Blast

Un homme, obèse à la dérive. A la recherche du blast, le flash de lumière et de couleur, l’instant de contact avec l’univers et la conscience universelle. Une dérive dans le caniveau, la foret, les drogues, l’alcool, la violence et les barres chocolatées

Blast de Manu Larcenet

Un livre sur la descente en folie

Le tout sur le fond d’une enquête et de meurtres à élucider face au coupable idéal

Un chef d’oeuvre, noir et lumineux comme un oxymore sans contradiction

Quatre tomes : Grasse carcasse, L’apocalypse selon Saint Jacky, La tête la première, Pourvu que les Bouddhistes se trompent

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
1 : Un homme seul, obèse et sale est amené au commissariat. Au cours de l'interrogatoire, il livre sa vie et explique comment il a, un jour, lâché prise, et est parti sur les routes à la recherche du Blast, cet instant magique où tout s'illumine et où la vie devient parfaite

2 : Je mens, Je mens toujours. Je dis que je ne me souviens de rien, que je suis né du matin, Je dis que je comprends, qu'à votre place, sans doute, j'aurais ri aussi. Je mens pour un peu de repos, d'indulgence, pour le pardon de ma dissemblance, Je mens aussi pour ne pas vous massacrer à mon tour.
Je mens toujours car, en réalité, je me souviens de tout

3 : Je pèse deux hommes.
L'un vous aime tant qu'il vous léchera la main pour l'aumône d'une caresse. Il fera où vous lui direz, demandera la permission, courbera le dos sous la trempe, pourvu que vous lui accordiez une place près de vous.
Un homme-chien. L'autre, sans trêve ni repos, depuis toujours, n'a d'autre obsession que de vous faire baisser les yeux.
Puis de les crever

4: Un vent lourd, puant suie et cadavre, gronde sur la route et me glace. L'orage approche. Je ne cherche aucun abri, il n'en existe pas à ma taille. Je claudique au bord du chemin, ivre comme toujours, dans l'espoir que la distance entre nous se réduise, que nos peaux se touchent enfin.
Sali, battu, hagard, je repousse le moment où, le souffle court et les pieds meurtris par de mauvaises chaussures, je devrai m'arrêter. Serai-je encore assez vivant pour repartir ?

Le rapport de Brodeck

Lu après la sublime adaptation en BD par Larcenet… Quel choc !

Il est difficile de reprendre son souffle après une telle lecture. Magnifique et pourtant d’une noirceur abyssale.

Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel

Un livre sur les pires vomissures dont les hommes sont capables, sur la guerre et la haine de l’autre, les fascismes, les compromissions et les exactions.

Mais aussi par effet de miroir, un conte sur la beauté simple de l’amour qui tente sans jamais perdre espoir, de survivre dans toute cette saleté.

Bouleversant

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je m'appelle Brodeck et je n'y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache.

Moi je n'ai rien fait, et lorsque j'ai su ce qui venait de se passer, j'aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu'elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer.

Mais les autres m'ont forcé : "Toi, tu sais écrire, m'ont-ils dit, tu as fait des études." J'ai répondu que c'étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d'ailleurs, et qui ne m'ont pas laissé un grand souvenir. Ils n'ont rien voulu savoir : "Tu sais écrire, tu sais les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire les choses. Ça suffira. Nous on ne sait pas faire cela. On s'embrouillerait, mais toi, tu diras, et alors ils te croiront." »

Anne-Marie la Beauté

Dans un monologue destiné à la scène, Anne-Marie la Beauté se souvient de Gigi, Gisèle Fayolle, comédienne contemporaine… ayant visiblement mieux réussi qu’elle sa carrière cinématographique.

Anne-Marie la Beauté de Yasmina Reza

Une petite vieille qui se rend à la cérémonie du décès de sa rivale et amie. Touchante

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Elle s'enduisait de la vieille crème de huit heures d'Elizabeth Arden. Tu pues le camphre Gigi, je disais. Elle répondait c'est un aphrodisiaque, la pauvre
Au temps du Théâtre de Clichy, j'étais sa seule amie. Les autres étaient jalouses
Les hommes tournicotaient comme des mouches. Elle tombait amoureuse plusieurs fois par mois. À vingt-trois ans elle s'est trouvée enceinte. Pendant deux jours on s'est cassé la tête pour savoir quoi faire et puis elle a dit, allez hop je le garde. Ça ne l'intéressait pas de connaître le père : de toute façon il me fera chier

Cadavre exquis

Quel enfer ! Voila un livre brillant dont on ne sort pas indemne, un livre choc qui rappellera (il le cite d’ailleurs) le film Soleil vert de Richard Fleischer. Et là, rien n’est épargné au lecteur de la visite d’un abattoir-boucherie de chair humaine à la chasse, la dégustation de doigts, de rognons ou de cervelle… Le tout dans un climat totalitariste, déshumanisé et anxiogène.

