Sauvage

Sauvage, c’est l’histoire d’une femme à la cuisine. Mais attention, pas de confusion ! Forte et maîtresse de sa destinée dans un restaurant romain.

Trois années étaient passées comme ça. Ma mère butée et furieuse, Matilda grandissant, mon père au sommet de son art, et Cassio et moi dans la cuisine bourdonnante, à se brûler les doigts. Antipasti, primi piatti, secondi piatti, dolci. Carciofi alla romana, pasta all'amatriciana, pasta alla carbonara, têtes d'agneau au four, cacio e pepe, coda alla vaccinara, tarte à la ricotta du Haut Latium, agneau de lait à la romaine, salade de puntarelle aux anchois. L'ivresse du travail qui nous réunissait tous les trois comme un culte. Le feu bleu des gazinières. Les hurlements.
Sauvage de Julia Kerninon

Mais aussi une femme qui se cherche, bousculée par sa passion, ses amours, sa famille et son désir.

J'étais entrée dans le restaurant de Cassio, il avait goûté la cuillerée que je lui avais tendue, il avait avalé, et il avait souri d'un sourire immense. Il avait dit « C'est fabuleux, Ottavia. Fabuleux. Qu'est-ce que c'est ? » L'espace d'un instant suspendu, tout avait paru si simple. Je nous avais vus continuer comme nous étions, nos deux appartements, nos habitudes, nos convictions, nos souvenirs, j'avais pensé aux derniers jours, à combien il m'avait manqué à Paris, à tout ce qu'il était le seul à savoir sur moi, tout ce que j'étais la seule à savoir sur lui et continuer avait semblé possible. Mais la seconde d'après je m'étais entendue dire à voix haute « C'est toute ma colère contre toi, Cassio. C'est terminé, cette fois. »

Une ode à la cuisine romaine portée par une femme décidée et qui, malgré ses doutes, prend sa vie en main.

Magnifique !

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
C'est le matin à Rome. Quelques heures plus tôt, je me suis réveillée à côté de Bensch, il m'a embrassée, et puis les voix cristallines des enfants se sont élevées dans les chambres, le jour s'est ouvert. J'ai filé dans la salle de bains, je me suis lavé les cheveux, je les ai séchés, attachés en chignon. J'ai passé une robe noire et des collants, j'ai mis de la crème, du mascara, du rouge à lèvres, des boucles d'oreilles.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
À Rome, Ottavia Selvaggio a décidé à quinze ans d'être maîtresse de son destin. Ni ses histoires d'amour, ni le mariage, ni même la maternité ne la font dévier de sa route. Pendant que son mari s'occupe de leurs enfants, elle invente dans son restaurant une cuisine qui ne doit rien à personne.

En robe noire et sans frémir, Ottavia avance droit, jusqu'au jour où un homme surgit du passé avec un aveu qui la pousse à douter de ses décisions. Comment être certaine d'avoir choisi sa vie ?

Le désir a-t-il une fin ?

Leur séparation

Au travers de ses souvenirs d’enfance Sophie parle de cette blessure inguérissable, de ce deuil impossible, de cette séparation qui n’est pas la sienne. Le divorce de ses parents.

Des années après, ma mère m'avait confié qu'en réalité ce séjour avait été houleux et avait sans doute hâté la fin de leur histoire. Je n'avais pas envie qu'elle me le raconte. Je voulais seulement garder la douceur de ces jours, le ronronnement du chaton noir que nous avions prénommé Myrtille, le goût du sorbet à la fraise fondant dans ma bouche, l'éclat de nos rires d'enfants quand nous avions tour à tour essayé le casque prêté par un pompier venu détruire un nid de frelons, les accents chantants de la langue italienne, gatto, signora, buongiorno.
Leur séparation de Sophie Lemp

Des instants, des lieux, des émotions… comme une longue liste qui peine à prendre, à reprendre et se recoller. Un livre qui m’a semblé aussi fragmenté que la petite Sophie à pu l’être

