (on va dire que je me prends pour un justicier ou je ne sais quoi, que mes livres me sont montés à la tête, que je pars en sucette et sors de mon rôle : tant pis), car pendant que je fais des phrases, un homme fermente dans une cellule, un homme qui ressemble à mon voisin du cinquième, au pharmacien du coin de la rue ou au plombier de ma mère et que je crois aussi innocent que ma mère et son plombier réunis - mais peu importe ce que je crois. Les pages qui suivent ne serviront peut-être à rien, mais je ne m'imagine pas ne pas les écrire, donc voilà.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
L'incompréhension et l'indignation. Philippe Jaenada a été saisi de ces sentiments au spectacle de l'injustice flagrante qui, en juin 2021, a condamné à quinze ans de prison un homme de soixante-six ans sans aucune justification avérée. Il a tenu à écrire dans le détail le cheminement de cette instruction longue et litigieuse qui a conduit à une décision inacceptable

Le couple et l’argent : pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes

Dans Le siècle des égarés, Julia de Funès affirme que : « Chercher à prouver que la femme, le racisé, l’homosexuel est égal à l’homme blanc hétérosexuel n’a plus aucune pertinence en France en 2022. »

Titiou Lecoq démontre ici brillamment que sur ce point, tout n’est pas aussi clair que ça. Que les inégalités sont insidieuses, que les lois sont parfois perverses, que leur application peut être retorse et que finalement, si ! Il est pertinent et même fondamental de se pencher là dessus !

En France, entre 1998 et 2015, l'écart de patrimoine entre les femmes et les hommes est passé de 9% à 16%.
Il a quasiment doublé.
Alors que l'on s'attendait à ce que ces inégalités se résorbent avec le temps, il se produit l'inverse. Elles se creusent. Pour y mettre fin, il faut en prendre conscience.
Le couple et l’argent : pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes de Titiou Lecoq

Dans cet essai, nous suivons Gwendoline de sa naissance à sa retraite en passant par le célibat, la vie en couple, le mariage, des enfants et un divorce. Et à chaque étape, l’écart se creuse. De l’argent de poche à la pension, les inégalités sont flagrantes.

En résumé, elle est un être vivant.
Mais elle, elle pense qu'elle a des complexes.
Et que la meilleure manière de s'en débarrasser, ce n'est pas de s'accepter, mais de les éliminer.
Alors Gwendoline se lance dans une vaste guerre contre son corps, une guerre qui va durer toute sa vie.
Ce faisant, elle participe à quelque chose dont elle n'a sans doute pas conscience, un immense marché économique. Le marché économique de la féminité.

Un livre comme un état des lieux (certainement pas exhaustif et purement économique) des inégalités (légales, sociales, familiales, éducationnelles…) économiques au détriment des femmes.

Gwendoline a vieilli.
Elle va enfin pouvoir s'arrêter de courir et profiter un peu.
Elle prend sa retraite.
Mais les inégalités économiques qui l'ont suivie toute sa vie explosent avec l'âge.
À ce stade, les femmes ont moins gagné en salaire, elles ont accumulé moins de patrimoine, elles ont moins hérité et elles ont moins épargné et investi. Brusquement, Gwendoline voit bien le rapport entre les heures de travail ménager gratuit qu'elle a fait et les heures de travail salarié qui lui ont manqué pour cotiser.
Elle regarde une nouvelle fois ses mains. C'est combien de lessives, une vie? Une vie de femme? Avec une famille de quatre personnes, puis ses parents âgés dont elle s'est occupée? Si elle avait touché 1 euro par lessive faite...

Avec une conclusion en forme de check-list et des questions à se poser au cours des différentes étapes de la vie (et franchement, ça vaut le coup d’oeil… tout comme les petits caractères des contrats d’assurance)

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Les hommes sont plus riches que les femmes. Ce constat se retrouve partout, a l'échelle de la société comme à celle de la famille.
Et pourtant, longtemps, il ne m'a pas intéressée. J'ai travaillé sur les violences sexuelles, les féminicides, la parentalité, le domestique, l'effacement des femmes dans l'Histoire.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Les hommes sont plus riches que les femmes.