Cadavre exquis de Agustina Bazterrica

C’est difficilement supportable et cela appelle inévitablement à une introspection sur sa propre consommation de viande et ses indissociables aveuglements – hypocrisies – cynismes – indécences…

Et au travers de ce livre… un homme blessé, une pierre dans le coeur et qui pleure son enfant perdu et son père malade

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un virus a fait disparaître la quasi-totalité des animaux de la surface de la Terre. Pour pallier la pénurie de viande, des scientifiques ont créé une nouvelle race, à partir de génomes humains, qui servira de bétail pour la consommation. Ce roman est l'histoire d'un homme qui travaille dans un abattoir et ressent un beau jour un trouble pour une femelle de « première génération ». Or, tout contact inapproprié avec ce qui est considéré comme un animal d'élevage est passible de la peine de mort. À l'insu de tous, il va peu à peu la traiter comme un être humain.

Le tour de force d'Agustina Bazterrica est de nous faire accepter ce postulat de départ en nous précipitant dans un suspense insoutenable. Roman d'une brûlante actualité, tout à la fois allégorique et réaliste, Cadavre exquis utilise tous les ressorts de la fiction pour venir bouleverser notre conception des relations humaines et animales

Pas d’éclairs sans tonnerre

Une histoire simple, l’enfance et la jeunesse de Donald dans le Saskatchewann. La construction d’un jeune homme par tranches de vie à travers l’histoire de la terre.

Pas d’éclairs sans tonnerre de Jérémie Gindre

L’écriture simple, limpide et sans fioriture colle très bien à ce récit de vie au milieu de l’ouest canadien, chargé d’une histoire que Donald va déterrer… crânes, fémurs, pierres…

Une histoire à la poésie naturaliste des grands espaces

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Enfant - puis adolescent - dans les Prairies, Donald est un garçon obstiné qui veut comprendre d'où il vient. Pousse par un instinct archéologique, il n'aura de cesse d'explorer le territoire environnant, à la recherche du pourquoi des choses. Gravures rupestres, cimetière de bisons ou rituel sur une montagne sacrée, les découvertes du jeune homme donnent vie au passé des grands espaces de l'Ouest canadien.

Jérémie Gindre réinvente ici le nature writing avec un style fort et drôle, donnant à ressentir autant qu'à comprendre l'univers de Donald.

« Chaque fois qu'une portion de la fosse était dégagée, un orage venait remplir leurs trous d'une pâte de sable et de brindilles. Il est difficile de comprendre comment ils ne se laissèrent pas décourager. »

Coconut

Coconut, un titre qui explique tout le livre, le racisme et le besoin d’appartenance, les envies naïves et la dureté du quotidien.

Coconut de Kopano Matlwa

Un journal de deux jeunes sud-africaines à Joburg post-apartheid, l’une plutôt aisée et l’autre issue d’un milieu bien moins favorisé, deux Coconut, noires dehors et blanches dedans…

Un livre un peu plat, lancinant… Mais où est la vie quand s’en va l’espoir, insidieusement…

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Entre Ofilwe, jeune fille de milieu aisé, et Fikile issue de la pauvreté, il n'est qu'un point commun : ce sont des coconuts, des gosses noires dehors et blanches dedans. Nées bien après l'Apartheid, ces deux adolescentes par ailleurs très différentes vivent chaque instant du jour en espérant trouver dans le regard des autres le reflet de ce qu'elles pensent être.

Au fil d'un dimanche dans un restaurant chic, les dérives parfois naïves de la pensée de ces filles ne tarderont pas à les confronter aux aléas du désespoir. Mais peut-il en être autrement aux portes de l'enfance, dans un monde où les certitudes et le confort sont en voie de disparition ?

Minuit, Montmartre

La rencontre de Théophile Alexandre Steinlein et de Masseïda dans le Montmartre de la fin de la Belle Époque. Un atelier l’artiste et sa muse… et des chats.

Minuit, Montmartre de Julien Delmaire

Une bio romancée au style un peu lourd et à l’intrigue faiblichonne. Ou peut-être suis-je passé à côté d’une grande poésie sensuelle ?

L’occasion de rechercher et revoir les œuvres d’un anarchiste lausannois

Théophile Alexandre Steinlen – Affiche de la Tournée du Chat noir (1896), New Brunswick (New Jersey), Zimmerli Art Museum
4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Montmartre, 1909. Masseïda, une jeune femme noire, erre dans les ruelles de la Butte. Désespérée, elle frappe à la porte de l'atelier d'un peintre. Un vieil homme, Théophile Alexandre Steinlen, l'accueille. Elle devient son modèle, sa confidente et son dernier amour. Mais la Belle Époque s'achève. La guerre assombrit l'horizon et le passé de la jeune femme, soudain, resurgit...

