Noyade

Voilà clairement le livre le plus américain d’une autrice suisse que j’ai pu lire.

OK, Pour le côté ricain, le livre se passe au États-Unis et la riche famille Haynes qui se prélasse au bord de la piscine donnent immédiatement un ton à la Bret Easton Ellis (la coke en moins), ou alors une famille à la Meet Joe Black (les névroses en plus). Mais il y a plus que ça. L’écriture, le style et récit très scénarisé, quasi cinématographique qui navigue constamment entre différentes périodes brosse un tableau très étasunien de cette famille dysfonctionnelle.

Elizabeth suit des yeux le saladier, qui passe de main en main avec une lenteur accablante. Si elle avait organisé ces festivités, famille ou pas, jamais il ne lui serait venu à l'esprit de procéder ainsi. Ce chaos l'exaspère. Les plats s'entrechoquent, partent dans des directions opposées, sont reposés au centre de la table avant que chacun ait pu se servir. Quant aux convives, qui tachent la nappe et laissent des portions inégales, ils se servent sans aucune délicatesse. Il y a trop de choix, pour ne froisser personne, et le contenu des assiettes révèle des obsessions diététiques qu'Elizabeth juge absurdes.
Noyade de Céline Spierer

Une très belle réussite que cette noyade dans une famille étouffée par les secrets et les non-dits

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Dans la lumière déclinante de l'après-midi, les gouttes d'eau, brièvement suspendues dans l'air, prennent l'apparence de minuscules perles étincelantes. Une série d'empreintes de pieds humides, en bordure de la piscine, s'évapore lentement sous la chaleur de juillet. Depuis la terrasse résonne le tintement des couverts contre les assiettes, des chaises qu'on déplace.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les enfants Haynes et leurs conjoints sont réunis autour d'Elizabeth, la matriarche charismatique. En apparence, la dynastie incarne la success-story américaine. Mais à vouloir se conformer à cette image de réussite, ils se sont enfermés dans des rôles de composition. Combien de temps pourront-ils encore taire leurs mensonges et leurs trahisons sans en payer le prix ? Accepteront-ils de tomber les masques dès lors qu'une tragédie les frappe ?

Mémoire de soie

Ça commence comme un roman du terroir, avec des belles grosses phrases comme on en fait plus trop, avec des adjectifs qui font joli et tout et tout… Ça continue aussi un peu comme ça, finalement, même si ça devient vite assez méchant.

La proposition de mariage est arrivée comme toute autre nouvelle, par courrier et rédigée par un autre. Baptistin n'apprendrait pas à écrire dans ce foutoir, il n'avait pas su le faire à l'école. Il savait à peine déchiffrer. Il n'a d'ailleurs rien dit de particulier quand Suzanne lui a lu l'ordre de mobilisation générale affiché sur la place du village ce jour-là. 2 août 1914, Suzanne n'était arrivée que depuis deux mois et demi. C'est donc la guerre. Comme valsent les tourments, comme valdinguent les espoirs. C'est donc la guerre.
La vacherie pleine et goulue.
Mémoire de soie de Adrien Borne

Une sale histoire avec deux frères héritiers d’une magnanerie et une salope de mère. Et Suzanne qui se marie avec un des deux qui meurt a se démobilisation de la grippe espagnole.

Une magnanerie de l’époque

Une vache d’époque, où la vie ne compte pas bien plus que ce qu’il faut pour la nourrir. Un époque où on s’arrange, parce qu’il faut bien.

Un roman du terroir bien noir, empêtré dans les ressentiments, les inavouables non-dits… les secrets de famille

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
La lumière suinte et dessine autour du volet un liséré clair. Elle reste le plus sûr repère. Celui de la course du soleil. Émile souligne des yeux la marque blanche, tirant sur un jaune léger, elle court jusqu'à sa table de chevet, ne l'atteint pas encore, semble vouloir l'épargner. Il a vingt ans ce 9 juin 1936.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Ce 9 juin 1936, Émile a vingt ans et il part pour son service militaire. C'est la première fois qu'il quitte la magnanerie où étaient élevés les vers à soie jusqu'à la fin de la guerre. Pourtant, rien ne vient bousculer les habitudes de ses parents. Il y a juste ce livret de famille, glissé au fond de son sac avant qu'il ne prenne le car pour Montélimar. À l'intérieur, deux prénoms. Celui de sa mère, Suzanne, et un autre, Baptistin. Ce n'est pas son père, alors qui est-ce ? Pour comprendre, il faut dévider le cocon et tirer le fil, jusqu'au premier acte de cette malédiction familiale.

Ce premier roman virtuose, âpre et poignant, nous plonge au coeur d'un monde rongé par le silence. Il explore les vies empêchées et les espoirs fracassés, les tragédies intimes et la guerre qui tord le cou au merveilleux. Il raconte la mécanique de l'oubli, mais aussi l'amour, malgré tout, et la vie qui s'accommode et s'obstine.