Dès l'enfance, les garçons reçoivent plus d'argent de poche que les filles. Adultes, à poste égal, les femmes sont moins bien payées que les hommes. Et le couple accentue encore les inégalités : au cours de la vie à deux, l'écart ne cesse de se creuser, sans que ni l'une ni l'autre ne s'en rende compte. Ou bien préfère l'ignorer. Chaque fois, il y a des explications et une combinaison de "bonnes raisons" mais le tableau général est accablant. J'écris depuis des années sur les violences sexuelles, le travail domestique, l'invisibilisation des femmes.

Il était temps que je m'intéresse à ce qui est souvent plus tabou que la vie sexuelle : l'argent. »

Avec un talent rare pour la pédagogie, Titiou Lecoq décortique les statistiques les plus récentes. Elle convoque l'historienne Michelle Perrot, des économistes, une conseillère en gestion de patrimoine, des banquières, sa mère et même des arnaqueuses. Son ton mordant fait le reste.

On tourne les pages avec étonnement et parfois colère. Mais Titiou Lecoq propose aussi des solutions simples qui peuvent tout changer

Maigret chez le ministre

Appelé au secours en toute discrétion par un ministre pris dans un traquenard, Maigret va devoir se mêler des jeux de pouvoirs au milieu des journalistes et sous la pression de l’impatiente opinion publique.

Il n'osait pas, tout de suite, poser ces questions-là. Il avait devant lui un homme effondré et il sentait que ce n'était pas par faiblesse. En le regardant, Maigret était pénétré d'un sentiment complexe, fait d'écœurement et de colère, de découragement aussi.
Une fois dans sa vie, il s'était trouvé dans une situation similaire, encore que moins dramatique, et c'était venu aussi d'une affaire politique. Il n'y était pour rien. Il avait agi exactement comme il devait le faire, s'était conduit, non seulement en honnête homme, mais selon son strict devoir de fonctionnaire.
Il n'en avait pas moins eu tort aux yeux de tous ou de presque tous. Il avait dû passer devant un conseil de discipline et, comme tout était contre lui, on avait été obligé de lui donner tort.
C'est à cette époque-là qu'il avait quitté momentanément la P.J. et s'était vu exilé pendant un an à la Brigade mobile de Luçon, en Vendée, justement, le département que Point représentait à la Chambre.
Maigret chez le ministre de Georges Simenon

Et il aime pas ça, le Jules ! Mais voilà, il va bien falloir qu’il s’y coltine !

Une main toucha doucement son épaule en même temps qu'une voix soufflait à son oreille :
 - Maigret ! Il est sept heures.
L'odeur de la tasse de café que sa femme tenait à la main lui montait aux narines. Ses sens et son cerveau se mettaient à fonctionner un peu à la façon d'un orchestre quand, dans la fosse, les musiciens essaient leurs instruments. Il n'y avait pas encore coordination. Sept heures, donc un jour différent des autres, car il se levait d'habitude à huit. Sans ouvrir les paupières, il découvrait qu'il y avait du soleil, alors que la journée de la veille avait été brumeuse.

Un bon Maigret, sans mort (tiens, c’est plutôt rare) dans lequel on apprend que le réveil du commissaire, c’est Madame et son café

Maigret 74/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le rapport de feu Calame
Comme toujours quand il rentrait chez lui le soir, au même endroit du trottoir, un peu après le bec de gaz, Maigret leva la tête vers les fenêtres éclairées de son appartement. Il ne s'en rendait plus compte. Peut-être, si on lui avait demandé à brûle-pourpoint s'il y avait de la lumière ou non, aurait-il hésité à répondre. De même, par une sorte de manie, entre le second et le troisième étage, commençait-il à déboutonner son pardessus pour prendre la clef dans la poche de son pantalon alors qu'invariablement la porte s'ouvrait dès qu'il posait le pied sur le paillasson.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Le commissaire Maigret est ici confronté à une sombre affaire politique - un monde qu'il n'a jamais aimé. Un sanatorium pour enfants s'est écroulé par suite d'un glissement de terrain, causant des dizaines de morts. Peu de temps après le drame, la rumeur court qu'un rapport technique avait nettement mis en garde les pouvoirs publics contre le danger. Ce rapport a été remis à Auguste Point, nouveau ministre des Travaux publics, mais le document lui a été volé la nuit suivante. Ses adversaires politiques l'accusent déjà de l'avoir fait disparaître afin de protéger les responsables du désastre. Il fait officieusement appel à Maigret pour retrouver le rapport. Parlementaires corrompus, presse de chantage, cynisme des puissants...