Minuit, Montmartre s'inspire d'un épisode méconnu de la vie de Steinlen, le dessinateur de la célèbre affiche du Chat Noir. On y rencontre Apollinaire, Picasso, Félix Fénéon, Aristide Bruant ou encore la Goulue... Mais aussi les anarchistes, les filles de nuit et les marginaux que la syphilis et l'absinthe tuent aussi sûrement que la guerre.

Ce roman poétique, d'une intense sensualité, rend hommage au temps de la bohème et déploie le charme mystérieux d'un conte

Il fait bleu sous les tombes

Il y a des belles phrases, des belles pensées, de la tendresse et beaucoup d’amour dans ce livre qui parle d’un jeune qui saute d’un pont, de sa mère et de sa petite sœur (et un tout petit peu du père), de ses amis et de ses rêves.

Il fait bleu sous les tombes de Caroline Valentiny

Mais je n’ai pas réussi à m’accrocher à cette histoire qui m’a perdu, ne sachant trouver mon chemin et ne réussissant pas à me laisser guider… pour aller où d’ailleurs ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Enfant, lorsqu'il était en vie, il se couchait dans l'herbe, le soir, pour observer le ciel. Aujourd'hui, depuis son carré d'herbe étanche à la lumière, il a beau plisser les yeux, il ne peut plus rien voir. »

Jusqu'il y a peu, Alexis était vivant. À présent, il ne sait plus. Il perçoit encore la vie alentour, le bruissement des feuilles, le pas des visiteurs, et celui, sautillant, de sa petite soeur qui vient le visiter en cachette.

Il se sent plutôt bien, mais que fait-il là ? Il l'ignore. Ses proches n'y comprennent rien non plus. Quel est le mystère d'Alexis ? Qu'a-t-il voulu cacher à en mourir ?

Caroline Valentiny explore le clair-obscur de l'existence dans un premier roman d'une subtilité et d'une douceur impressionnante

Karoo

Un « écrivain » spécialisé dans la reprise de scénarios et d’adaptations pour le cinéma, père adoptif séparé de son épouse, gras et sévèrement névrosé, spectateur de sa vie, coincé dans une sorte de mise en abyme de lui-même, voguant dans une stase vaseuse…

Karoo de Steve Tesich

L’histoire d’un menteur procrastinateur autocentré

Un livre brillant, une oeuvre autour d’un anti-héros coincé dans sa propre histoire comme une limace dans un verre de bière

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Egoïste et cynique, Saul Karoo ment comme il respire et noie ses névroses familiales dans la vodka. Son métier, script doctor, consiste à dénaturer des chefs-d'oeuvre pour les aligner sur les canons hollywoodiens. Quand sa carrière croise celle de Leila Millar, une jeune actrice médiocre, il décide contre toute attente de la prendre sous son aile. Car ils sont liés par un secret inavouable...

Otages

Une lente descente au enfers. Mais à quel moment bascule-t-on ?

Otages de Nina Bouraoui

Ce livre à la construction très réussie pose la rupture comme point de départ, la prise en otage de son patron par une de ses employée. Mais était-ce le début ? Puis, au fil du récit, se dévoile une part sale de la violence des hommes, de leur besoin de dominer, de leur impunité. Et finalement, une question : qui sont les otages ?

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Pourquoi le destin s'acharne-t-il sur la comtesse Berdaiev ? Aristocrate très belle et très libre, elle appartient à la communauté des Russes blancs, ces exilés qui ont fui l'Union soviétique après la révolution de 1917. Personnalités fantasques et passionnées, minées par la nostalgie et songeant à des projets impossibles, ils ont du mal à trouver leur place dans une société française qui les regarde comme des vestiges anachroniques. Cherchant dans l'amour et dans l'étourdissement des plaisirs un remède à leur mal de vivre, partagés entre la misère et l'opulence, prêts à tous les expédients pour survivre, ils sont la proie de tous les faux donneurs d'espoir et surtout de leurs rêves. Déjà victime de l'Histoire qui l'a condamnée à l'exil et à la ruine, la comtesse Berdaiev va se trouver impliquée dans une affaire de moeurs éclaboussant le milieu politique dans les débuts ténébreux de la Ve République.

Librement inspiré du scandale des Ballets roses, ce roman renoue avec les thèmes chers à Jean-Marie Rouart : la passion amoureuse confrontée avec la brutalité du pouvoir, face à une société qui se veut toujours moralisatrice