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Dans un album sont réunies mes photos de classe. Sur celle de l'année 1987-1988, tous les élèves sont déguisés, c'est mardi gras. Je porte une robe jaune à volants et un jupon qui appartenaient à ma mère. Mon visage est plein, souriant, lumineux.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Ce samedi matin de janvier, ma mère m'attend à la sortie de l'école. Comme les autres jours, nous remontons la rue des Boulangers mais, au lieu de nous arrêter au carrefour, nous prenons à gauche dans la rue Monge. Je me retourne et aperçois un camion de déménagement garé en bas de notre immeuble. Ma mère serre ma main dans la sienne. Je n'ai pas envie de parler, je pense au camion, aux cartons, au salon qui demain sera à moitié vide. Je pense à mon père. Désormais, j'irai chez lui tous les mercredis soir et un week-end sur deux. Ma mère s'est organisée pour que je passe l'après-midi et la nuit chez une amie. Avant de partir, elle me dit Profite bien de ta journée, amuse-toi, essaye de penser à autre chose. Je hoche la tête mais je sais que jamais plus je ne penserai à autre chose. »

Sophie Lemp fête ses dix ans quand ses parents divorcent. Trente ans plus tard, c'est avec le regard d'une petite fille devenue adulte qu'elle revit cette séparation.

Pourquoi cette blessure, commune à tant d'enfants, est-elle si difficile à cicatriser ?

La langue des choses cachées

La forme est travaillée, recherchée, poétique à l’excès. Elle en enrobe le fond et l’histoire pour en devenir une figure de style ampoulée qui m’a lassé et laissé en surface.

 - Je ne dis pas que c'est votre faute, ni que vous avez menti. Mais vous n'êtes pas malade, pas vraiment, n'est-ce pas?
La jeune femme soupira. La maison ne prendrait pas feu. La colère redevint une ombre et la mère avança le buste, pliée, son visage à hauteur de figure, elle tendait le cou comme un cygne.
 - Je ne suis pas malade, mais j'ai si mal, souffla-t-elle, les yeux descendus sur son ventre.
 - Vous avez mal de chagrin. C'est la vraie douleur.
La langue des choses cachées de Cécile Coulon

Et même l’histoire (qui baigne dans un ésotérisme qui me laisse généralement froid, il est vrai), de guérisseurs et guérisseuses se transmettant leurs dons pour soigner celles et ceux pour qui les hommes ne peuvent rien, ne m’a pas vraiment touché

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Car c'est ainsi que les hommes naissent, vivent et disparaissent, en prenant avec les cieux de funestes engagements: leurs mains caressent et déchirent, rendent la peau si douce qu'on y plonge facilement des lances et des épées.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
À la tombée du jour, un jeune guérisseur se rend dans un village reculé. Sa mère lui a toujours dit : « Ne laisse jamais de traces de ton passage. » Il obéit toujours à sa mère. Sauf cette nuit-là.
Cécile Coulon explore dans ce roman des thèmes universels : la force poétique de la nature et la noirceur des hommes.
Avec La Langue des choses cachées, ses talents de romancière et de poétesse se mêlent dans une oeuvre littéraire exceptionnelle.

Je suis fait de leur absence

Je suis fait de leur absence avance masqué, mais aussi rapidement qu’insidieusement, il devient plus sombre. Et au fil des flash-back (un peu lassants, certes), la noirceur s’installe au cœur d’un amour naissant.

Mais rien n'y a fait. Force est de constater que je me suis imposé, seul, l'idée de ne pas avoir d'autre choix. Je ne trouve aucune alternative pour changer le récit. Seule la rage s'éternise. Tant pis. J'irai au bout résoudre l'éternelle contradiction. La violence pour achever la violence.
Je suis fait de leur absence de Tim Dup

Un livre marquant sur les féminicides. Mais plus encore, sur ceux qui restent, les victimes collatérales, les enfants et la famille qui devront vivre avec. Avec la culpabilité et la douleur des survivants