L’origine de la violence

Voilà un livre avec tellement d’entrées qu’il est difficile d’en choisir une. Une histoire de fils illégitime, de filiation, sur la Shoah, sur la guerre ou la jalousie entre deux frères ? La violence ou l’histoire d’une irrésistible passion ?

Virginie n'a jamais voulu être belle pour moi. Jamais. Je ne dis pas qu'elle ne m'a pas aimé, je ne le pense pas du tout, je te dis simplement qu'elle n'a jamais voulu être belle pour moi. C'est tout. Peut-être parce que je n'étais pas beau, peut-être parce qu'elle me savait conquis pour l'éternité, peut-être parce que nos relations n'étaient pas physiques. Elle m'aimait pour autre chose pour une sécurité, une confiance, beaucoup de choses importantes. Moi je suis le médecin de campagne, je suis Charles Bovary, pas le bellâtre Rodolphe, enfin bon je ne sais pas si les références littéraires aident parce que Charles Bovary quand même, j'ai tout de même été préfet, je ne suis pas rien, je ne suis pas un médecin raté dans un bled, pourquoi cette comparaison ? Bizarre de se comparer [...]
L’origine de la violence de Fabrice Humbert

Et c’est peut-être là que réside la beauté du titre : la violence nazie de la Shoah, ultime. Mais aussi la violence de la passion, de l’amour, de la jalousie, de la vie, des non-dits et des secrets de famille. La violence qui frappe mais aussi la violence reçue.

Une fois qu'elles vous ont serré, ces mains ne s'écartent jamais. La peur ne vous abandonnera jamais, pas plus que la violence. Vous demeurerez toujours l'enfant terrifié - et donc l'adulte blessé, agressé, violent. Vous aurez beau ensevelir la peur, l'entourer d'un corps de marbre et d'acier, elle ne vous quittera pas. Le mal est sans remède.

Un roman (ou une auto-fiction ?) d’une grande profondeur à la narration brillante, pleine d’humanité et de sensibilité

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Lors d'un voyage scolaire en Allemagne, un jeune professeur découvre au camp de concentration de Buchenwald la photographie d'un détenu dont la ressemblance avec son propre père le stupéfie et ne cesse de l'obséder. Ce prisonnier, David Wagner, est en fait son véritable grand-père. Peu à peu se met en place l'autre famille, la branche cachée, celle dont personne chez les Fabre n'évoque l'existence...

Au cours de sa quête, le jeune homme comprend qu'en remontant à l'origine de la violence, c'est sa propre violence qu'on finit par rencontrer...

Des sirènes

N’attend-t-on pas trop souvent qu’il soit trop tard pour parler ? Mais alors, est-ce trop tard ?

J'ai obtenu une autorisation de sortie pour le jour anniversaire de ma mère. J'ai préparé deux gâteaux, L'un aux fruits, l'autre au chocolat, en espérant être à la hauteur des recettes de la cuisinière. Je les ai disposés sur des jolies assiettes, autour d'un bouquet de fleurs fraîches dans un vase, le paquet du cadre emballé à côté et je suis allée la chercher à l'hopital.
Des sirènes de Colombe Boncenne

La mère de la narratrice, co (est-ce une autobiographie ?) tombe malade, une leucémie. L’occasion de se rapprocher, de parler, de mettre à jour ce qui s’était passé. Le grand-père, les gestes… les secrets de famille

Un livre très touchant sur l’importance de dire avant de partir, avant qu’il ne soit trop tard. Les mots qui soulagent, réconfortent, soignent et relient

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je revenais de chez Farell. Nous nous étions rencontrés trois ans auparavant, lors d'un festival de documentaires. j'y présentais mon travail sur Clipperton, l'île déserte de possession française appelée île de la Passion, premier volet d'une série que je comptais réaliser sur les îles.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
La narratrice accueille sa mère malade chez elle. Cette cohabitation est l'occasion d'exhumer un secret concernant l'abus qu'ont subi les femmes de sa famille. La jeune femme est soutenue par Farell, son amoureux canadien, et Selma, une aventurière qui la fascine

Je ne veux pas être jolie

Au décès de sa mère, Georgia se reveille. Non, elle ne l’aura pas aidée, jusqu’au bout, rien ! Pas un mot, pas un soutien.

Alors les secrets et les oublis ne tiennent plus, ce n’est plus possible, les cris et les douleurs enfouies doivent sortir, elle doit être entendue. Mais que vont en faire sa soeur, son frère et son amant ?