Le commissaire explore de sinistres coulisses. Ce tableau de mœurs n'a pas vieilli, et le drame d'Auguste Point - un homme intègre, dévoué à son pays, légèrement naïf et piégé - rappellera aux lecteurs des affaires plus récentes

Maigret et le tueur

Encore un excellent Maigret ! Décidément les derniers écrits me semblent tellement plus riches que les premiers !
Dans cette enquête on retrouve l’amour de de l’auteur pour Paris et ses canaux, ses péniches, ses quartiers et ses petites ruelles.

Maigret n'avait pas encore vu la sœur du mort, que la famille appelait Minou, et qui, paraît-il, avait de curieuses fréquentations.
Les trains de péniche glissaient lentement sur la Seine grise et les remorqueurs baissaient leur cheminée au moment de passer sous le pont Saint-Michel.
Maigret et le tueur de Georges Simenon

Une enquête avec un petit twist qui débouche sur un tueur fort attachant ?!? Car oui, Maigret ne juge généralement pas, il laisse ce soin à la justice.

Ils avaient beau avoir une voiture depuis un an - que Maigret n'avait jamais conduite -, Mme Maigret préférait s'en servir le moins possible dans Paris. Ils l'utilisaient surtout, le samedi soir ou le dimanche matin, pour gagner Meung-sur-Loire où ils avaient leur petite maison.
Quand je prendrai ma retraite...
Parfois on pouvait croire que Maigret, pressé de la prendre, comptait les jours. D'autres fois, on sentait chez lui une certaine panique à la perspective de quitter le Quai des Orfèvres.
Jusqu'à trois mois plus tôt, l'heure de la retraite, pour les commissaires, était de soixante-cinq ans et il en avait soixante-trois.

Un roman qui m’a pas mal fait rire (jaune) aujourd’hui, alors que toute la France revendique la conservation des acquis sociaux sur les retraites. A deux ans de la retraite, Maigret apprend qu’il va écoper de trois ans de malus. Bim ! (Et personne ne moufte ?)

Un nouveau décret venait de tout changer et de porter cette retraite à soixante-huit ans...
Dans certaines rues, le brouillard était plus épais que dans d'autres et les voitures roulaient lentement, une auréole autour de leurs phares.

Un polar avec des voleurs de tableaux, un psychopathe au couteau, une famille richissime, une serveuse amoureuse, Madame Maigret (qui conduit la voiture !), des sandwiches et des bières…

Maigret 98/103

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Pour la première fois depuis qu'ils dînaient chaque mois chez les Pardon, Maigret devait conserver de cette soirée boulevard Voltaire un souvenir presque pénible.
Cela avait commencé boulevard Richard-Lenoir. Sa femme avait commandé un taxi par téléphone, car il pleuvait, depuis trois jours, comme, selon la radio, il n'avait pas plu depuis trente-cinq ans. L'eau tombait par rafales, glacée, vous fouettant le visage et les mains, collant les vêtements mouillés au corps.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Antoine Batille a-t-il payé de sa vie - sept coups de couteau - sa curieuse habitude d'enregistrer au magnétophone les conversations d'inconnus? De fait, l'écoute de la dernière bande livre très vite à la police une équipe de voleurs de tableaux.
Mais pourquoi l'assassin n'a-t-il pas dérobé cet enregistrement compromettant? Et quel est l'inconnu qui téléphone à Maigret, indigné que les journaux accusent les trafiquants de ce meurtre?
C'est chez lui, boulevard Richard-Lenoir, que le commissaire Maigret entendra la confession de l'assassin. Une confession à la fois pathétique et dérisoire, qui lui révèle le drame de toute une vie...