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
J'adore cette maison. Elle raconte ma famille comme personne; d'où nous venons, nos enfances, nos miracles, nos aberrations. Roseville- sur-Mer. C'est là que tout s'est joué et que tout se joue encore.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
« Je me concentre sur la panoplie de cartes postales. Sophie écrit d'une colonie de vacances, à l'été 1975, d'un trait large et penché de petite fille. Je trouve un calepin. Dépassent une branche, des pétales séchés. Se suit, page après page, une succession d'herbiers. Ces fleurs font apparaître en moi la grive de mes rêves, l'oiseau de la culpabilité. Les feuilles sont datées à l'encre noire, sur chaque coin gauche, d'une écriture plus mûre. Sous le carnet, d'autres cartes. Un fjord s'étire, blanchi de flocons, sous une brume mortuaire. L'image est paisible, appelle à plonger le regard comme pour se déverser dans l'interdit. Je la retourne. Un haut-le-coeur. Je la parcours, tremblant. Les empreintes de Sophie sont là. Elle a dû la lire, la relire un nombre incalculable de fois ; d'abord transie d'amour, puis cherchant un soupçon d'espérance à mesure que tout sombrait. »

Dans un paysage balayé par le sel et le vent, le premier roman de Tim Dup explore avec nuances la question des violences intrafamiliales, tout en reconduisant le lecteur dans la maison universelle de son enfance.

Les frères Sisters

Un pur western, avec des tueurs à gages, bien méchants (et peut-être pas tant que ça), du sang, des chevaux, des chercheurs d’or, de la folie et beaucoup, beaucoup d’humour !

Père a cassé la fenêtre d'un coup de poing puis il l'a frappée sur le bras avec le manche de la hache. Je crois qu'il était devenu fou. Il avait déjà frôlé la folie auparavant, mais quand je suis retourné dans la maison pour aider Mère, j'ai eu le sentiment qu'il était complètement dément. Il ne m'a pas reconnu lorsque je suis entré avec mon fusil.
 - Comment se fait-il que les gens deviennent fous ?
 - Ça arrive, c'est tout.
 - Peut-on vraiment perdre l'esprit et redevenir normal ensuite ?
 - Pas complètement. Non, je ne crois pas. J'ai entendu dire que c'était héréditaire, que c'est le père qui transmettait la folie aux enfants.
 - Je n'y ai jamais pensé. Pourquoi ? Tu te sens fou, parfois ?
 - Parfois je me sens impuissant.
 - Je ne crois pas que ce soit la même chose.
Les frères Sisters de Patrick deWitt

Vraiment un très, très bon livre qui m’a bien fait rire et dont Jacques Audiard en a fait une adaptation pas trop dégueu

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Assis devant le manoir du Commodore, j'attendais que mon frère Charlie revienne avec des nouvelles de notre affaire.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Oregon, 1851. Eli et Charlie Sisters, redoutable tandem de tueurs professionnels aux tempéraments radicalement opposés mais d'égale (et sinistre) réputation, chevauchent vers Sacramento, Californie, dans le but de mettre fin, sur ordre du « Commodore », leur employeur, aux jours d'un chercheur d'or du nom de Hermann Kermit Warm. Tandis que Charlie galope sans états d'âme - mais non sans eau-de-vie - vers le crime, Eli ne cesse de s'interroger sur les inconvénients de la fraternité et sur la pertinence de la funeste activité à laquelle lui et Charlie s'adonnent au fil de rencontres aussi insolites que belliqueuses avec toutes sortes d'individus patibulaires et de visionnaires qui hantent l'Amérique de la Ruée vers l'or.

Dans ce roman jubilatoire où l'humour noir le dispute à une subtile excentricité, Patrick de Witt rend un hommage décalé aux classiques du western tout en invitant le lecteur à en explorer les ténèbres, sous l'inoubliable houlette de deux frères moins liés par le sang et la violence que par l'indéfectible amour qu'en silence ils se portent.

Furies

Quel impressionnant premier roman ! Construction, personnages, lieux, forme et fond… tout est maîtrisé, les éléments du récit se répondent les uns aux autres, sans fioritures dans un furieux roman.

 - Tout va bien ?
Asim grogna. Ce tissu sous ses doigts, c'était une étoffe qu'il avait déjà serrée. Il en reconnaissait les perles, l'entrelacement des fils. Et il y avait ce bouton de nacre qu'il avait attaché sous sa nuque... Asim tourna légèrement la tête, et ce fut l'extinction du monde.
Ah, tu as trouvé la mariée! Elle devait être belle! Depuis la montagne on a pu voir son cortège quitter la ville. Dommage pour eux, ils ont croisé une brigade de djihadistes. Ils l'ont décapitée parce qu'elle était maquillée et ne portait qu'un voile transparent. Ils ont dit que c'était contraire au Coran et ils ont aussi tué l'époux. Pour impureté. Il aurait dû empêcher l'indécence de sa femme, c'est ce qu'ils ont dit.
Furies de Julie Ruocco

Et dans cette furie, la force des femmes s’élève en rempart contre la barbarie des hommes, de Daesh, de la guerre en Syrie.

