Le clan des Ostendais

Alors qu’il a écrit des années 30 à 70, Simenon parle assez peu de la guerre, et ce, tant dans ses romans durs qu’avec Maigret. Ce clan des Ostandais, par contre, est en plein dedans, en pleine débâcle, même. Des familles de marins flamands fuyant la guerre qui arrivent en Belgique à bord de cinq bateaux. Coincés à la Rochelle, Simenon raconte leur cohabitation – difficile – avec les locaux et l’occupation allemande.

Comment s'arrangeaient-ils, là-dedans, on n'en savait rien. Il y eut quelques paysannes pour offrir leurs services :
 - Dank u... leur répondait-on plus sèchement.
Est-ce qu'ils avaient demandé à être là ? Avaient-ils sollicité la charité ? Ils s'en allaient tranquillement, par leurs propres moyens, pour fuir l'Allemand qu'ils avaient assez vu en 1914, et c'étaient les Français qui les empêchaient d'aller plus loin, parce qu'ils se croyaient plus malins que les autres, parce qu'ils s'imaginaient encore qu'ils al-laient arrêter la marée grise.
On ne se bat pas contre un mur et les règlements constituent le plus implacable des murs.
Le clan des Ostendais de Georges Simenon

Et comme presque toujours dans ses romans durs… une tension malsaine qui s’installe…

Un bon Simenon, plus socio que psychologique avec un personnage central tout en force tranquille

Le 56e roman dur de Simenon

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Comme une grosse mouche bleue bourdonne entre les murs blanchis à la chaux d'une cuisine vide, il n'y avait, dans les trois étages de bureaux déserts de la Préfecture, qu'un petit appareil noir, le téléphone, à vivre sa vie rageuse, à faire entendre sa sonnerie qui n'en finissait pas.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
En juin 1940, en pleine débâcle, alors que la bataille de France est déjà perdue et que les réfugiés se bousculent vers le sud, une flottille de cinq chalutiers venue des Pays-Bas arrive à La Rochelle.

A la tête de ces navires ayant bravé l'aviation et les mines allemandes se trouve Omer accompagné de ses fils. Ils ont mis meubles, femmes et enfants dans les cales et pris la mer en hommes libres qui ne céderont rien à l'occupant.

Leur place est sur la mer. Ils veulent travailler, ne parlent pas français et refusent la panique. Sans effort sinon celui d'être fidèles à eux-mêmes, mais avec un héroïsme certain, ces hommes vont résister. Ils en payeront le prix...

Les vieux fourneaux : Bons pour l’asile

Après un tome quatre qui ne m’avait absolument pas conquis, j’avais laissé tomber cette série. Pourtant, ce tome est très drôle, enlevé, nuancé, et bien qu’il parte dans tous les sens, il est très cohérent.

Les vieux fourneaux, tome 5 : Bons pour l’asile de Wilfrid Lupano, dessin de Paul Cauuet

Un épisode dans lequel les ultras se retrouvent confrontés à leurs propres limites

Une bande dessinée où humour et anarchie font très bon ménage

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Le rafiot arrive, je répète, le rafiot arrive. Tenez-vous prêts


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Retour à Paris pour Antoine, Mimile et Juliette. Le plan est simple : ramener Juliette auprès de sa mère, puis filer au Stade de France pour assister au match de rugby France-Australie. C'est du moins ce qui est prévu... Mais, désireuse de voir son père et son grand-père se rabibocher, Sophie les oblige à s'occuper ensemble de Juliette jusqu'au lendemain. Mimile ne peut donc compter que sur Pierrot pour l'accompagner au match. Or, Pierrot l'anarchiste mène un nouveau combat : il s'est engagé en faveur des migrants. Alors vous pensez bien qu'assister à un match opposant la France, qui refuse d'accueillir les migrants, à l'Australie, qui ne pense qu'à les entasser dans des camps, bafouant ainsi les droits de l'homme, c'est hors de question ! Mimile n'a plus pour seule compagnie que ses désillusions... Et si lui aussi était bon pour l'asile ?

Une maternité rouge

Une histoire complexe trop brièvement racontée tant les problématiques sont tentaculaires. Et pourtant, un dessin superbe ! L’histoire d’une statuette trouvée au Mali et apportée par un jeune migrant jusqu’au Louvre pour la protéger de l’obscurantisme islamiste.

Une maternité rouge de Christian Lax

Pourtant, cette co-édition du Louvre pose bien plus de questions que cette bande dessinée n’évoque. Les questions d’appropriation des biens, de restitutions des objets spoliés, des moyens existants pour permettre aux œuvres de rester dans leurs pays, de la bienveillance condescendante des musées occidentaux ne sont pas traités – ou trop brièvement – pour un sujet aux pareilles ramifications.