Je ne veux pas être jolie de Fabienne Périneau

Un livre très bien construit, qui commence sans trop en dire et qui m’a laissé choqué, stupéfait

Une femme seule avec sa douleur et sa colère

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
«Tout le monde m'appelle Jo. Mon frère, ma sœur, mon oncle, ma tante.
Je déteste.
Jo, c'est un raccourci pour ne pas flâner en chemin, c'est le dernier des frères Dalton, un boxeur, un chien, mais ce n'est pas Georgia.
Pour aller vite, ma mère aussi m'appelle Jo. Georgia, c'est trop long à dire, et il y aurait tant à dire.
"Jo, mets ta chemise ? Tu es très jolie, avec."
Ça aussi je déteste.
Si j'avais pu ne pas être jolie, rien, peut-être, ne serait arrivé.»

Georgia aurait dû rester, pleurer. Pleurer sa mère. Cette mère dont elle a attendu, espéré, pendant plus de trente ans, un geste, un mot. Cette mère pour qui aujourd'hui elle revient à l'Hôtel du Bord des vagues où justement tout est arrivé. Elle rejoint sa famille qui ne sait rien. Mais voudra-t-elle seulement savoir ?
Un roman puissant et lumineux à l'image de son héroïne, empreint de justesse et d'émotion

La familia grande

Un viol, un inceste ou un abus sur un-e enfant est plus qu’un crime. C’est une saloperie qui va marquer une vie, des vies même, des familles entières. Les broyer de noir, de colère et de culpabilité.

La familia grande de Camille Kouchner

Un livre remarquable qui décrit la lente destruction d’une familia grande, une nomenklatura bobo intello de gauche dans laquelle tout semblait permis, joyeux et festif…

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
C'est le récit incandescent d'une femme qui ose enfin raconter ce qui a longtemps fait taire la familia grande

L’appel de Portobello road

Des fois, on passe à côté, on se dit qu’il faudrait laisser une chance, un doute… Mais même, je n’ai pas trouvé grand chose dans ce petit livre, si ce n’est une couverture séduisante.

L'appel de Portobello road de Jérôme Attal
L’appel de Portobello road de Jérôme Attal

Dommage, les parents décédés de Ethan qui l’appellent pour dire qu’ils pensent à sa sœur tous les jours alors qu’il se croyait fils unique… Voilà un joli point de départ pour une quête aux milles espérances. Mais non, ce petit livre s’essouffle bien vite.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
En pleine nuit, Ethan reçoit un appel téléphonique étrange. Au bout du fil, il reconnaît la voix de ses parents disparus depuis deux ans. Après avoir pris de ses nouvelles, sa mère raccroche sur ces mots : « Dis à ta soeur qu'on pense à elle tous les jours. » Le problème, c'est qu'Ethan est fils unique.
C'est le début d'une folle aventure.

Un secret de famille tombé du ciel. Un compositeur de chansons. Des nuits parisiennes et le vacarme de la solitude. Une décision à prendre. Une fille au bout de la route. Deux pom-pom girls originaires de Tchéquie. Une fête monstre sur la route de Mons. Une tarte au riz partagée avec le fantôme d'une star du rock. De la porcelaine anglaise. Comme est la vie. Fragile et robuste à la fois. Et une ode à l'amour au tournant de chaque page

Noces de sel

La chronique d’une mort annoncée, un peu pompeuse, terroir et myriflamboyaexatatique.

Noces de sel de Maxence Fermine
Noces de sel de Maxence Fermine

Aaaah, l’amour, l’amour…

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Si tu ne t'enfuis pas à tout jamais de cette ville, ton sang se répandra bientôt sur le sable. Tu as vécu un seul amour, un bel amour, et tu n'en connaîtras jamais d'autre. »

Le nouveau roman de l'auteur de Neige possède la beauté rouge et or des tragédies antiques.

À Aigues-Mortes, où l'on vit du sel, de la vigne ou des arènes, le ténébreux Valentin Sol, face au taureau, est le meilleur des « raseteurs ». Depuis toujours, il aime la fille du boulanger, la blonde Isoline, dont le père s'oppose mystérieusement à leur mariage.

À trois heures de l'après-midi, sous le soleil implacable de la Camargue, le destin des amants va se jouer. Inexorable

Féroces

K.O.!
Féroces de Robert Goolrick m’a laissé complètement groggy!

Féroces de Robert Goolrick
Féroces de Robert Goolrick
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Les Goolrick étaient des princes. Et tout le monde voulait leur ressembler.

C'étaient les années 50, les femmes se faisaient des coiffures sophistiquées, elles portaient des robes de taffetas ou de soie, des gants et des chapeaux, et elles avaient de l'esprit.

Les hommes préparaient des cocktails, des Gimlet, des Manhattan, des Gibson, des Singapore Sling, c'était la seule chose qu'ils prenaient au sérieux. Dans cette petite ville de Virginie, on avait vraiment de la classe, d'ailleurs on trouvait son style en lisant le New Yorker.

Chez les Goolrick, il y avait trois enfants, tous brillants. Et une seule loi : on ne parle jamais à l'extérieur de ce qui se passe à la maison. À la maison, il y avait des secrets. Les Goolrick étaient féroces