Bérénice avait cru dans la langue. Elle avait reçu de son père le sens de chaque mot comme un cadeau, un trésor que son accent polissait spécialement pour elle. Aujourd'hui elle rencontrait une autre parole, à la fois sublime et impuissante. Une voix qui ouvrait un gouffre. Elle comprenait soudain que les mots avaient deux faces, deux histoires parallèles qui s'écrivaient avec le sang d'une même humanité. Plus jamais elle ne pourrait prononcer le mot paix, le mot justice, sans éprouver de la honte. Les lettres s'effaçaient, elles n'étaient plus que des coquilles vides. Toute la lâcheté de la civilisation résidait dans cette promesse non tenue, dans cet écho répété à l'infini.

Un roman ou la tendresse trouve toutefois sa place, même parfois dans le cœur des hommes. Furies vengeresses, résilientes ou utopistes… toujours combattantes

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
"On vit dans un monde de coïncidences. Un homme et une balle qui se rencontrent, c'est une coïncidence."
Elle ne savait pas pourquoi, mais les mots d'Aragon tournaient en boucle dans sa tête et elle ne pouvait rien y faire. Cela faisait pourtant longtemps qu'elle n'avait pas relu Aurélien. Elle fixait les grappes d'air qui s'agglutinaient à la surface de son café bouillant. On aurait dit des œufs d'insecte en train d'éclore.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
En mission à la frontière turque, Bérénice, archéologue française dévoyée en receleuse d'antiquités, se heurte à l'expérience de la guerre. Dans la convulsion des événements, elle recueille la fille d'une réfugiée, et fait la rencontre d'Asim, pompier syrien devenu fossoyeur. Poussé par l'avènement de l'État islamique, ce dernier s'est exilé en Turquie, où il fabrique de faux passeports. Aux morts enterrés dans son pays, il tente de redonner vie par la résurrection de leurs noms. La grandeur de sa tâche est à la mesure de sa folie. Celle de maintenir une mémoire vive, au moment même de son effondrement. Cette cause, qui perdure au-delà du seul pari individuel, les mènera jusqu'au Rojava, sur la trace des guerrières peshmergas et de leur combat pour la liberté.

Entre ce que Bérénice déterre et ce qu'Asim ensevelit, il y a l'élan d'un peuple qui se lève et qui a cru dans sa révolution. Quand les événements s'emballent et qu'ils contractent les existences, seules les coïncidences peuvent retisser ce qui a été défait par la guerre.

Sondant notre histoire contemporaine à la recherche des Furies antiques, le roman de Julie Ruocco rend un hommage puissant aux femmes qui ont fait les révolutions arabes, et à leur quête de justice.

Le nom sur le mur

Partant d’un jeune résistant de la seconde guerre mondiale tué à 20 ans, Hervé Le Tellier met les petits plats dans les grands et nous parle de la résistance et de la collaboration ; du nazisme et des victimes ; de l’odieux et du vertueux ; de la petitesse et du suivisme face à au refus de céder.

C'est mon professeur de philosophie de terminale qui m'a fait lire Si c'est un homme, de Primo Levi. Nous en avons parlé ensuite, et il m'a dit, en substance: « Tu sais, les lois antisémites nous choquent d'autant plus qu'elles frappaient des gens qui se croyaient bien intégrés dans nos sociétés européennes. On martyrisait notre voisine de palier. Mais dans les années trente, est-ce que ces mêmes lois racistes - et bien qu'il ne soit pas question d'extermination -, les Anglais ne les appliquaient pas aux coolies en Inde et les Français aux Noirs d'Afrique, sans que cela choque grand monde ? »
Le nom sur le mur de Hervé Le Tellier

Un livre qui m’a souvent rappelé Exterminez toutes ces brutes tant les même schémas se répètent, encore et encore.