… Voilà donc une bande dessinée qui ressemble beaucoup à un livre publicitaire et qui me laisse bien dubitatif

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un jeune chasseur de miel malien, Alou, se dirige vers les ruches sauvages d'un baobab. Circulant en 4x4, armés jusqu'aux dents, des djihadistés foncent sur lui et font exploser l'arbre sacré.
Parmi les débris, Alou découvre, presque intacte, une statuette représentant une femme enceinte. Encouragé par son père, il se rend dans le pays Dogon pour la présenter au sage du village, le hogon, respecté de tous pour sa culture.
Le vieil homme reconnaît aussitôt cette Maternité rouge. Elle est l’œuvre, selon lui, du maître de Tintam, dont une première Maternité se trouve déjà au Louvre, au Pavillon des Sessions.
Pour le vieil homme, la sculpture, en ces temps de barbarie, sera plus en sécurité au Louvre près de sa sœur qu'ici au Mali. Et c'est à Alou, naturellement, que le hogon confie la mission impérative d'emmener la Maternité à Paris.
Pour atteindre son but, le jeune homme, migrant parmi les migrants, ses sœurs et frères d'infortune, devra prendre tous les risques en traversant désert et mer...

Une saison douce

L’arrivée non préparée de migrants accompagnées d’humanitaires dans un petit village sarde sans charme va bouleverser les habitudes et les relations…

Une saison douce de Milena Agus

Une petite histoire sans angélisme mais avec beaucoup de tendresse sur les rêves de l’immigration et leurs réalités.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Il pleuvait à torrents et personne, vraiment personne, n'était prêt à ouvrir sa porte, et surtout pas à ces individus. Oui, il y avait des Blancs parmi eux - les humanitaires qui les accompagnaient - mais ils étaient tout aussi étranges que les autres malheureux, mal fagotés et mal en point. Que venaient-ils faire, ces envahisseurs, dans notre petit village où il n'y avait plus de maire, plus d'école, où les trains ne passaient plus et où même nos enfants ne voulaient plus venir ? Nous nous demandions comment les affronter, où les abriter puisqu'il le fallait. Eux aussi, les migrants, avaient l'air déboussolés. C'était pour ce coin perdu de Sardaigne, ce petit village délaissé, qu'ils avaient traversé, au péril de leur vie, la Méditerranée ? C'était ça, l'Europe ?

Enfance de terre

C’est un tout joli livre, avec trop.

Trop de jolis mots, de belles émotions, d’élans d’espoirs et de candide naïveté. Beaucoup trop pour un ex président et ministre des affaires étrangères.

Enfance de terre de Didier Burkhalter
Enfance de terre de Didier Burkhalter

On ressort avec la vague impression que tout est beau et pur dans un monde de monstres, d’horreur et d’inhumanité.

Mais c’est joli

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Une année est une petite vie. Quatre saisons qui passent et s'en vont, qui partent pour repartir, apparemment sans fin. Ici, ce sont quatre années et quatre saisons qui filent, font défiler leurs histoires et les mêlent parfois. D'un printemps d'une année à un hiver d'une autre année. De l'Amérique à l'Océanie, en passant par l'Europe, l'Afrique et l'Asie. D'Angelica à Victor Preciado, d'Ahmed à Imane, de Merveille à Destin et à bien d'autres encore. Au fil de ce temps, autour du monde, des enfances sortent de terre, affirmant toujours plus fort-comme si elles en doutaient toujours davantage-qu'elles ne veulent pas être l'ultime génération ; se battant avec leurs énormes petits coeurs pour faire triompher le moteur tournant de la planète et de la condition humaine : l'espoir

La nature exposée

Un petit livre sur une cocasserie religieuse. Histoire de retirer un pagne de pierre sur une sculpture du Christ en croix. Et sous le pagne… un début d’érection.

La nature exposée de Erri De Luca
La nature exposée de Erri De Luca

Là dessus, s’ajoutent des réfugiés, la montagne, le passeur, une aventure, un mort et plein de complications qui… je me demande bien ce qu’ils viennent faire ici.

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« "Comme tu peux le voir, il s'agit d'une oeuvre digne d'un maître de la Renaissance. Aujourd'hui, l'Église veut récupérer l'original. Il s'agit de retirer le drapé."

J'examine la couverture en pierre différente, elle semble bien ancrée sur les hanches et sur la nudité. Je lui dis qu'en la retirant on abîmera forcément la nature.

"Quelle nature ?"

La nature, le sexe, c'est ainsi qu'on nomme la nudité des hommes et des femmes chez moi. »

Dans un petit village au pied de la montagne, un homme, grand connaisseur des routes qui permettent de franchir la frontière, ajoute une activité de passeur pour les clandestins à son métier de sculpteur. C'est ainsi qu'il attire l'attention des médias. Il décide alors de quitter le village. Désormais installé au bord de la mer, il se voit proposer une tâche bien particulière : restaurer une croix de marbré, un Christ vêtu d'un pagne.

Réflexion sur le sacré et le profane, sur la place de la religion dans nos sociétés, La nature exposée est un roman dense et puissant, dans lequel Erri De Luca souligne plus que jamais le besoin universel de solidarité et de compassion