En France, l'heure était à la réconciliation, au mythe de la nation sinon résistante, du moins unie derrière sa Résistance. L'article 45 de la loi d'amnistie d'août 1953 interdit même de rappeler les crimes commis. Il ne s'est rien passé. Le président du Conseil René Meyer le résumera sans fard: « L'unité nationale [est] supérieure à toutes les douleurs, plus urgente encore que les réparations. »

Et que penser de l’après guerre, des fondateurs du FN (futur RN), de cette amnistie générale servant à former un roman national destiner à réunir le pays ?

Et s’il est désespérant d’y constater nos compétences moutonnières, voilà un livre indispensable à l’heure de la remontée des fascismes et des extrémismes populistes

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je cherchais une « maison natale ». J'avais expliqué à l'agent immobilier : pas une villa de vacances, pas une ruine « à rénover », pas une « maison d'architecte », pas un « bien atypique », ces bergeries ou magnaneries transformées en habitations où l'on se cogne dans les chambranles de portes à hauteur de brebis.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Je ne suis pas l'ami d'André Chaix, et aurais-je d'ailleurs su l'être, moi que presque rien ne relie à lui ?

Juste un nom sur le mur.

Chaix était un résistant, un maquisard, un jeune homme à la vie brève comme il y en eut beaucoup.

Je ne savais rien de lui. J'ai posé des questions, j'ai recueilli des fragments d'une mémoire collective, j'ai un peu appris qui il était. Dans cette enquête, beaucoup m'a été donné par chance, presque par miracle, et j'ai vite su que j'aimerais raconter André Chaix. Sans doute, toutes les vies sont romanesques. Certaines plus que d'autres.

Quatre-vingts années ont passé depuis sa mort. Mais à regarder le monde tel qu'il va, je ne doute pas qu'il faille toujours parler de l'Occupation, de la collaboration et du fascisme, du rejet de l'autre jusqu'à sa destruction. Ce livre donne la parole aux idéaux pour lesquels il est mort et questionne notre nature profonde, ce désir d'appartenir à plus grand que nous, qui conduit au meilleur et au pire.

Le monde véritable

Ce monde véritable est sous titré « fable ». Une fable tendant à illustrer une leçon de vie… Et donc ? De quelle leçon Jim Fergus souhaite donc nous parler ? Il y a des méchants ? Le bonheur ne dure jamais, soyons vigilants ? Il faut faire confiance aux animaux ?

Premiers arrivés, les loups se sont massés sur la colline voisine, formant des meutes de différentes espèces. Pitoyables créatures, et pourtant angoissantes, secondées de coyotes, de renards, de chiens, tous pelés et la bave aux babines. Leurs côtes saillantes semblent prêtes à leur trouer la peau. Ils sont si proches maintenant que nous parviennent les miasmes qu'exhalent les cavaliers et leurs montures. Des hommes, des femmes se dressent sur une seconde colline, répandant tous une puanteur mortifère, l'odeur infecte de la chair putride.
Le cavalier qui s'avance à présent, brandissant un drapeau aux couleurs inconnues, n'a pas cet aspect maladif que présentent les autres. Ni son cheval ni lui ne paraissent mal en point.
Le monde véritable de Jim Fergus

Un petit opus qui m’a semblé bien inutile et fort loin de la puissance des Mille femmes blanches.

Illustrations de Anne-Gaëlle Amiot

Restent de très belles illustrations de Anne-Gaëlle Amiot qui agrémentent une bien faiblichonne fable

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Je m'appelle Molly McGill Hawk et je suis arrivée ici, en compagnie d'un certain nombre de mes concitoyennes, à l'automne de l'an de grâce 1877.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
1877 : Victime de violences conjugales, Molly McGill, une jeune institutrice, est condamnée pour le meurtre de son mari. Emprisonnée à Sing Sing, elle a l'occasion de s'en sortir en acceptant de rejoindre un convoi de mille femmes blanches destinées à épouser des guerriers indiens. Bientôt, elle découvre les mœurs des Cheyennes, leur culture, leur communion avec la nature, et trouve une liberté inespérée en adoptant leur mode de vie. Mais quelques mois plus tard, en dépit de tous les traités, l'armée américaine décime sa tribu. Molly a désormais le choix entre rejoindre une prétendue « civilisation » dont elle ne connaît que trop les méfaits ou dépérir dans une réserve. Elle décide alors, en compagnie d'un petit groupe de femmes, de suivre une vieille Cheyenne aveugle vers le « Monde véritable », un paradis selon la mythologie amérindienne. Et elle se retrouve en effet dans un véritable Éden, une prairie luxuriante au pied des montagnes, en compagnie de Hawk, son époux indien, de leurs filles, et de leur chien, Falstaff. Mais bientôt, une voyageuse impromptue se présente pour prévenir la petite communauté d'une menace imminente...

Après Mille femmes blanches, c'est sous la forme d'une fable que Jim Fergus nous raconte ici la destinée de Molly, une héroïne hors du commun. Il nous offre à la fois un magnifique portrait de femme et un hommage bouleversant à une culture pleine de vie que la civilisation moderne s'est efforcée d'éradiquer. On peut aussi y lire une parabole d'une actualité brûlante sur les dangers qui guettent notre monde.

Le vent léger

Le vent léger, c’est l’enfance heureuse, joyeuse et insouciante. La vie qui naît, ensemble, en famille avec une sœur et des frères. La musique des saisons et l’amour qui porte et transporte.

Mon grand-père justement avait répandu toute sa vie cette légende jamais démentie: « Un jour, dans la petite vallée où nous avions notre ferme, le grand char du vent, passant en trombe dans le pacage, a soulevé notre plus grosse vache et l'a déposée sur le toit de la grange. Parce qu'il ne disposait pas d'une grue, mon père a dû grimper là-haut avec sa scie et découper la portion du toit où reposait l'animal. Aussitôt la dernière planche sectionnée, la vache a traversé le grenier à la verticale pour aller lourdement finir sa course dans l'énorme tas de foin aménagé sur le plancher du bâtiment. » Voici ce que j'en pense : ça ne s'est pas passé comme ça. Mais je considère cette histoire merveilleuse comme étant l'origine familiale de notre intérêt pour un usage, disons, poétique de la vie, et pour une certaine refonte du réel appuyée aux ressorts de l'imagination, à sa cause agissante, sa force occulte et morale.
Le vent léger de Jean-François Beauchemin

Et la maladie et la mort qui s’invitent.

Et c’est très beau, même si ça force un peu sur le mélo et le « c’était plus authentique avant »

Incipit (et peut-être un petit peu plus si entente)
Un matin de l'été mille-neuf-cent-soixante-cinq, peu après le passage de la benne à ordures, la verroterie des dernières étoiles a cessé de scintiller, et la nuit noire du monde a majestueusement cédé sa place aux rayons poétiques et très anciens du soleil.


4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
À l’automne de l’année mille-neuf-cent-soixante-et-onze, une famille composée de six enfants délurés et de leurs parents vit une existence paisible à la campagne. La mère, bientôt malade, est l’objet de l’attention tendre et des soins empressés du père et de ces enfants aimants, à la fois graves et légers, introspectifs et expressifs. À leur récit de ce passage obligé par le malheur et le chagrin s’enchevêtrent divers événements ponctuant l’histoire récente du Québec et du monde. Comme si l’aventure humaine n’était en vérité ni petite ni grande, mais jalonnée de faits, de courants et de hasards, tragiques ou frivoles, formant à la fin un collier, ou une chaîne, celle de cette existence dérisoire et merveilleuse que nous traversons tous.

Le combat ordinaire : intégrale

Un chef d’oeuvre de la BD. Un homme qui s’agrippe et tente de construire sa vie.

Le combat ordinaire de Manu Larcenet

Oscillant entre grosse marrade et profonde déprime, humour léger et crises d’angoisses, ce combat ordinaire dévoile un homme qui doute, se cherche, et se confronte (voir, se retrouve confronté bien malgré lui) pour tenter d’avancer.

Et c’est beau, sensible et d’une grande finesse

4e de couv, résumé de l'éditeur ou trouvé ailleurs (pas de moi, donc)
Un jeune photographe, en pleine interrogation existentielle, se retire à la campagne. Il rencontre alors un vieux pêcheur, une jeune femme vétérinaire et l'amour, avec les choix qu'il implique